«L’auteur offre ses poèmes comme un « poème radiophonique en forme de récit » et il est vrai qu’il s’agit là d’une poésie narrative, racontant une balade en pays celtique. On y fait halte avec lui en divers lieux – sites, villes, régions – de Nantes à Saint-Malo, via Douarnenez, Vannes, La Brière, Lamballe, Dinan, Saint-Brieuc, etc. Et toujours en bonne compagnie, puisque c’est aux côtés de poètes, les Cadou, Max Jacob, Armand Robin, Georges Perros, Louis Guilloux, Le Quintrec, Jean Laugier et bien d’autres que l’on chemine.
Car il s’agit bien d’une poésie d’évocations, qui mêle l’histoire (les rappels de faits anciens y sont nombreux), la géographie (la géopoétique de Kenneth White n’est pas si loin) et la littérature, voire la spiritualité. On y voit Guilloux discutant avec Jean Grenier sur la place de Saint-Brieuc, Colette écrivant sur les chats à Bréhat, Perros dans sa maison de pêcheur et Saint-Pol Roux dans son manoir. Mais aussi les « paludiers entretenant les étiers / cueillant la salicorne».«
Michel Baglin, extrait note de lecture/ Revue Texture (voir le site)
.
.
.
.
.
.
.
.
»La Bretagne est un rêve que j’ai fait«
se justifie Georges Perros
pour vivre à Douarnenez
La Bretagne
transie dans nos respirations
dans les confins secrets
des forêts
que traversent les petites routes sinueuses
par lesquelles nous rejoignons
Étables-sur-Mer
La Bretagne déleste toute pesanteur
sur la plage et au loin sur la baie de Saint-Brieuc
Une légèreté s’épanouit avec les hortensias
.
.
.
.
.
Bretagne
j’ai accosté aux quais de ta sagesse
j’ai vanné le temps de tes bonheurs enfuis
j’ai touché tes mégalithes à Jarnac
moi l’azilien familier des dolmens
.
.
Bretagne
j’ai reconnu ton Histoire
dans l’Histoire de l’Occitanie
quand on arrache l’ortie cathare
.
.
Bretagne Occitanie
nous sommes sœurs
nous avons été reines parmi les civilisations
trop puissantes trop brillantes
pour ne pas être convoitées
civilisation maritime de la Bretagne
qui faisait commerce avec les empires
civilisation des arts de la convivencia de l’Occitanie
.
.
.
.
.
Le musée de Perros-Guirec
niche dans une maison grise
après l’allée des hortensias et des agapanthes
qui prient le ciel les contemplant
d’une pluie à intervalles
.
L’arbitraire ponctuation de l’Histoire
agite les morts violentes
de l’extrême obstination
d’un peuple en lutte
.
Beaucoup revêtirent la chemise du condamné
et les dernières silhouettes
de Renan de Botrel
de Maurice Denis et de Le Goffic
- à lui nous rendîmes visite
au cimetière du Bourg -
s’auréolent du miroitement
des gloires sans fatigue
.
.
Les femmes d’ici
étaient assignées aux oratoires
pour que la mer ou la guerre
ne leur prennent leurs hommes
dans un ordre céleste
.
.
Elles se pétrifiaient d’habits noirs
mais offraient à la lumière du jour
le visage original
de la Vierge à coiffe blanche
.
.
Les disparus
elles parvinrent à s’en émanciper
pour les congés payés de 1936
et entrèrent alors le jour de leurs noces
tout de blanc vêtues
dans les églises de granit rose
.
.
.
»Toiles bretagnes«, Christian Saint-Paul préface Alem Surre Garcia, Monde en poésie éditions 2017, 12 €
Christian Saint-Paul auteur & poète toulousain anime l'émission Les poètes sur »Radio Occitania«
Bio (voir le site)
Editions »Monde en poésie" (voir le site)
■