Peuple breton ou « région Bretagne », il faut choisir !

Chronique publié le 26/11/22 19:33 dans Politique par Yvon Ollivier pour Yvon Ollivier
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Yvon Ollivier
Les Bretons sont un peuple (426 vues)

Il me semble crucial de répondre aujourd’hui à la question centrale qui se pose à nous. Sommes-nous encore un peuple ou une simple « région » en Bretagne ?

Si la régionalisation a pu amorcer une forme de reconnaissance, avec des compétences assez dérisoires et au mépris de notre territoire historique, ce phénomène entretient notre incorporation au sein de l’ordre jacobin ainsi que notre secondarisation par rapport à Paris.

De la réponse que nous apportons à cette question dépend tellement de choses. La « région », en tant que partie du tout, est toujours secondaire, soumise à la centralité et la question de l’émancipation de la Bretagne ne se pose donc pas. La « région » est la marque et la caution de notre asservissement comme de notre spoliation quotidienne.

Comment et pourquoi sauver des « langues régionales » forcément secondaires par rapport à la langue officielle ? La partie d’un tout voit son altérité lui échapper progressivement et sa culture sombrer dans une folklorisation pour touristes en mal d’exotisme. C’est le processus auquel nous sommes soumis aujourd’hui. Sur cette pente, nous ne sauverons pas nos langues et tout ce qui nous différencie en tant que breton.

Depuis le temps que je milite, je suis toujours surpris par la perte de l’esprit d’émancipation qui sévit chez nombre de nos militants bretons, sans doute devenus trop dépendants de la « Région » pour esquisser la moindre velléité émancipatrice. Surtout, il importe de ne pas fâcher ceux qui à la Région sont en charge de délivrer de maigres subventions.

La logique « régionale » et institutionnelle l’emporte sur tout ce qui pourrait rappeler de près ou de loin que le peuple breton existe. Je prends pour exemple la mobilisation populaire lancée à Carhaix sur l’autonomie qui a vu les élus régionaux s’en désolidariser au plus vite, comme d’une menace existentielle, hormis certains courageux comme Paul Molac.

Cette mobilisation désormais lancée n’a d’autre objet que de rappeler que le peuple breton existe bien, qu’il aspire naturellement à l’autonomie et que les élus à la région ont une responsabilité historique pour y parvenir, loin de la demi-mesure que semble devoir indiquer la reculade de Chesnais-Girard sur l’autonomie législative et le statut constitutionnel .

La logique « régionale » nous conduira à la demi-mesure et au statu quo qui est celui de la spoliation institutionnelle et financière du peuple breton, éternelle variable d’ajustement au profit de la centralité parisienne.

Nous savons la puissance du dogme de l’indivisibilité de la souveraineté nationale et le carcan des principes constitutionnels -égalité, unicité, propriété-. Si le droit peut concevoir certaines formes d’habilitation législative et règlementaires, les conditions posées en sont tellement restrictives que ces dispositifs sont voués à l’échec. La technocratie française n’en veut pas et rejette toute véritable différenciation. Les Corses, qui n’ont eu aucune réponse à leurs demandes d’adaptation législative, le savent mieux que personne.

Ces demi-mesures telles l’expérimentation figurant dans la constitution, ou la répartition de compétences issus de la loi 3DS- sont vouées à l’échec ou de peu d’intérêt. C’est ce que j’ai voulu expliquer lors de mon intervention au colloque de Carhaix (voir vidéo ci-jointe)

La ligne de partage « région » ou peuple traverse le groupe de travail chargé de réfléchir à la question au sein de la collectivité régionale. Je crains fort que l’arbitrage régional ne se fasse en faveur de la demi-mesure, ce qui n’aura d’autre effet que de proposer à l’Etat un artifice de plus pour légitimer le système jacobin. Une proposition d’habilitation règlementaire ? Quelques compétences supplémentaires mais avec quel budget si nous ne disposons pas de véritable autonomie financière ?

La logique de « peuple » nous invite à concevoir l’autonomie pleine et entière, à savoir la délégation de compétences législatives et un statut constitutionnel adapté à la Bretagne permettant de déroger au carcan constitutionnel. Le droit français l’autorise pour certains peuples ultra-marins.

Vous me répondrez que je peux me tromper. Alors je vous donne rendez-vous pour le moment où nous pourrons vérifier si la création du groupe de travail aura pu déboucher sur une quelconque forme d’émancipation pour la Bretagne et l’octroi de moyens budgétaires adaptés.

Je ne crois pas qu’il soit possible d’émanciper la Bretagne au sein du système jacobin avec ceux-là mêmes qui en vivent depuis si longtemps et en suivent toutes les règles, à commencer par le postulat de l’inexistence du peuple breton.

Si un changement vers l’ouverture devait se produire, ce sera le produit de la faillite du système jacobin, bien sûr, mais encore de l’union des Bretons désireux de s’en défaire. C’est pourquoi lorsque le peuple bouge, il faut le suivre.

La mobilisation lancée ce 19 novembre 2023 à Carhaix a ses qualités et ses défauts. Mais c’est une promesse pour l’avenir. Nos élus à la Région gagneraient à s’appuyer sur elle pour faire bouger les lignes plutôt que de lui fermer la porte au nez.

Yvon Ollivier

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Vos commentaires :
Dimanche 28 avril 2024
Ces divers échanges sont intéressants et nous permettent de clarifier notre position de bretons ...
Internationalement il nous faut avoir un territoire délimité et la Bretagne a la chance d'avoir ce territoire, l'un des plus ancienne Nation d'Europe à 9 Pays et 5 départements depuis la période révolutionnaire .
Il y a quelques années des associations américaines que je sollicitais pour nous aider dans notre combat pour la reconnaissance de notre Pays la Bretagne, m'avaient répondu: «Si vous ne vous déclarez pas comme Nation et que vous restez dans une démarche de Région, on ne peut rien pour vous . Soit vous êtes une entité à part entière, soit vous êtes une partie de la France . Dans ce dernier cas nous n'avons pas le Droit d'intervenir ...»
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