J'avais 6 ans, en vacances avec mes parents, c'était l'été et nous nous promenions sur l'Ile aux Moines. Un père parle en breton à sa fille et c'est alors que je nais véritablement au monde. La musique de cette langue s'est logée dans mon coeur comme la flèche du Dieu, réveillant au fond de mon âme un chant d'Amour pour Breizh.
Physiquement, je suis née à Paris. Qu'à cela ne tienne, l'âge venu, j'ai eu tôt fait de confier au tatoueur mon enveloppe qu'il fallait celtiser. Quelques symboles encrés plus tard, une fois le corps au diapason de l'âme, la Fontaine sacrée pouvait bouillonner en moi comme au centre d'une clairière enfin sanctifiée.
J'aime Paris et j'y vis bien volontiers. J'y ai appris le breton comme on joue à cache-cache. La perte de vue, les retrouvailles au détour d'une bibliothèque, la fille prodigue de Breizh s'abandonnant cycliquement entre les pages d'une grammaire comme au creux de bras aimants retrouvés.
Skol Diwan Pariz : 3 mots pour ma première interface parisienne durable avec la langue bretonne. Que dire aujourd'hui de cette belle aventure sans ranimer de belliqueuses passions... Il nous faut regarder ces 10 années d'existence comme un cycle abouti, avec sa phase ascendante et son inévitable déclin. Oui, inévitable, car le sang d'une école Diwan est le breton, parlé et écrit à tous les étages, et notre anémie chronique nous a conduits à l'épuisement généralisé. Je n'ai aucune amertume, chacun a donné et a reçu sur ce terrain d'entraînement militant miné par les affects. Dans l'histoire de ce naufrage, nous sommes tous survivants, aucun noyé, tous nous avons regagné la rive et continué notre vie à Paris ou en Bretagne.
Etre un «Ancien de Diwan Pariz», c'est avoir mouillé le maillot marin, c'est avoir trempé son CV breton à la sueur et aux émotions vives.
Et maintenant...
Que faire à Paris lorsque l'on est comme moi «Brezhonez penn kil ha troad»...
J'ai donné des cours à la Mission bretonne, «Ti ar Vretoned». Pendant un an. J'ai été déçu par les Bretons de Bretagne, une pâle lueur de Breizh dans les yeux, pas assez brillante pour voir au-delà des vieux systèmes de pensée. J'y ai vu du mental englué dans la pâtée franco-française.
J'ai donc décidé de mettre un vent différent dans mes voiles, un vent frais, païen, «brezhon evit gwir».
Après avoir vécu, crabe parmi les crabes, dans ce vaste panier qu'est la communauté des «Bretons de Paris», j'ai eu cet élan de santé celte qui m'a soustraite à la nasse du folklore et du passéisme.
Oui, l'esprit «brezhon» souffle à Paris, il m'a portée jusqu'à «Kêrvreizh», lieu étrange et chargé au coeur de Montparnasse, entre cimetière et club échangiste... Pour Eros et Thanatos, c'est une piste de danse, le lieu d'un ballet sacré encore balbutiant mais combien prometteur pour fertiliser l'Emsav à Paris dans la grande Tradition païenne ! Tout y est encore à faire et cela est merveilleux. Une terre sauvage baignée de soufre et de sel, au goût de lande et d'aventure, électrisée par des années de foudres politiques et de fulgurances créatrices. Le génie celte réclame pour Paris ce lieu des possibles protégé par les Dieux... J'y ai, quant à moi, planté «ma tête, mon c... et mes pieds» («penn kil ha troad») pour cultiver la terre de Breizh là où elle se trouve, Awen !
■« J’encadrais (dans une deuxième vie, ou troisième) un groupe, une équipe de handicapés travaillant dans un établissement de ce que l’on nommait alors C.A.T (Centre d'Aide par le Travail). Ce jour là nous nous trouvions, depuis plusieurs jours déjà, dans un terrain embroussaillé de l’abandon des lieux secondaires, très embroussaillé, qui ne méritait certes pas le titre de « jardin ».S'y trouvait une superbe maison de pierres de tailles dorées, ensoleillées, une résidence ou maison dite « de vacance ». Elle-même très souvent vacante, inhabitée au moins les dix ou douzièmes de l’année, elle sommeillait au dessus du fouillis ».
« Ce jour-là de fin de printemps ou début d’été, arrivant sur les lieux, au milieu des massifs ébouriffés restant, un chapeau de paille de style provençal à larges bords de couleur carmin, émergeait. Nous nous approchâmes et vîmes alors, venue plus tôt que prévu, une dame d’un certain âge et de toute évidence absolument certain. Gantée haut du Point ou Gamm Vert, et faucille légère en sa main »
« Avant d’avoir eu, moi-même, le temps de proférer un seul mot elle se releva, éreintée, et me dit avec un accent…différent du mien : « Magnifique journée pour revenir à Plozevet ! Et quel plaisir, quelle émotion de retrouver les gestes ancestraux. » Le Breton, militant dilettante et occasionnel que je fus, et suis encore plus occasionnellement, à ces mots un peu bizarres, la regarda, et dit seulement : oui je m’en doute ! Mais pensais en mon fort intérieur : « Tant ailleurs, n’est-ce pas,vous avez soupiré, voulu je ne sais quoi, et avez eu à pleurer sur le sort fait à la Bretagne, et peut-être moins peut-être sur celui des Bretons restés au pays ! Ainsi accoutrée et de quelques de serpe vous voilà donc à nouveau d'ici !»
Mais madame Alice « de Tertrais », rassurez-vous je me suis repris rapidement, et toujours de ce fort inexpugnable et tellement intérieur, je sentis monter une fois de plus la question, pas nouvelle, qui était de savoir de quelle utilité pouvais avoir pour le combat breton, toujours savamment indéterminé, jamais formulé, car l’absence ou le flou nous va si bien, oui pourquoi reste t’il ce siècle après d'autres siècles, aussi fantasmatique, donc stérile à jamais. Pour l’instant, mais qu’est ce qu’il dure…
Me demande aussi de l’intérêt offensif sur divers plans, des diasporas mythifiées en dehors de la « judaïque » qui est pour moi une, et sans doute la seule absolue réussite qui peut toujours être discutée et matière il y a ! Qui doit sans doute beaucoup à l’holocauste et surtout à notre sous-dimension de mollusques européens qui l’a générée et permise ! Et puisque sous-dimension de notre part, et de la vôtre il y a, vous la diaspora bretonne qui n’attendrait qu’une réaction, une révolte quelconque du pays, qui ne vient pas et qui vous autorise spectateur attentiste le mépris pour l’indigène breton, que vaut donc pour la Bretagne, votre ode à Paris ???
L’histoire se constate, qu’à Paris l’on ne sert que Paris…et la France, forme païenne ou pas, fantasmatique ou pas. Les Bretons de Paris rêvent de Bretagne, de Breizh, de Tabarly, de Kersauzon parlent de marins quand il ne s’agit plus que de « coureurs éolonautiques » pour qui bien souvent le sextant est inutilisable, de tours du monde, d’océans de crêpes et de crustacés mais ne servent toujours que PARIS et la France au détriment des Bretons, de la Bretagne ou de BREIZH !!! Les officines bretonnes entre «cimetière et club échangiste» de Paris bénéficiant des impôt du petit peuple breton à qui les Le Pleven ou Le Drian et leurs ombres, n'ont jamais pensé demander l'avis
Certains, qui encore s’intronisent missionnaires, se permettent tout lorsqu’ils s’offrent une escapade dans la Terra Incognita de la langue des racines fantasmées…
Dans votre ode, j’ai compté dix occurrences à Paris, dont deux sous la forme bretonnisée. J’ai noté (sauf erreur de ma part) deux petites allusions utilisant le nom Bretagne et deux autres sous la forme bretonnisée Breizh, plus dynamique sans doute?.
Non Alice votre pays des merveilles, que vous le vouliez ou non, c’est bien PARIS, ça sens l’essence, le charabia et le bruit du métro aèrien et tout le reste !!!... Pas l’iode des mers, ni la vision de la Croix du Sud et c’est un vieux marin qui vous le dit, qui lui a quinze ans, faisait « les » tours d’un Monde dès ses quinze ans, en 1958. Il vous faudra bien plus de lames et d’embruns pour mouiller votre tricot rayé Armor-Lux…Je suis encore ce petit mousse qui a appris ce que beaucoup s’inventent, emportés,dématérialisés par la langue fourchue de Molière…qui est peut-être davantage de Racine d’ailleurs !
Si la notion de désert français à pris place dans des esprits, et les analyses même de Français, c’est que la réalité était bien indiscutable ! Non ?
Et regardez l’hexagone aujourd’hui cette vierge qui passe les dernière décennies de son Histoire à se recoudre l’hymen…
Et puis il y a ceux qui « Bretons », depuis le début du vingtième siècle en Bretagne «gèrent» la petite part octroyée par Paris de nos propres impôts, ou théorisent des options politiques pensées ailleurs et toujours lettres mortes pour de multiples raisons. N’enrayant, pas le moins du monde, la marche inexorable de la Bretagne vers sa dilution finale dans la déliquescence française.
Par quels chemins, quelles universités, quelles écoles de journalisme, de commerce, d'administration, par quels cours de théâtre ou dans quels cabarets et émissions de tv sont-ils allés se créer un avenir? Où ont-ils été formatés? Plutôt que de se battre pour et en Bretagne! Encore s’ils n’avaient pas perdu, ou pire rejeté le fil culturel de leurs parents et avoir fait le choix de se servir de leurs expériences acquises ailleurs pour un nouveau destin à imaginer et réaliser pour et en Bretagne et l’exiger à et de Paris ! Bretons, pour beaucoup, de circonstances et d’intérêts et de nostalgies, sur le tard bien souvent !
Mais non, quand ils reviennent ou passent par là, c’est avec les bagages, les gestes les paroles et les yeux de parisiens … Bretoned da viken ???
Par contre c’est, d’après ma perception et interprétation, plus précisément sur votre utilisation des deux mots : « recroquevillés » et l’expression « nette avance » de Paris que j’ai réagi. Sans aller plus loin, tels quels ils me donnent la nette impression d’un état négatif, voire pathologique des Bretons autochtones dans leur ensemble pour ce qui concerne « recroquevillés » ! Pour ce qui concerne « nette avance », l'expression à contrario me donne une image très positive, de gagnant pour Paris ! Avé Lutèce ceux qui vont mourir te saluent !
Comme si la Bretagne (les Bretons) sur la ligne de départ étaient depuis toujours à égalité de moyens et de chances avec Paris cannibale ! Comme si toutes les chances et atouts de la Bretagne n’avaient pas été sabotés, éliminés, assujettis aux projets parisiens, comme si tous les moyens _ou presque_ n’avaient pas été utilisés pour y parvenir ! C’est une course avec handicap, uniquement pour les Bretons. Le handicap et les règles contraignantes, mais libres pour Paris. Bien des Bretons n’ont pas été les moindres à s’y associer au long des siècles…
Les Bretons de Paris.
« Les » Ker Vreizh ? Je n’ai pas relevé l’allusion d’Alice à ce sujet, à ce lieu inconnu de moi. Mais puisque vous le faites, et en utilisant une fois de plus les éléments donnés dans ce livre incontournable « Debout Bretagne » de M.Phlipponneau (1970), combien de Bretons savaient et savent qu’un projet étant une des dernières initiatives du CELIB, en1966-67 a été, à cette époque la création du Centre « Élysées-Bretagne » ? Financée par les collectivités locales (bretonnes)! Création présentée comme une ambassade prestigieuse de la Bretagne à Paris? Qui « …devient un haut lieu du Tout-Paris… ». Qui « … malgré certaines difficultés financières paraît avoir été largement bénéficiaire pour son promoteur. » (Martray ?)
Est-cela qui est devenu les Ker Vreizh ?
Ce bidule inconnu des cochons de payants bretons, qui « …a été inauguré en grande pompe par M.Pompidou entouré de six ministres… » . Est-ce cette Maison de Bretagne si chère aujourd’hui au PS? Et à ce Tout Paris…breton?
Michel Phliponneau nous en dit tant, qu’il faudrait ici transcrire les quatre cinquièmes de son livre « Debout Bretagne ». Lu aujourd’hui il démontrerait que dans un monde plus vieux de de 50 ans, les mêmes carences, les mêmes décisions et décideurs politiques des mêmes familles politique sévissant en Bretagne, produisent les mêmes effets qui existaient déjà voilà un demi siècle et depuis toujours dans la triste Histoire entre Bretagne et ce qui n’aurait jamais été hexagonal sans elle.. Á « Debout Bretagne », j’ajouterai « L’homme aux semelles de vent » de Michel Le Bris » de 1977 (40 ans aussi).
Après des siècles il en va toujours ainsi ! Une régionalisation assassine pour les Bretons et autre «provinciaux»! L’aménagement du Gross Pariss, les Jeux Olympiques à Paris etc…projets qui ne tiennent jamais compte des régions de France que pour financer la mégalomanie, l’affairisme et le colonialisme parisien. Comme vous le dites : « …tout le monde le sait… ». En êtes-vous si sûr ? Et parmi ceux qui le savent combien, en Bretagne y participent ? Ou en ont profité ? J’aimerai connaître ceux de qui Alice nous dit : « Après avoir vécu, crabe parmi les crabes, dans ce vaste panier qu'est la communauté des Bretons de Paris, j'ai eu cet élan de santé celte qui m'a soustraite à la nasse du folklore et du passéisme», ou encore : « J'ai été déçu par les Bretons de Bretagne, une pâle lueur de Breizh dans les yeux, pas assez brillante pour voir au-delà des vieux systèmes de pensée. J'y ai vu du mental englué dans la pâtée franco-française ». Discussions déjà très nombreuses, importantes et conflictuelles entre sur les sujets «folklore et passéisme» donc...Inutile d'en remettre une couche!
Je ne peux que partager (globalement) ce que je répète depuis des décennies !
Tous ces Bretons (ou pas) où ne luit aucune lueur de Breizh dans des prunelles de poissons morts, ils ont pourtant bien des raisons pour fréquenter (utiliser) les Ker Vreizh avec ou sans H…Non ?
Louis XI ? : Le pouvoir parisien et sa politique ! Plessis-Les-Tours ? : La péninsule où les encagés sont recroquevillés (les Bretons)? Une simple image… sur notre condition
La poésie j’aime assez, je m'en sers très maladroitement à des fins ironiques, mais avec les romans de Bretagne (même en répétant que l’indépendance est dans le fil de l’Histoire), ce n’est d’aucune utilité majeure pour changer les choses. Cela dit au vu de leurs effets inexistants sur les pouvoirs parisiens et notre Histoire !