L'association NPCB souhaite réagir aux propos tenus par Monsieur Alain Perron en clôture de la réunion publique organisée le 24 octobre dernier à Lanvénégen sur le projet d'aménagement foncier de la commune.
Le fait que cet élu municipal, agriculteur de son état et élu de la Chambre d'Agriculture, se présente comme un défenseur de l'environnement et présente un tel projet comme contribuant à la protection de l'environnement est inacceptable.
D'après lui, ce serait là « une chance à saisir pour préserver nos espaces naturels, nos chemins, nos ressources en eau, nos bocages et autres patrimoines culturels ».
C'est ce même élu qui siège à la Commission Locale de l'Eau (CLE) et aux groupes de travail du SAGE où il représente la Chambre d'Agriculture et s'oppose systématiquement à toute initiative efficace de restauration des zones humides, de reméandrage des cours d'eau, tout en réclamant toujours davantage d'eau pour l'agriculture.
C'est ce même élu qui siège au Comité de Pilotage du site Natura 2000 Rivière Ellé et s'oppose systématiquement à toute initiative visant à donner un périmètre cohérent à ce site et à rétablir la continuité écologique sur la totalité des cours de l'Ellé et de ses affluents, ainsi que l'exige la Directive européenne « Habitats ».
C'est ce même élu qui porte à Lanvénégen le projet d'aménagement foncier de la commune.
Manifestement, nous n'avons pas la même vision de la protection de l'environnement !
Comment peut-on parler de préservation du patrimoine naturel dans le contexte d'un projet d'aménagement foncier ? Le patrimoine naturel, c'est la notion de nature vivante (la faune, la flore), ainsi que celle de nature en tant qu'élément du paysage ; c'est aussi la notion de bien commun, encore relativement épargné par l'homme, et qu'il convient de préserver pour les générations futures. Même en admettant que les destructions de talus et haies existants soient compensées par des replantations, sur talus ou non, la perte nette en biodiversité et en termes de paysages est énorme. Les haies sont des éléments vivants du paysage qui doivent être entretenues et rajeunies sur des cycles longs, générant un minimum de perturbations pour les dizaines d'espèces de faune et de flore qui les colonisent. Un alignement de baliveaux nouvellement plantés suite à l'arasement d'un talus ne peut en aucun cas prétendre recréer pareil environnement avant de longues années, quant à l'aspect paysager …
Comment peut-on parler de préservation des chemins quand il s'agit de supprimer ou d'élargir des voies de circulation qui existent depuis plusieurs centaines d'années, qui sont bordées des deux côtés de murs talus plantés de haies tout aussi vénérables, entretenus par les générations qui nous ont précédés ? Comment prétendre comparer la beauté d'une voûte de verdure de vingt ou trente mètres de haut avec un alignement de baliveaux fraîchement plantés ?
Comment peut-on parler de préservation des ressources en eau quand il s'agit, encore une fois, de détruire des structures (haies, talus) existantes, matures et fonctionnelles, pour les remplacer, dans le meilleur des cas, par de jeunes plantations dont les racines mettront des années à remplir les mêmes fonctions et par quelques talus (l'expérience montre qu'on en reconstruit généralement moins qu'il n'en a été détruit). Les haies bien enracinées, sur talus ou non, permettent de ralentir le ruissellement de surface lors de grandes pluies, de favoriser leur absorption dans le sous-sol (qui pourra ensuite les restituer pendant la saison sèche), de retenir la terre sur place et de filtrer les polluants d'origine agricole. Elles contribuent donc à limiter les crues, à reconstituer les stocks d'eau souterraine et à améliorer la qualité de l'eau. Décidément, le compte n'y est pas...
Comment peut-on parler de préservation du bocage quand il s'agit précisément d'en supprimer une large proportion ? L'étude préalable à la mise en oeuvre de Breizh Bocage sur la communauté de commune avait en son temps identifié Lanvénégen parmi les communes non prioritaires en raison de la qualité et de la densité de son bocage, ce dont on ne peut que se féliciter... sauf que ce sont maintenant ses propres élus qui projettent d'en détruire 14 kilomètres linéaires (si l'on en croit l'estimation préliminaire du bureau d'étude) pour replanter des baliveaux sur une longueur nettement moindre. Faire et défaire, c'est toujours travailler, mais qu'on ne nous parle pas de préservation du bocage...
Comment peut-on parler de préservation du patrimoine culturel quand il s'agit de pratiquer des suppressions conséquentes de haies et de talus en préservant quelques « écrins » de verdure à proximité immédiate des chapelles et autres sites remarquables qui se trouveraient ainsi totalement déconnectés de leur contexte socio-culturel, transformés en bulle architecturale dans un environnement radicalement transformé ?
Il n'est pas admissible de faire ainsi passer pour une opération environnementale un aménagement foncier essentiellement conçu pour le bénéfice de quelques exploitations agricoles mais financé par tous les habitants de la commune qui y perdraient en prime un cadre de vie exceptionnel.
Nous n'avons décidément pas la même vision de la protection de l'environnement !
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