Qui est cette agence qui sévit depuis sept ans en Bretagne ? Qui s'en occupe ? Vidéos, photos, articles de presse, interactivité, 50.000 visiteurs par mois sur (voir le site) ... Quelle est la ligne éditoriale de l'ABP ? Comment contribuer à ce média via Internet ? Autant de questions et de réponses apportées par Philippe Argouarch, créateur et webmaster d'Agence Bretagne Presse et d'ABP-TV.
Fanny Chauffin : Philippe, pouvez-vous résumer votre parcours en un paragraphe ?
Philippe Argouarch - Je suis de la génération 1968. J'ai vendu la «Cause du Peuple» en 1969 à la sortie des restaurants universitaires, surtout quand ce journal était interdit. Ce n'est pas tant que j'étais d'accord avec tout ce qui y était écrit mais déjà je trouvais indigne d'une «démocratie» qu'un journal puisse être interdit. À la même époque, j'ai aussi rejoint le mouvement breton. Refusant de faire mon service militaire et me rendant compte que rien n'avançait en Bretagne, je suis parti aux États-Unis où je suis resté 23 ans après plusieurs années en Belgique et en Grande-Bretagne. Aux États-Unis, j'étais membre de l'ACLU (Américain Civil Liberties Union) et ce sont eux qui ont forgé ma culture démocratique libertaire et m'ont fait comprendre l'importance de ne jamais compromettre les principes fondamentaux.
Entre la «Cause du Peuple» en 1969 et le lancement de ABP-TV, la télévision bretonne citoyenne, en septembre 2008, il y a eu 40 ans de pérégrinations que je ne peux résumer en un paragraphe. Toujours est-il qu'au début des années 1990, alors que je travaillais à l'université de Stanford, j'ai eu la chance de prendre et de surfer la vague internet (le web, en fait) alors à ses débuts. Tout de suite, cette technologie m'a passionné car j'en voyais tous les potentiels, en particulier pour la Bretagne, dépourvue de télévision régionale et même d'un quotidien couvrant les 5 départements avec une optique bretonne.
Fanny Chauffin : L'ABP dérange et est régulièrement l'objet de crises éditoriales. On lui reproche sa ligne politique, trop centriste, ou la place faite à des mouvements ou partis extrémistes... Quelle est votre réponse à ces attaques ?
P. A. – Mes différends avec certains partis de la cause bretonne ne sont pas politiques, mais culturels. De retour en France depuis plusieurs années, je reste convaincu que l'approche anglo-saxonne des médias est meilleure et ceci sans même parler du journalisme d'investigation où la France est loin, très loin derrière. Non seulement aux États-Unis, la liberté de la presse est ininterrompue depuis 1786 mais il n'existe aucun média d'État, ce qui, d'une part, met tout le monde sur le même pied d'égalité et, d'autre part, protège des aventures genre Pravda. Je rappelle aussi que le ministère de la Culture finance l'AFP à plus de 110 millions d'euros par an et subventionne certains médias comme les journaux (via le portage)... et pas l'internet. A ceux qui critiquent la dépendance des grands groupes financiers, je réponds que c'est encore pire en France vu que ce sont les marchands de canons, eux-mêmes étroitement liés à l'État, qui sont les propriétaires des grands groupes de presse français. Pourquoi la presse papier serait-elle financée et pas la presse internet ? Tout est à revoir – et tout d'abord le principe même de subvention, hérité de l'ancien régime des faveurs de cour, et foncièrement à la base de concurrences déloyales, d'injustices, d'inégalités, voire de corruptions. Pour la culture bretonne, le problème ne sera pas résolu en la subventionnant, mais en arrêtant de subventionner la presse, la télé, le théâtre et le cinéma de culture française. Je suis pour la séparation de la culture et de l'État.
En ce qui concerne la ligne éditoriale de l'ABP, je suis un adepte du premier amendement de la constitution américaine : donner la parole à tous même aux ennemis de la liberté. D'ailleurs, Noam Chomsky ne me contredirait pas. Ce grand intellectuel et linguiste américain, critique de la politique internationale des USA, a aussi ridiculisé les tentatives françaises de criminaliser la pensée au moment de l'affaire du négationnisme.
ABP se définit, même si elle n'en a pas les statuts, comme une agence de presse : elle est ouverte à tous les partis politiques légalement constitués et déclarés à la commission électorale. Cela va de l'extrême gauche à l'extrême droite. Personne n'oblige personne à tout lire sur ABP. Si un communiqué ou une interview ne plaît pas, il faut passer chemin et surtout ne pas le lire. Sur ABP, lire c'est voter puisque la Une et le positionnement des articles sur la page d'accueil sont déterminés par le nombre de clics (de lectures donc) pour chaque article. ABP n'est pas une vitrine pour tel ou tel parti puisque ce sont les lecteurs qui composent la vitrine. ABP serait plutôt un miroir qu'une vitrine. Si les Bretons qui ont tout renié et ceux qui ont forcé la réalité dans un moule idéologique n'y participent pas ou plus, c'est simplement qu'ils n'aiment pas ce qu'ils voient dans le miroir.
ABP est comme l'internet : il y a à boire et à manger. La responsabilité des choix est entre les mains des individus-citoyens (ou des parents dans le cas des mineurs), pas entre celles de l'État, d'un parti politique, d'un groupe financier ou d'un rédacteur en chef. Ceci étant dit, il y a une ligne éditoriale très claire qui est basée sur la déontologie de la presse et les lois en vigueur contre le racisme, la xénophobie, le sexisme et la diffamation. Si quelqu'un considère que tel ou tel parti est xénophobe, qu'il dépose une plaine contre ce parti, pas contre ABP car nous ne publions pas de propos xénophobes tout simplement parce que c'est interdit par la loi et que ABP respecte les lois en vigueur.
En ce qui concerne le centrisme, et l'impression qu'on a pu donner, de favoriser Bayrou pendant la campagne des présidentielles ou le MoDem pendant les municipales, je pense effectivement qu'on n'a pas été assez impartial. Je ne suis pas au MoDem et ne le soutiens pas. Je ne suis adhérent à aucun parti politique. Je pense qu'un engagement de ce genre est incompatible avec la fonction de directeur de média ; c'est pour cette raison que j'ai quitté le Parti Breton. Les correspondants et journalistes qui contribuent à l'ABP ont bien sûr le droit d'avoir des opinions politiques mais faire partie en même temps du bureau de tel ou tel parti est incompatible avec la déontologie journalistique.
Nous essayerons de faire mieux la prochaine fois. C'est-à-dire pendant les régionales de 2010. Je suis un webmaster, devenu directeur de média, puis journaliste par la force des choses, je demande un minimum d'indulgence. Je n'ai d'ailleurs appris aucun de ces métiers sur les bancs de l'école ou de la fac. Le manque de professionnalisme de l'agence ne peut être imputé qu'à la faiblesses de nos ressources et de nos moyens.
Fanny Chauffin : Comment ce média est-il financé ?
P. A. - D'abord les coûts de fonctionnement sont très bas car il n'y a pas de salariés et pas de papier à imprimer. Avec le Webothon (apport financier d'internautes), chaque année au printemps , on arrive tant bien que mal à survivre en attendant des jours meilleurs. Un journal sur Internet est très difficile à autofinancer comme c'est le cas pour «Rue 89», «Mediaparts» ou «Agora Vox». La publicité ne marche pas, du moins elle est en pleine crise en ce moment. C'est même pire pour ABP, qui couvre un territoire encore plus petit : les 5 départements bretons. L'ABP n'est pas une association et ne bénéficie donc d'aucune subvention. C'est un site dont la structure et le statut de son directeur seront d'ailleurs définis par la prochaine loi dite «HADOPI» qui définit un statut de directeur de média internet.
Fanny Chauffin : Comment ça marche ?
P. A. - L'info arrive via 1.200 porte-paroles d'associations culturelles et environnementales en plus des partis politiques et quelques entreprises, basés sur tout le territoire breton et une dizaine de correspondants bénévoles qui envoient des infos en breton, français et anglais. Si nous avons un correspondant au Pays de Galles, il y en a bien trop peu en Bretagne car il en faudrait dans chaque ville ou chaque pays breton. Le site est facile à utiliser grâce à un système de publication perfectionné au fil des ans et de l'expérience. Il donne aux contributeurs un contrôle de A à Z de toute publication. Le site créé dans une optique web 2.0 dès le début, est réputé pour être lisible, rapide et très bien référencé sur Google - l'ABP est une des 500 sources d'actualité de Google France.
Afin de démocratiser les décisions éditoriales, ABP a désormais 3 collèges (en cours de construction) pesant le même poids dans les choix et les directions du média (les correspondants et journalistes, les donneurs lors des webothons, et les ou le propriétaire du site) .
Fanny Chauffin : Et vos projets pour la rentrée ?
P. A. - Cet été, je profite de l'accalmie de l'actualité et de la vie politique pour développer et fignoler le site. Je m'occupe de plus en plus d'ABP-TV.COM : je viens de refaire le téléchargeur de vidéos. ABP-TV se veut une web-tv citoyenne et attend donc vos vidéos d'actualités. Prochainement, nous allons aussi lancer une émission mensuelle, une sorte de « C dans l'air breton », malheureusement pas en live mais avec 4 invités et un animateur (Ronan Le Flécher). Une émission en breton est aussi prévue pour plus tard.
■Les procés d'intention qui vous sont faits sont dignes de gamins de cour d'école.
Kalon vat !
Longue vie à ABP !
Comme on dit «la critique est facile, l'art est difficile» !
D'autant que ceux qui vous critiquent jugent la liberté d'expression et l'information «à la française» c'est à dire normative et respectueuse de l'ordre moral en place.
A galon Vat evit Breizh
...mais alors, pourquoi avez-vous accepté qu'on ne puisse plus commenter les communiqués de l'UDB ??
Et que dire alors des colonisés mentalement dans l'espace temps !
De Lénine et Karl-Marx à Maigret en passant par Debauvais ! De la pensée unique à la pensée cyclique ……MDR.
Sinon, ABP doit grandir, devenir plus IMPORTANT en nombre de bretons, et non plus seulement en nombre d'emsavers ! nous avons tous quelques défauts ou cyber-défauts à associer au nom Philippe Argouarc'h, je pense que ses erreurs peuvent être largement mises de côtés partant du principe qu'il aura été le premier à porter ce type d'entreprise médiatique.
A gwir galon.
Les communiqués de l' UDB ne sont plus publiés par l'UDB mais par l'ABP (les communiqués sont dans le domaine public) , ce qui veut dire que l'UDB ne bénéficie pas de tous les services offerts par l'ABP. Pas que l'ABP y soit opposé mais que pour des raisons techniques trop longues a expliquer ici mais liées à la façon de fonctionner de l'ABP, il n'est pas pour le moment possible de donner a l'UDB des fonctions comme la gestion des commentaires, sans aussi lui donner le pouvoir, que ABP donne à tous les contributeurs, de retirer les communiqués en questions. Ce que l'UDB a fait plusieurs fois avant que je change le système. Nos amis de l'UDB peuvent résoudre rapidement ce problème en publiant eux-même leurs communiqués. Ca sera du travail en moins pour nous.
Ar Burev: Le Mee-Morice-Kaodan
Bravo à lui pour cet outil indispensable qu'est l'ABP, et dont il esquisse de possibles développements (y compris en breton) pour le futur.
La Bretagne manque cruellement d'un outil médiatique péninsulaire et régional (désolé pour Le Télégramme et Ouest-France!). Ce ne sont pas les Nantais qui me contrediront, je pense.
J'espère simplement que le champ proposé s'étendra un peu plus à l'économie, à la culture, à la société bretonne en générale: les petites guéguerres entre factions de l'Emsav ne doivent pas empêcher d'accéder à un panorama toujours plus vaste et équilibré de l'actualité bretonne.
Mersi braz da vPhilippe ha kalon vat dezhañ evit an dazont!