Le comité régional Bretagne de la Confédération générale du Travail (CGT) a annoncé le 30 octobre qu'il organisera, conjointement avec l'Union syndicale Solidaires et la Fédération syndicale unitaire (FSU) une manifestation à Carhaix-Plouguer, le 2 novembre, à 15 heures. Les directions de ces syndicats sont classées à l'extrême-gauche et sont connues pour être inféodées à la direction «nationale» à Paris selon le vieux principe du centralisme démocratique, un concept que l'on croyait pourtant mort et enterré avec le PCF. Leur théorie, que certains considèrent comme grotesque est un relent indigeste de la lutte des classes version 1917. Ils affirment que la crise de l'agroalimentaire breton est dû principalement a de mauvais investissements des patrons bretons, citant comme exemple les investissements de Doux au Brésil. Ben voyons. Beaucoup d'analystes politiques voient dans cette analyse de la CGT une réaction devant le conflit Bretagne-PARIS qui s'est substitué massivement à leur gagne-pain habituel, la dialectique patron-salarié. A noter aussi que si FO sera à Quimper, la CFDT ne manifestera pas. Ne pas être pour une fois le focus des médias nationaux est dur à digérer pour certaines organisations syndicales devenues des institutions sans véritables assises populaires et qui préfèrent les fermetures d'usine et les délocalisations à toute remise en cause des acquis sociaux ou modification du code du travail face à la mondialisation de l'économie.
Voici quelques perles du texte d'appel :
«[...]Les initiateurs de la manifestation du 2 novembre à Quimper ne portent pas les revendications des salariés.[...]»
«[...]Pour autant, les actions violentes surmédiatisées ne relèvent pas d'un mouvement social de salariés...[...] »
On a bien compris qu’il y avait deux sortes de violences pour la CGT, la violence «légitime» des salariés qui peuvent séquestrer les patrons, démolir ou faire sauter les machines ou même brûler des usines (c’est arrivé en Lorraine il ny’a pas si longtemps) et toutes les autres violences qui seraient des violences «fachistes». Ben voyons.
Plus loin, les syndicats signataires voient une utilisation des salariés à des fins politiciennes. «[...]Les bourreaux sont aux commandes de cette manœuvre et se servent de leurs victimes pour faire en même temps bouclier et bélier.[...] ».
On a bien compris : si c’est pas nous qui contrôlons le mouvement, c’est forcement les patrons ... Ben voyons !
Dans un autre communiqué, voir le PDF, la CGT approuve l'écotaxe : «Comme toutes les taxes, si elles sont injustes pour ceux qui y sont contraints, celle-là a le mérite de faire payer ceux qui polluent le plus et détériorent le plus les routes qui sont des biens collectifs.»
Comme ils ne voient pas plus loin que le bout de leur nez et les leurs intérêts à courts termes, la CGT et autres signataires n’ont pas encore compris que c’est tous les Bretons y compris les salariés qui dans quelques années paieront, grâce aux portiques, un péage sur les 4 voies comme le font tous les Français dans le reste de l’hexagone pour les autoroutes.
Cette tentative de concurrencer la manifestation de Quimper qui s'annonce de grande ampleur (des cars sont affrétés un peu partout) est inédite et inattendue. Elle marque bien qu'il se passe des événements tout à fait particuliers en Bretagne. Le gouvernement socialiste ayant réussi à faire ce que personne n'avait réussi à faire depuis le CELIB, l'unité des Bretons contre les abus du centralisme parisien.
Dans le Monde daté du 31 octobre, Laurent Davezies, chercheur qui préconise la métropolisation et l'abandon des territoires qui coûtent trop cher, commente la situation bretonne et atttaque la décentralisation qui favoriserait «le populisme territorial». Il va jusqu'à écrire que «la capacité de réaction des Bretons est évidente : ils ont toujours été des pilotes en pratique de mobilisation collective en faveur du développement local. Par ailleurs, ils ont toujours eu des vrais problèmes de relation avec Paris et ont toujours négocié brutalement.»
«Populistes, brutaux et bourreaux», le débat politique semble très vivant, dès qu'il s'agit de parler de ce dont a peur.
Les organisations syndicales n'ont-elles pas peur de rendre plus voyant, ce que tout le monde sait sur leur perte inéluctable d'influence ? Rappelons que le sondage IFOP-Ouest-France du 26 octobre donne 74% des Bretons contre l'écotaxe (plus de 80% dans le Finistère et le Morbihan) et que si 85 % des Bretons n’ont plus confiance dans le gouvernement, ils sont 65 % à ne pas avoir confiance dans les syndicats.
■En fait, les syndicats connaissent les mêmes clivages internes que les partis politiques : opposition entre militants de base et responsables locaux aux ordres.
Un mot quand même sur l'UDB qui nous explique avoir été parfaitement à sa place au milieu des bonnets rouges car ils seraient tous à gauche (voir le communiqué des jeunes de l'UDB) ! Ce genre de discours au sein de l'Emsav où les partis ne se déterminent qu'en fonction de ce clivage si français et tendent la main à leurs compatriotes en fonction de leur gauchisme ou de leur «droitisme» est totalement dépassé sauf à vouloir être les idiots utiles de l'Etat français et ne souhaiter en réalité que rien ne bouge vraiment !