François Hollande remporte ce soir une victoire mathématiquement prévue mais pas assurée sur Martine Aubry.
Le report des voix et la légitimité de celui qui tant d'années a été le premier secrétaire du PS pesaient fortement pour l’élection de François Hollande, mais sans assurer pour autant sa victoire (voir notre article) puisque avec près de deux millions de votants dont 90 % n'étaient pas militants du PS, le scrutin restait ouvert.
Il y a une demi-heure, pour 800 bureaux sur 9425, le dépouillement donnait un confortable 60/40 en faveur de François Hollande. L'estimation des résultats tend à un 55/45, toujours en faveur du candidat corrézien. Le dépouillement, achevé pour 1/4 des bureaux (2360), donne 57,16 % pour ce dernier et 42,22 % pour Martine Aubry. L'écart semble impossible à rattraper pour cette dernière.
Quelles leçons peuvent être tirées de scrutin novateur en France? D'abord, les militants et les non-militants votent à peu près de même façon, ce qui limite le suspense du scrutin.
Ensuite, il n'y a pas de particularismes locaux, ce qui veut dire que l'ouverture aux non-militants lisse les tendances des candidats à se constituer des fiefs où ils sont très populaires. Évidemment, certaines exceptions surnagent, par exemple le Nord dont les résultats quasi-définitifs donnent près de 70 % des voix à Martine Aubry. Mais au premier tour, Ségolène Royal n'a pas cartonné dans le Poitou, et la Bretagne n'a pas voté très différemment du reste de la France comme elle en a l'habitude, notamment pour le dernier référendum européen. En revanche, Saint-Pierre et Miquelon n'a pas manqué une occasion de se distinguer en donnant la majorité au candidat du Parti Radical de Gauche, Baylet, qui y a fait 39 %.
Enfin, le processus de désignation reste fondé sur une réelle légitimité du candidat au sein du parti socialiste ce qui veut dire que les candidatures de Valls, Royal, Baylet, outsiders au sein de la gauche, partaient déjà avec un lourd handicap. Martine Aubry a souffert du pacte de Marrakech et de sa complaisance vis-à-vis des turpitudes de DSK. On peut y ajouter, à un niveau plus local, sa volonté de liquider l'héritage Frêche en Languedoc, ce qui n'a pas manqué de braquer contre elles les sections locales et les sympathisants de gauches, toujours prompts à brocarder le jacobinisme envahisseur parisien.
Une primaire pour rien ? Non, car en attirant près de deux millions d’électeurs, deux dimanches de suite, le PS a réalisé une très bonne opération d'image, doublée d'une bonne récolte de finances. En se posant comme une formation capable de réaliser dans le calme et la dignité un scrutin novateur en France et qui se présageait plein de chausse-trappes politiques, le PS s'est posé pour une fois en champion du «changement» et de l'alternative. Nous en avions perdu l'habitude.
Louis Bouveron