Volontés bretonnes

Communiqué de presse publié le 28/11/13 23:22 dans Politique par Gwenael Kaodan pour Gwenael Kaodan
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Les médias relatant le grand mouvement de contestation incarné par les Bonnets rouges (Ar Bonedoù ruz) se sont polarisés sur le refus qu'opposent les Bretons à l'écotaxe. C'est un peu court, et on ne tardera pas à s'en rendre compte. La mobilisation aussi soudaine que violente illustre, en vérité, une colère qui ne cesse de s'exacerber depuis plusieurs années : les Bretons rejettent de plus en plus un mode de gouvernance, d'une part ultra-centralisé, d'autre part totalement sourd à leur attente d'une véritable responsabilité régionale dans l'ordre de la gestion, de la culture, de la langue. Depuis des décennies, de nombreuses formations politiques bretonnes, n'appartenant pas, il est vrai, au système hexagonal, ont proposé une série de mesures concrètes, bien sûr dans le domaine économique, mais surtout dans le domaine institutionnel. Elles ont souligné l'impérieuse nécessité d'imaginer, face à l'explosion du numérique et de la mondialisation, une nouvelle organisation de l'État jacobin. Si nous nous trouvons dans la situation actuelle, n'est-ce pas précisément parce que le pouvoir - de droite ou de gauche confondus - a ignoré, avec superbe, ces revendications.

Pourtant François Hollande, dans son programme pré-électoral, avait promis une vigoureuse relance de la décentralisation, un message reçu avec beaucoup d'espoir en Bretagne. Or, ce qui devait être un des «grands chantiers» du quinquennat a fait chou blanc. Le droit à l'expérimentation régionale, assorti d'une montée en puissance de ce droit, a été tout bonnement enterré.

Dans ce contexte de profonde désillusion, il convient de rappeler les principales attentes bretonnes, lesquelles sont délibérément ignorées par l'establishment parisien et ses relais en Bretagne.

  • Aménagement de la fiscalité. Actuellement 46% seulement des recettes fiscales provenant des Bretons restent en Bretagne. Nous demandons que ce taux atteigne 60%. Il n'y a là rien ni de scandaleux ni d'impossible : c'est le niveau qu'on observe au Pays basque espagnol, l'Euzkadi. Sur ce même terrain fiscal, nous réclamons la gestion en direct des fonds européens, comme c'est le cas en Alsace.
  • Nous souhaitons que l'élection au Conseil régional se fasse pour les deux tiers dans le cadre de la région et pour un tiers dans le cadre des départements. C'est un moyen de faire disparaître, à terme, les départements. Une telle réforme irait également dans le sens d'une simplification du millefeuille administratif et d'un allègement des charges.
  • L'environnement (gestion de l'eau et du littoral, énergies alternatives) et l'éducation - avec l'intégration du cursus complet des langues de Bretagne et gestion des rythmes scolaires - doivent revenir à la Région.
  • La santé, épaulée par un organisme d'assurance-maladie, devra s'inspirer du régime alsacien qui est non déficitaire, faut-il le rappeler.
  • Il faut impérativement que s'établissent de nouveaux rapports avec la forteresse de Bercy, et il est indispensable de créer en Bretagne une direction budgétaire autonome, analogue à celle qui existe dans chaque Land allemand.
  • S'appuyer sur les réseaux et les compétences de la Diaspora bretonne dans le monde. La Fondation de Bretagne est un premier outil. Il faut aller plus loin : notre Diaspora doit être représentée au sein du Conseil régional par des élus.
  • Retour de la Loire-Atlantique chez elle, c'est-à-dire dans la Région Bretagne qui est son territoire géographique et historique aussi naturel que légitime. Au-delà de sa place éminente et incontournable dans le destin de la Bretagne, la Loire Atlantique représente 40% du potentiel économique breton. C'est pourquoi seule une Bretagne intégrale constitue un ensemble cohérent capable de défendre, au niveau européen, sa singularité et ses intérêts. De surcroît, comment se peut-il qu'un gouvernement dit socialiste ne remette pas en cause le découpage des Régions initié par le gouvernement de Vichy ? Au vrai, à gauche, beaucoup s'acharnent, à travers une phraséologie mensongère, à falsifier l'Histoire pour nier l'appartenance de la Loire-Atlantique à la Bretagne.
  • Enfin nous demandons au gouvernement Ayrault de ratifier la Charte européenne des langues minoritaires, ratification également réclamée par les Basques et les Corses. La France, si prompte à revendiquer son «exception culturelle», à célébrer le droit qu'ont les peuples de préserver et de promouvoir leurs langues, ne saurait que rejoindre les vingt-six autres États européens ayant déjà signé cette Charte.

On aura compris que la «question bretonne» ne sera pas résolue par de simples dotations financières baptisées «Pacte pour la Bretagne». Le problème n'est pas exclusivement économique, il est d'abord politique. D'autres régions en Europe, l'Écosse, le Pays de Galles, la Bavière, l'Archipel d'Aaland..., jouissent d'une réelle autonomie sans que les gouvernements centraux ne poussent des cris d'orfraie ou ne se sentent en péril. Paris le sait et tremble pourtant à l'idée d'amorcer une telle évolution. Quand le gouvernement se décidera-t-il à faire preuve d'audace et de courage ? Quand acceptera-t-il le projet ambitieux résumé par nos huit exigences ? Il ne s'agit plus de concocter, dans le huis clos des cabinets ministériels, un Pacte ou un énième Plan en faveur de la Bretagne. Il s'agit de mettre en place un processus de négociation entre, d'un côté, une délégation bretonne représentative de l'actuelle mobilisation sociale et, de l'autre, une délégation placée sous la responsabilité directe du Premier ministre.

C'est seulement à ce prix que la Bretagne et son peuple retrouveront le calme pour préparer avec confiance l'avenir.


Vos commentaires :
Paul Chérel
Vendredi 22 novembre 2024
Petite question : Etes-vous sûrs de ce que vous dites dans le paragraphe «aménagement de la fiscalité» ? Je crois avoir lu que tous les impôts en Espagne sont prélevés à la base et les régions autonomes '(generalitat) en Catalogne, en reversent une quote part à l'état central pour ses frais de gestion et autres missions régaliennes et je crois que cette quote part n'est que de l'ordre de 7 %. Merci pour l'enquête si vous en avez les moyens. Paul Chérel

eugène le tollec
Vendredi 22 novembre 2024
Paul,bonsoir,une loi de rétrocession financière permet d'ajuster les coefficients de retrocession à l'état fédéral...mais le chemin sera long pour arriver à ces résultats....et notre cheminement breton n'est pas encore à ses premières haltes significatives.

Jean LE MEE
Vendredi 22 novembre 2024
Fiscalité Basque: réponse à Paul CHEREL

En fait l'autonomie fiscale d'Euzkadi ( provinces basques du sud) atteint 90%. Les règles en ont été fixées en 1981 par le «Concerto economico» après de dures négociations entre le gouvernement de Madrid et le gouvernement basque. Paradoxalement c'est le gouvernement basque qui reverse à Madrid un certain pourcentage de ses recettes pour contribuer au fond espagnol de péréquation régional. Evidemment le système rend d'autant plus responsable la Communnauté autonome basque en période de crise. Les spécialistes s'accordent à dire que Euzkadi présente l'une des meilleures gestions financières en Europe.
Nos sources: EAJ-PNV .

Dr LE MEE Pt AFB-EKB


bernard guyader
Vendredi 22 novembre 2024
Bon dia ...petite rectification pour Paul Chérel ...La Catalogne ne perçoit pas l'impot à la base . Le Pays Basque OUI . Et c'est l'origine du référendum de septembre 2014. CDC i CU ont demandé à l'état central de revoir la perception de l'impot ; Devant le refus de ce dernier ... la machine en marche vers la consultation pour l'auto détermination s'est mise en marche . Seule l'obstination de la droite espagnole est fautive ... Les Catalans ont juste saisies l'occasion . Comme quoi « l'opportunité fait l'histoir » ... à Carhaix comme à Barcelone.B.G.

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