Patrimoine breton, le parent pauvre

Chronique publié le 7/10/23 10:38 dans Histoire de Bretagne par Yvon Ollivier pour Yvon Ollivier
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photo de la cheminée du manoir de bouvron portant les armoiries de Raboceau

La décision est tombée cet été. Le manoir de Bouvron, logis médiéval situé au centre bourg, dont l’Inrap avait souligné l’intérêt architectural, va être rasé. Le terrain sera vendu à un promoteur, pour édifier une « supérette ».

La Drac des pays de la Loire ne s’était pas montrée favorable à la demande de classement formulée par les associations patrimoniales. Le préfet a suivi.

Il ne payait pas de mine, ce logis médiéval enchâssé dans une bâtisse du 19e siècle – ce qui avait permis de le préserver- mais il faisait lien avec notre histoire. Sa vieille cheminée porte encore le blason de Pierre Raboceau, secrétaire des deux derniers ducs de Bretagne.

Selon Mr le Préfet de la région des pays de la Loire, sa valeur historique n’apparaissait pas suffisamment établie. Il avait juste le mérite de nous rappeler que la Loire-Atlantique est historiquement bretonne, ce qui peut déplaire à un préfet des pays de la Loire.

Sommes-nous condamnés à voir disparaître tous les vestiges anciens qui pourraient fort bien être réhabilités, pour que toutes les bourgades n’expriment plus la moindre originalité, avec partout les mêmes supérettes ?

Sommes-nous condamnés à la destruction lente de notre histoire bretonne pour laisser place à celle que la technocratie parisienne a écrite pour nous, sans jamais nous consulter ? La ville de Bouvron doit son origine à une décision du duc de Bretagne ayant confié à des moines le soin d’y édifier une église. Les pouvoirs publics ne s’en soucient guère. Koun Breizh avait interpellé le président de la Région Bretagne pour qu’il intervienne dans ce dossier. Il avait botté en touche.

Ce désintérêt pour notre patrimoine, peu compréhensible à l’étranger, se retrouve dans le fonctionnement des instances en charge de la protection des menhirs. L’affaire de la destruction des menhirs, chemin de Montauban à Carnac, pour édifier un « Mr Bricolage », témoigne de l’incapacité de ces instances à assurer une protection efficace.

A ce jour, nous n’avons toujours pas de réponse à nos questions. Le ministère de la Culture n’a pas daigné s’interroger sur l’origine d’un dysfonctionnement ayant vu la destruction de vestiges archéologiques signalés par l’Inrap, figurant sur la carte archéologique et faisant l’objet d’un arrêté de fouilles préalables s’imposant au maire comme à l’aménageur.

Cette affaire a donné lieu, pour le maire de Carnac, à un exercice de communication politique sur les mauvais traitements endurés par les édiles pour refuser de répondre aux questions que nous lui posons. Sommes-nous assurés que des dispositions ont été prises par la mairie de Carnac pour que plus jamais nous n’assistions à de tels dévoiements ? Nous n’en savons rien.

Le commerce est aujourd’hui bien plus important que le patrimoine. Or le patrimoine est ce qui nous relie à notre communauté, ainsi qu’à notre terre. C’est pour ces raisons, qu’il est le parent pauvre des politiques publiques.

D’urgence, il faut simplifier et démocratiser les règles protectrices. Il n’est plus acceptable qu’un préfet assure librement la destruction de nos vestiges historiques bretons, sans rendre le moindre compte devant le peuple.

La protection du patrimoine est l’un des grands enjeux de l’autonomie d’une Bretagne réunifiée

Yvon Ollivier

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Vos commentaires :
Krys 44
Dimanche 24 novembre 2024
De quand ce manoir date-t-il ? Il n'est pas d'intérêt architectural assez important ?
Combien de siècle a-t-il traversé pour arriver jusqu'à nous ? Et sans avoir été entretenu !
L'architecture de la «supérette» de remplacement sera-t-elle d'un intérêt architectural plus important ? Traversera-t-elle autant de siècles ?
C'est l'uniformisation sans le moindre intérêt de tous nos «centres bourgs» alors qu'il existe à Bouvron des points de vente de produit locaux , biologiques, produits par nos agriculteurs des alentours ...
Du bas de gamme généralisé , de l'immédiateté sans vision à plus long terme , ... on tombe dans le bassement commercial.
Se préoccupe-t-on de graduer «l'intérêt architectural» quand il s'agit d'autre chose que du patrimoine breton ? Ce patrimoine classé ainsi de manière très subjective n'appartient pas à ces instances sans intérêt important autre que «politique» , mais à NOUS TOUS et aux générations qui viendront et qui ont droit à leur histoire ! N'en déplaise aux Étriqués à la culture finalement peu étendue , partielle et partiale ...

Anne Merrien
Dimanche 24 novembre 2024
Dans le numéro du Poher en date du 11 mai 2022, on pouvait lire un article sur «la revitalisation des bourgs ruraux». Les élus de Bulat-Pestivien voulaient réaménager le bourg «en le laissant dans son jus». Une architecte avait même fait le déplacement depuis la Haute-Loire pour préconiser «la démolition partielle», avec cette mise en garde : «Ne pas tomber dans le panneau de la standardisation de la réhabilitation, ne pas mettre en péril le caractère des bourgs».

Anne Merrien
Dimanche 24 novembre 2024
Il aurait fallu raccrocher ces vestiges au roman national français, mais ce n'était peut-être pas possible. Les présenter comme un rare témoignage de l'Etat breton, c'était comme agiter un chiffon rouge devant le préfet des PDL.

Anne Merrien
Dimanche 24 novembre 2024
Bouvron deviendra peut-être un cas d'école pour montrer ce qu'il ne faut surtout pas faire en matière de réaménagement urbain. On appellera ce syndrome la «bouvronnisation».

Jean-Luc Laquittant
Dimanche 24 novembre 2024
Merci à Koun Breizh (souvenir breton) et à son président qui sont sur tous coups où le patrimoine breton, bâti ou immatériel, sont en danger. Bravo à cette association unique et indispensable en Bretagne.

Anne Merrien
Dimanche 24 novembre 2024
bouvronisation : n.f. (2023) de Bouvron, bourg de la Loire-Atlantique.
Pratique de revitalisation d'un bourg qui consiste à détruire tous les bâtiments d'une parcelle, afin qu'il n'y ait aucun obstacle à la construction d'un aménagement standardisé. Aucun vestige patrimonial, aucun mur encore solide ne doit être préservé. Aucun élément sur la parcelle ne doit rappeler l'ancien caractère du bourg.

Perig Evoreg
Dimanche 24 novembre 2024
J'avais évoqué il y a plus de 25 ans, lors d'une réunion du Conseil Culturel, la possibilité dune «3ème protection» à côté du classement et de l'inscription à l'Inventaire Supplémentaire des Monuments Historiques.
Je pense qu'il faut relancer cette idée et l'attribuer au Conseil Culturel de Bretagne sous la forme, par exemple, d'un label «patrimoine de Bretagne». Confier cela au CCB aurait l'avantage de pouvoir agir sur les 5 départements.
La même approche pourrait être utilisée pour permettre du CCB d'acheter des objets en urgence, en salle des ventes par exemple...

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