Très bonne livraison du dernier Monde Diplomatique avec, au sommaire, un dossier fort critiquable mais néanmoins intéressant sur Cinquante ans de Lutte Armée en Europe de l'Ouest.
Également au sommaire, une surprenante enquête sur les Verts allemands, leur embourgeoisement et leurs compromissions (est-ce ce qui attend les Verts français ?).
Une plongée dans la “YougoNostalgie” et un focus sur la question de la démondialisation.
Plus tout le blabla habituel. 4,90 euros.
■Il y a un bon édito d'Hervé Bertho, à lire sur Ouest-France aujourd'hui.
La bataille des langues
«I. Une vision du monde
Il faut être naïf ou ignorant pour ne voir dans une langue vivante qu’un outil de communication, comme le sont les langues artificielles. Au-delà des barrières sociales, et comme le démontrent d’innombrables travaux de neurophysiologistes et de psychologues, elle ne se réduit pas à un simple code pour l’échange d’informations, mais elle constitue le creuset même de l’identité de chacun. Comme a pu l’écrire Régis Debray, « elle n’est pas un instrument, mais un milieu de vie, le fil d’or d’une vitalité longue et singulière ». On ne voit pas et on ne pense pas le monde, pas plus que l’on ne crée ou n’invente, de manière identique à travers le prisme du norvégien et à travers celui du quechua ou du chinois.
Ce qui est vrai des individus l’est aussi des communautés et des nations. Pour le grand historien Fernand Braudel, « la France, c’est la langue française »...................................................;;
II. Le dépassement d’un « moi divisé »
»Parmi les séquelles de toute colonisation, la question linguistique est celle qui n’a jamais pu trouver de réponse complètement satisfaisante. Les puissances coloniales — américaine (à Porto Rico), belge (au Congo) ou, dans leurs empires respectifs, britannique, espagnole, française et portugaise — ont, à des degrés divers, imposé l’usage de leur langue à des populations qui en parlaient une ou plusieurs autres. Une fois venues les indépendances, les nouveaux Etats ont dû choisir une langue officielle et, dans la majorité des cas, ce fut celle du colonisateur.«
La patrie littéraire du colonisé
Albert Memmi
III. Réponses de la francophonie
»S’il est un terme qui irrite fortement une bonne partie des journalistes, publicitaires, essayistes de plateaux de télévision et grands patrons, c’est bien celui, terriblement ringard pour eux, de francophonie.«
IV. La chape de l’anglais
»Dans son Combat pour le français (Odile Jacob), Claude Hagège cite l’écrivain britannique T. B. Macaulay, qui, en 1835, assignait à la colonisation de l’Inde la mission de former « une classe d’individus indiens de sang et de couleur, mais anglais par leurs goûts, leurs opinions, leurs valeurs et leur intellect ».«
»En France, il faut chercher la clé de cette myopie dans leur rapport à la langue française : n’a-t-elle pas été celle de la colonisation et de la marginalisation des langues dites « régionales » ? Dans ces conditions, elle serait, par essence, « répressive », alors que l’anglais serait « neutre » puisqu’il ne leur donne aucune mauvaise conscience. Avec de telles analyses, le néolibéralisme a de beaux jours devant lui...«
Remplacé »La chape de l'anglais« par la »Chape du français", ça marche aussi !