Comme une fluorescente enseigne en forme d’une rougeoyante et incandescente silhouette de sanglier, flanquée de celtiques spires, voici la graphique identité qui pare le nouvel album de DORCHA COBS.
Simplement, surmonté du nom de la formation, sous ce symbole bien édifiant, en symétrie horizontale, est, tout sobrement transcris, le titre de ce nouvel opus… « Torc Montain » !
Eclairons le sujet qui peut, encore, à vos yeux, rester, quelque peu énigmatique.
Le mot irlandais « Torc » signifie… sanglier, animal magique et sacré pour les Celtes.
Dans le Sud-Ouest de l'Irlande, plus précisément, dans le Comté de Kerry, « Torc Mountain » se dresse dans le massif Mangerton, au sud de Killarney, surplombant les « Killarney lakes » et « The Black Valley ».
Nous y sommes ! Le programme sera d’inspiration celtique, plus précisément, irlandaise, nous dirons, folk-rock Irish.
DORCHA COBS, c'est, en son épicentre, un duo nourri par la fusion de deux styles musicaux bien différents :
Le rock « pur jus » du chanteur et guitariste nord-Irlandais Topher LOUDON, auteur, interprète, guitariste, venu de Belfast, en Ulster, posé en Bretagne, depuis plus de 35 ans, où il a créé son studio d’enregistrement, à Plouharnel.
Ecumant, depuis, les scènes européennes, comme, The Ulster Hall, Harp Bar Belfast, Les Transmusicales de Rennes, Le Printemps de Bourges, Art Rock, les Eurockéennes de Belfort...), il a, notamment, collaboré avec DyE ou The CHURCHFITTERS, ces derniers avec lesquels, en 8 ans et demi, il a enregistré quatre albums.
et
Le répertoire celtique du morbihannais Anthony MASSELIN, compositeur, sonneur de cornemuse, passé par plusieurs bagadoù dont VANNES et LANN BIHOUE et qui a partagé quelques scènes et enregistrements avec Alan STIVELL, TRI YANN, Dan AR BRAZ…
Grand voyageur mêlant les cultures du monde à sa musique. Il est, également, membre de l'OCCIDENTALE DE FANFARE, SOLDAT LOUIS et, dernièrement, du collectif B.R.E.T.O.N.S. (Voir chronique) .
Si c’est en duo, récemment créé en 2021, que ces deux artistes ont publié leur premier disque, fort judicieusement, intitulé « First », cette fois, Topher, chant lead, guitares et chœurs et Anthony, chœurs, uilleann pipes et whistles, ont réuni, autour de leur fondateur duo, une solide équipe de musiciens bretons.
C’est ainsi que, dans l’ordre de présentation du livret, nous retrouvons :
- Olivier ACHARD, à la basse et aux chœurs,
- Hervé BATTEUX, à la batterie et aux chœurs,
- Ronan ROUXEL, aux, violon, violoncelle, mandoline, chœurs et arrangements.
Nous avions, pour quelques titres, entendu ce musicien, au cœur du disque de GWENYNN, titré « Immram » (Notre chronique) .
Ce solide et talentueux quintet est rejoint, conjointement ou individuellement, pour quelques titres, par :
- Freddy BOURGEOIS (Tri Yann), Rhodes, piano, orgue,
- Anne COLAS, à la flûte traversière,
- Serge DANET (SOLDAT LOUIS), à la guitare,
- Jessica DELOT (KERVEGANS - Voir chronique , B.R.E.T.O.N.S. - Voir chronique ) , violon et chœurs,
- Christophe LOHEAC, guitare, pedal steel,
- Emma LOUDON, chœurs,
- Gwyneth MUDROCK, voix
- Denis BARTHE (ex-NOIR DESIR, The Hyènes), à la batterie,
- Brick BRISCOE, pour l’annonce radio américaine de la plage 2.
Evoluant, notamment, entre uillean pipes et accords de guitare, l’album « Torc Mountain » est décliné en 12 titres, dont un texte dit sur un thème musical et 1 instrumental à part entière, soit plus de 46 minutes d’un irlandais voyage vocal, rythmique et mélodique.
Dès les sept toutes premières notes, le ton est donné, par un collégial, interpellant, tonitruant, « la la la la la la la » introduisant « Welcome to Uranus »… comme un signe de bienvenue sur la septième planète, à partir du Soleil.
D’entrée toutes les colorations et rythmiques irlandaises chatoient nos oreilles et l’on remarque, immédiatement, la chaude, puissante, mélodique qualité vocale de Topher.
Ce chant d’ouverture virevoltant porte un texte écrit par le chanteur qui prône le respect que l’on doit avoir pour chacun de nos semblables, notamment, en prenant bien garde de le blesser, sans raison.
Sur des riffs acérés de guitare électrique, mixés avec une annonce radiophonique américaine, « Only greed », propose une sonorité, plus réverbérée, plus rock, avec un chant,malgré tout, toujours aussi mélodieux et sacrément véloce, au cours de ce rythme trépidant.
A noter la très belle ligne de guitare, enrobée de violon.
Un regard urbain, souvent détourné par son propre et égoïste intérêt.
« One man he’s counting out the notes,
One man he’s got no Where to go,
Standing there he’s got nothing left to eat,
Standing on the corner looking at the restaurant,
From the other side of the street ».
[…/…]
Nous avons évoqué la voix de Topher, les « rockailleuses » envolées de guitare électrique, le violon de Ronan ROUXEL n’est pas en reste, notamment, lorsque, dans « Traveller », il s’enroule autour du chant lead de « l’irlando-breton » Plouharnelais qui chante le voyage, autant géographique qu’intérieur : « Et je n'ai pas peur de découvrir ce que je suis. Je suis un voyageur et je voyage ».
« Ive got hate for violence greed for knowledge envy for those who have patience
I never ask myself what they ask me Ive asked myself a thousand times already
And Im not afraid to find out what Iam Im a traveller and Im travelling ».
[…/…]
Suit, en piste 4, un très marqué et dansant « Letter to shaun », assorti d’un quasi-a cappella, chant lead et chœurs.
Nous ne ferons pas transiter nos propos par tous les titres chantés, en anglais (vous ne trouverez pas de breton), d’autant, qu’avec surprenant humour, les musiciens ont prévu, en piste 5, une insolite pause cuisine en déclinant, la fameuse recette du Coq au vin de… Pierre PERRET.
C’est Denis BARTHE qui, en français, cette fois, et sur « lie de guitare électro acoustique et de violon », nous dévoile les ingrédients indispensables à la satisfaction gastronomique de 6 personnes, sans doute, les 5 musiciens et le narrateur.
C’est surprenant, certes, au cœur de cette grande « ballade irlandaise », de trouver une recette du coq au vin de Chantenay, vue par le chanteur-poète.
Mais nous pouvons, néanmoins, y trouver un lien, puisque Pierre PERRET est un amoureux de l'Irlande, où, perchée sur la pointe la plus avancée du Connemara, à Clifden, il possède, depuis des années, une maison.
En tous cas, cette séquence culinaire se présente, musicalement, comme une belle suite de deux morceaux, une ballade et un reel irlandais, seconde partie festive où il est question, in fine, de flamber le coq… à l’Armagnac… non, au Cognac, peut-être au Sancerre, pourquoi pas au rhum… ça devient délirant !
A mi-parcours du programme, dans un registre, ô combien, différent, nous avons, particulièrement, apprécié « Melinerion’s Lament » et « The time we’re allowed », deux titres, enchaînés sur l’enregistrement, sans rupture de plage.
Instrumental et chanson dédiés à la mémoire de Richard et de Mark LOUDON, respectivement, père et frère de Topher.
La première et poignante pièce est baignée de la mélancolie de l’uillean Pipe d’Anthony, rejoint par les enjôleurs violons de Jessica DELOT et Ronan ROUXEL. Magnifiques instants.
La chanson qui suit, certes plus rythmée, demeure, par la voix de Topher, celle des chœurs, et, cette fois, les magnifiques langueurs du violon de Ronan, tout aussi, pénétrante.
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« The winners aren't the only ones to climb the stairs
We’ve all got a place up there somewhere so. »
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Très judicieuse idée d’avoir enchainé ces deux morceaux qui se nourrissent l’un de l’autre.
Bien sûr, nous aurions pu vous parler, plus longuement de :
- Gwyneth MUDROCK qui, après une très mélodique et cyclique introduction au whistle, suivie d’une ambiance, nettement plus « hard-rock Irish », récite un poème écrit en 1932 par Clare HARNER et titré « Les oiseaux » et pour lequel, nous aurions souhaité un mixage plus « lisible » pour la mise en valeur du ténébreux texte (Mais il y a le livret !).
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« And I leave weightless as light
My feet no-1onger mark this ground
When the door is finally closed
No words will be needed ».
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- des très gracieuses envolées de whistle qui, dans « Ragnar’s Conquest », s’opposent à un actuel contenu textuel qui l’est bien moins.
« There are wars being fought just to try out the new gear
you can check it out on intrenet but may be its a fake
And as you try to figure this another story breaks and another crisis hits you in the face »
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- du virevoltant violon de Ronan ROUXEL qui porte, dans « Cetlic Song », un chant enjoué d’espérance, de résilience, dirait-on, par ces temps, pour le moins, par euphémisme… tourmentés.
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Well inside me there is everything I need
All of the dreams and the reality
Inside you I know you have it too
All you have to do is whisper what you choose .
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- De l’ultime morceau, « The weight of our bones », introduit par l’uilleann pipe d’Anthony et le violon de Ronan, qui, au-delà de la déchirure, transparaissant du chant haut et acidulé de Topher, semble, néanmoins, prolonger l’espérance émanant du morceau précédent.
Les claviers et l’orgue de Freddy BOURGEOIS, tiennent, au cœur de cette pièce, une place de choix et les chœurs, au sein desquels figure Emma LOUDON, donnent un caractère, parfois gospel, à la composition. Comme un envoi final !
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But now I see a shining light like a selfless hope
That one day this light will shine in you
And we’ve been told so we already know all thats left is the weight of our bones.
The weight of our bones ill hold us all together
The weight of our bones the weight of our bones .
Enregistré et mixé, avec soin, dans les Landes, à Sore, au studio SHAYNINI (ex-Noir Désir, The Hyènes - Cf Denis BARTHE), par Ludovic PALABAUD, avec des enregistrements additionnels réalisés, par Yann TOURNAY, à Saint-Nazaire (44-Bzh), au studio associatif OHM (Voir site) , nous vous conseillons, sans aucune retenue, l’achat de cet opus aux couleurs indéniablement, irlandaises, où le Folk Rock Irish laisse, parfois, filtrer d’infimes colorations world, métal, blues…
Même si les textes, tous présents dans le livret joint au CD, mettent en évidence bien des ombres existentielles ou quelques introspectives réflexions, voire, notamment pour les évocations mémorielles, quelques mélancolies, le climat musical reste, particulièrement, lumineux.
L’association Topher LOUDON et Anthony MASSELIN fonctionne très bien et, bien que souvent très rock, la belle et mélodique voix de « l’irlandais-breton », s’accorde très bien avec l’agile uilleann pipe et les spires celtiques de Whistle, du « sonneur de SOLDAT LOUIS ».
« DORCHA COBS, c’est, au départ, un duo et la fusion de deux styles musicaux, bien différents », précise le communiqué de presse.
Certes, mais, passant par un quintet bâti de remarquables et référents musiciens, lorsque l’alliage est, comme pour « Torc Mountain », aussi peaufiné, émollient, apparait, alors, entre néo-celtique et rock, un solide et spécifique style à part entière… celui de DORCHA COBS !
Gérard SIMON
Illustration sonore de la page : DORCHA COBS - «Torc Mountain» - Extrait de «Welcome to Uranus» - (01:06).
D'autres extraits sonores sur Culture et celtie, l'e-MAGazine (Voir site)
La page de DORCHA COBS : C'est ICI .
Les titres du CD «Torc Mountain» de DORCHA COBS
01 - Welcome to Uranus - 03:58.
02 - Only Greed - 04:03.
03 - Traveller - 03:28.
04 - Letter to Shaun - 03:13.
05 - Coq au vin - 04:19.
06 - Sub Rosa - 04:02.
07 - Milinerion's Lament - 02:45.
08 - The time we're allowed - 05:20.
09 - Les oiseaux - 03:01.
10 - Ragnar's Conquest - 03:40.
11 - Celtic Song - 04:00.
12 - The weight of our bones - 04:25.
CD «Torc Mountain» de DORCHA COBS.
Parution : mai 2023.
Réf : 5112869.
Production : AZTEC Musique (Voir site)
Distribution : Coop Breizh - (Voir site)
© Culture et Celtie
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