Comme s'il n'y avait pas eu assez de sous-marins sur les lieux du naufrage du Bugaled Breizh, dont certains seulement à quelques miles nautiques du lieu de la tragédie, un nouveau rapport de l'expert sous-marinier Dominique Salles a été remis aujourd'hui à la Chambre d'instruction de Rennes introduisant une nouvelle hypothèse.
Un sous-marin nucléaire d'attaque américain aurait été présent le 15 janvier 2004 pour surveiller et évaluer la protection d'un déchargement de déchets nucléaires américains à Cherbourg. Une hypothèse comme une autre, mais qui fait figure de fausse piste pour certains, quand on sait l'ampleur des manoeuvres marines et sous-marines internationales qui se déroulaient au moment du naufrage.
On se souviendra que les autorités avaient mené tous les médias «en bateau» avec la fausse piste du cargo Seattle Trader, un vraquier philippin que la police maritime poursuivit jusqu'en Chine. La piste de la collision avec un cargo, annoncée très vite quelques heures seulement après le naufrage, par un chasseur de mines de la Marine nationale, fut suivie par la justice jusqu'en novembre 2004 (10 mois après le naufrage du chalutier breton) alors que, dès le repêchage de l'épave, même sans avoir fait polytechnique, tout le monde avait compris ce qui s'était passé. Le chalutier avait été violemment et rapidement tiré par le fond et avait implosé. L'étirement de 140 m d'un des câbles du chalut et les traces de peintures au titane sur le câble, pointaient du doigt un sous-marin. Des preuves difficiles à dissimuler ou à nier. Malgré tout, la ministre de la Défense Michèle Alliot-Marie avait indiqué à l'Assemblée Nationale, lors d'une «question au gouvernement», posée par la députée du Finistère Hélène Tanguy, en mai 2005, que les éléments d'information en sa possession ne lui permettent pas « de suspecter un sous-marin d'être à l'origine du naufrage ».
En 2006, nouvelle thèse ou plutôt conclusion hâtive. La BEA (Bureau d'enquêtes sur les événements de mer), un soit disant «service public» que les anglo-saxons appelleraient simplement une «agence gouvernementale», affirme que des chaînes du chalutier ont accroché des fonds sablonneux et exclut la thèse de l'accrochage avec un sous-marin. Cette thèse ou plutôt cette fausse piste sera démolie un an plus tard par les scientifiques d'IFREMER.
L'autisme de l'État et de la justice dans cette affaire, certains diront «sa mauvaise foi», ne peuvent que discréditer toutes nouvelles hypothèses. Les Bretons et spécialement les familles des victimes, ont tellement été menées «en bateau» tout le long de cette tragédie, que toute nouvelle piste devient suspecte.
Philippe Argouarch
■