Trophée Jules Verne : La parole aux hommes, arrivés en triomphe à Lorient. Certains interviewés à Brest.
Communiqué de 19 h le dimanche 8 janvier 2012
24 heures après l'accueil triomphal reçu à Brest pour avoir remporté le Trophée Jules Verne, Loïck Peyron et l'équipage du Maxi Banque Populaire V ont repris la mer. Ainsi, après les festivités et une première nuit dans un vrai lit depuis un mois et demi, les marins de la Banque de la Voile ont quitté la marina du Château ce dimanche matin et mis le cap sur Lorient leur port d'attache.
Arrivés à la base des sous-marins de Keroman en début de soirée, grâce à l'accueil de Cap Lorient et de la Cité de la Voile Éric Tabarly, portés par la ferveur des Lorientais qui apportent au trimaran géant un soutien indéfectible depuis sa mise à l'eau en août 2008, les quatorze marins et toute l'équipe technique vont pouvoir continuer à fêter ce record autour du monde et ces 45 jours 13 heures 42 minutes 53 secondes qui resteront dans l'histoire.
Une autre façon de boucler la boucle avant le marathon parisien qui s'annonce pour la semaine à venir, et l'occasion pour les nouveaux lauréats du Trophée de revenir sur les temps forts de leur si belle aventure.
« L'arrivée à Brest hier était un grand moment. C'était incroyable de voir autant de monde motivé, un samedi matin, en hiver, dans la rade. On a tous été surpris par l'engouement que ça a provoqué. Le passage de la ligne, la remontée du Four sont des endroits où je passe une quinzaine de fois par an, alors le fait d'y entrer avec ce bateau-là et d'en ressortir aussi vite quand d'habitude j'y passe quelques heures c'est hallucinant. De la même façon, la dernière journée et le fait d'être à midi au Fastnet et le soir à Ouessant m'ont aussi rappelé que ça faisait 45 jours que je naviguais sur une bombe, sur un bateau incroyable. Quand on est milieu de l'eau et qu'on fait des journées de 700 milles on s'habitue presque et quand on en fait une de 400, on est presque un peu déçu.
Le fait d'avoir eu hier la côte prês de nous et des repères précis nous a permis de prendre encore plus la mesure de la vitesse de ce bateau là. De plus, pratiquer beaucoup de solitaire m'a mis en évidence le fait que l'équipage est un exercice qui enrichit énormément, à la fois sur le plan technique et sur le plan humain. Cette aventure permet d'avancer en tant que marin et en tant qu'homme ».
« Il y a une réelle satisfaction à arriver. Cela fait trois ans que je suis au sein du “Team Banque Populaire” sur ce bateau et un peu plus d'un an que je suis “boat captain”. Mon rôle à bord est de faire en sorte que le bateau soit prêt techniquement quand on prend la mer et c'est vrai que c'était ma principale inquiétude quand j'ai pris le départ, mis à part le fait que je n'avais jamais fait de tour du monde. Le parcours a forcément été différent dans la longueur par rapport à ce que j'avais vécu, pas dans la dureté. Ce n'est pas le plus dur que j'ai fait en navigation par contre j'ai pris énormément de plaisir parce qu'on arrive dans un projet comme celui-ci, à quatorze, à avoir vraiment des moments où on se repose, où on décompresse, où on peut franchement dormir. C'était très agréable sur ce bateau, avec en plus une ambiance exceptionnelle. Loïck a vraiment su donner un climat et un ton particulièrement agréables ».
« 45 jours de bonheur tout court, de bonheur à la barre, de sensations de glisse. 45 jours de cohésion d'équipage avec un skipper hors pair qui nous a vraiment mis en confiance. Personnellement je n'ai jamais été inquiété alors qu'on a quand même navigué dans des endroits qui nous on fait descendre bien Sud. On a navigué sereinement et gardé de belles images de glaces, d'îles lointaines comme les Kerguelen. J'étais le dernier arrivé à bord et même si on se côtoyait par la force des choses les uns les autres, sur différents circuits, je n'avais quasiment jamais navigué ni avec les uns ni avec les autres. Il y avait aussi ce challenge-là pour moi, mais ça s'est superbement bien passé ».
« Pour moi, si on partait de Brest, il fallait qu'on revienne à Brest quoi qu'il arrive, ne serait-ce que pour repasser le goulet. Le symbole est important et la boucle est bouclée. D'un point de vue plaisir sportif, c'est toujours un émerveillement de barrer ces bateaux-là. “Banque Populaire V ”est vraiment très costaud. En terme de fiabilité il y a un gros travail qui a été fait cette année par rapport à des petits soucis rencontrés l'année dernière et je suis agréablement surpris de voir que les quelques petits problèmes rencontrés auraient certes pu être préjudiciables pour la performance, mais jamais pour l'intégrité.
C'est vraiment satisfaisant de revenir avec un bateau en très bon état et qui fonctionne encore. En tant que responsable médical je n'ai vraiment pas eu de boulot ; des petites choses courantes mais rien d'important à gérer. C'est plutôt une bonne chose parce qu'on se rend vite compte que si on avait dû faire des points de suture par exemple, je ne sais pas comment on aurait fait certaines fois, parce que le bateau volait littéralement. Je suis très content qu'on n'ait pas eu à essayer. L'avantage, c'est que ces bateaux vont maintenant tellement vite qu'on peut se permettre d'aller dans des zones où la mer sollicite moins la machine et les marins et donc en théorie on peut revenir dans un meilleur état ».
« Je suis très très heureux d'avoir bouclé ce tour du monde. J'ai pris beaucoup de plaisir sur l'eau, beaucoup de plaisir à barrer ce bateau et à être avec toute l'équipe. C'est une page de tournée. Ce sont trois ans de travail et on est tous très content de pouvoir offrir cette victoire aujourd'hui. Cela ne change pas ma vie de marin, ça me confirme juste que ce que je fais, je l'aime et que j'ai envie de continuer.
Cela ne fait que trois ans et demi que je suis dans la course au large, avant j'étais dans l'olympisme entre les bouées. Ce voyage de 45 jours me prouve que j'ai vraiment envie de continuer dans cette direction.
Je veux remercier l'équipe technique de “Banque Populaire” qui a fait un travail formidable. On a un bateau qui revient dans un état exceptionnel. On a des choses qui ne fonctionnaient pas qui ont fonctionné à merveille sur ce tour du monde, ça veut dire qu'on a progressé. Ce qu'on a fait pendant 45 jours l'est en grande partie grâce à la préparation du bateau. Il font intégralement partie de la performance, il faut vraiment leur rendre hommage ».
« J'avais fait tous les records à bord de “Banque Populaire”, mais pas les tentatives de Trophée Jules Verne. Cette année, les circonstances se prêtaient à un tour du monde pour moi et en plus c'était à l'invitation de Loïck Peyron qui est un vieux complice. C'était sympa de finir une histoire : participer au design du plan de voilure, faire les premiers essais et après ça faire le tour du monde... La boucle est bouclée et ce n'est pas si mal que ça. J'espère qu'il y aura d'autres histoires avec ce bateau parce que depuis la première journée j'ai pris du plaisir à naviguer à bord ».
« C'est fantastique, c'est du pur bonheur ! Et puis ça fait du bien, c'est relaxant. Parce que de faire partie de ce projet depuis le début avec ces trois années de “stand-by”, toute la mise au point qui a été faite avec Pascal Bidégorry, a demandé de l'investissement. On a pris un pied gigantesque. On était une équipe géniale et je suis vraiment content de finir ça aujourd'hui dans ces circonstances.
Je n'aurais jamais fait de tour du monde si ça n'avait pas été sur un bateau comme ça. J'aime la vitesse, je n'allais pas faire ça sur n'importe quel bateau. Si j'ai dit oui à l'époque à Pascal, c'est parce qu'il y avait ce bateau qui se construisait. Cette aventure a été quelque chose d'incroyable.»
À noter qu'Yvan permet aussi au Trophée Jules Verne de rester chez les «Ravussin», puisque Steve, son frère était sur Groupama 3.
« Trois Trophées Jules Verne à mon actif mais trois expériences différentes, parce qu'à chaque fois même si le parcours est le même, les conditions changent, les bateaux évoluent et celui-là est une machine de guerre.
Pour mon premier Jules Verne, il y avait ce rêve de faire le tour du monde. Le deuxième, le bateau était plus fiable mais on n'a pas trop tiré dessus et en revanche on a eu des conditions météo de rêve. Là on arrive sur un bateau qui est vraiment abouti.
C'est la première fois qu'on navigue sur des bateaux qui peuvent aller entre 35 et 40 nœuds sans souci. Sans que ce soit naturel, ça se fait bien. À côté de ça, j'ai eu la chance de participer à la conception du bateau et donc de donner mon avis sur mon domaine que sont les bouts. Le fait d'arriver au bout de cette aventure et de cette manière est une grande satisfaction. Je suis prêt à repartir et j'espère re-naviguer très vite sur ce bateau. C'est un très joli jouet ».
«Chaque Trophée Jules Verne n'est jamais exactement la même chose. Le challenge est toujours différent et pour ce qui concerne celui que nous venons de faire, nous avons eu la chance de naviguer sur une machine taillée pour.
Le Jules Verne est une histoire d'acharnement qui tourne à l'obsession et qui prend beaucoup de temps. A titre personnel, depuis 2007, j'ai passé chaque hiver en “stand-by”, c'est un peu usant. Je suis ravi que cet hiver nous ayons pu partir et que cette tentative ait été couronnée de succès.
Tous les barreurs ont pris un plaisir incroyable à barre de ce bateau dans une mer formée. “Banque Populaire” est très abouti. C'est un bateau magnifique, très complet ! »
« Je passais entre 14 et 16 h à la table à cartes. Je sortais seulement pour les manœuvres. Paradoxalement, les 45 jours sont passés vite ! Nous étions en contact permanent avec Marcel, principalement par courriel. Nous utilisions le téléphone lors des décisions critiques, comme le pot au noir ou les Kerguelen. On échangeait nos idées et nous prenions toutes les décisions ensemble. C'était très intéressant de pouvoir échanger avec quelqu'un qui avait un regard extérieur sur notre progression.
Je suis enchanté d'avoir fait partie de cette aventure et, même si on savait que les gens suivaient notre progression, je ne m'attendais pas à voir autant de monde à notre arrivée à Brest. Cette arrivée restera mon plus grand souvenir et c'est la plus belle récompense pour l'équipe dans son intégralité ».
« Plusieurs aspects nous ont permis d'obtenir ce record : la technologie du bateau et ses capacités, la météo que nous avons eue, mais surtout les hommes ! C'était vraiment un privilège de naviguer avec eux, et notamment avec Loïck, qui est un type adorable. Il est concentré et détendu en même temps. Il prend soin du bateau et de l'équipage, tout en gardant l'objectif à l'esprit.
C'était très intéressant d'être le seul Anglais à bord d'un bateau de conception française issue d'une expertise 100 % française et composé d'un équipage principalement français. C'était une immersion totale et je n'aurais pas imaginé que cela puisse aussi bien se passer.
J'ai vraiment apprécié la façon dont ils savent pousser le bateau au maximum de ses capacités pour aller très vite, mais le tout d'une manière très “safe”. Ils ont travaillé sur le projet pendant quatre ans et ils ont fait quelques ajustements. C'est toute l'équipe qui remporte le record d'aujourd'hui, y compris l'équipe technique.
Pour moi le meilleur point de ce record était l'ambiance du bord. La gentillesse, l'humour et l'optimisme des hommes pendant 45 jours a vraiment été fantastique. Cela a vraiment joué dans cette victoire. Cela a été un privilège pour moi que de naviguer sur ce Trophée Jules Verne ».
Rédaction : Marie Le Berrigaud
Hors quart
Loïck Peyron, skipper ;
Juan Vila, navigateur, responsable électronique et informatique.
Quart n° 1
Yvan Ravussin, chef de quart, responsable composite ;
Brian Thompson, barreur/régleur ;
Pierre-Yves Moreau,régleur, responsable mécanique et hydrolique ;
Thierry Chabagny, n°1 / barreur/régleur, responsable accastillage et voiles.
Quart n° 2
Frédéric Le Peutrec, chef de quart ;
Emmanuel Le Borgne, barreur/régleur, responsable médical ;
Thierry Duprey Du Vorsent, barreur/régleur, responsable mécanique ;
Ronan Lucas, n° 1 / régleur, responsable sécurité.
Quart n° 3
Jean-Baptiste Le Vaillant, chef de quart, responsable voile ;
Kevin Escofier, barreur/régleur, responsable vidéo et structure ;
Xavier Revil, barreur/régleur, responsable avitaillement à bord ;
Florent Chastel, n°1 / régleur, responsable médical.
Marcel Van Triest, routeur à terre.
Note ABP
Pour retrouver sur ABP tous les communiqués sur les “Jules Verne” (voir le site) , cette page et les suivantes.
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