Le Mouvement de la Paix, tout en condamnant fermement l'utilisation d'armes chimiques estime que «l'escalade proposée par le Président Hollande n'est pas la bonne issue». Avant même les conclusions de la mission de l'ONU, seule habilitée à mener une telle enquête sur l'utilisation des armes chimiques, la France, les USA et leurs alliés membres de l'OTAN, déclarent avoir des certitudes. Si preuves il y a, ils ont la responsabilité de les transmettre à l'ONU. Après avoir rappelé le bilan effroyable pour le peuple syrien, il estime que la crise syrienne est devenue une crise géopolitique où chacun défend ses intérêts dans la région et reproche aux puissances occidentales membres de l'OTAN de n'avoir pris aucune initiative pour résoudre politiquement ce conflit.
Au lieu de cela, les antagonismes ont été entretenus, voire même alimentés, et les horreurs de la guerre civile ont affaibli les possibles recours. [...] Loin d'être la solution, [l'intervention armée en Syrie] ne bénéficierait qu'aux marchands d'armes. Le Mouvement de la Paix dénonce catégoriquement l'argument, relayé à l'unisson par les médias, d'une guerre indispensable et demande au gouvernement français de renoncer à l'emploi des forces armées, de faire respecter le droit international et de prendre toutes les initiatives politiques possibles pour obtenir un cessez-le-feu. Le Mouvement de la Paix demande la reprise du plan de Kofi Annan avec des moyens humains renforcés pour parvenir à une transition démocratique en Syrie et permettre une stabilisation de la région.
Le Comité Rennais du Mouvement de la paix appelle les citoyens et les organisations du pays de Rennes à se rassembler pour marquer collectivement le refus d'une intervention militaire le vendredi 30 août à 18h place de la Mairie.
«Avant même d'avoir commencé, l'intervention en Syrie n'est déjà plus un bourbier mais un merdier», déclare Véronique De Keyser, députée européenne, Vice-présidente du Groupe Socialistes et Démocrates :
«La guerre ne guérit pas de la guerre. Le devoir de protéger aujourd'hui, c'est d'abord le devoir de rappeler cette évidence. Identifier les utilisateurs des armes chimiques, les mettre hors d'état de nuire, les traîner devant les tribunaux, rendre justice et de faire du droit international une arme essentielle, oui. Mais nous ne sommes pas dans ce cas de figure et le conflit syrien signe d'abord l'impuissance politique de l'ONU et le spectre d'une guerre froide, évoquée à demi-mot par Obama récemment. Le tout dans un contexte de crise économique à l'échelle mondiale. Tout cela a un air de déjà vu qui devrait inciter l'Europe à la prudence».
Pervin Buldan, Vice-présidente du groupe parlementaire BDP (Parti pour la Paix et la Démocratie, pro-kurde) à la Grande Assemblée de Turquie a déclaré que son parti était, depuis le début de la crise syrienne, contre toute intervention étrangère en Syrie :
«en cas d'attaque sur Rojava [nom kurde du Kurdistan occidental, du côté syrien de la frontière] le peuple kurde saura faire entendre sa voix. Nous sommes absolument contre une telle intervention étrangère. Aucune participation turque à un tel scénario en Syrie ne sera pas soutenue par le BDP».
Après avoir évoqué les manifestations de soutien aux populations kurdes de Syrie, Pervin Buldan ajoute :
«nos manifestations se poursuivent partout. En cas d'intervention étrangère en Syrie, nous poursuivrons nos manifestations et pourrions également lancer d'autres formes d'action».
Ce n'est pas la première fois que nous dénonçons ici l'emploi d'armes chimiques par la Turquie, sans grands échos - mais il est vrai qu'il s'agit là d'un allié, membre de l'Otan - contre les combattants du PKK (14/11/2011) ou même envers la population civile (31/12/2011).
Plus récemment encore nous donnions la parole à un écologiste de Hakkari :
«c'est une région riche de ressources naturelles mais l'utilisation d'armes chimiques a provoqué beaucoup de dégâts. Les affrontements ont forcé les animaux à se réfugier ailleurs».
Durant la guerre Iran-Irak (1980/1988) qui a fait entre 500 000 et 1 200 000 victimes selon les estimations, des centaines de bombes chimiques ont visé des cibles militaires et civiles iraniennes.
On ne parle pas d'emploi d'armes chimiques à propos de la 3e guerre du Golfe (2003/2011), déclenchée par une coalition menée par les Etats-Unis, mais elle a néanmoins fait entre un million et un million et demi de morts et coûté quatre mille milliards de dollars. Aujourd'hui encore des dizaines d'Irakiens sont chaque jour victimes d'attentats aveugles, dans l'indifférence générale.
L'opération connue sous le nom d'Anfal, ordonnée par le régime irakien de Saddam Hussein a, de février à septembre 1988, conduit à l'élimination de plus de 180 000 civils kurdes. L'épisode le plus tragique fut le bombardement aux gaz chimiques de la ville kurde de Halabja le 16 mars 1988. Des juges parisiens vont enquêter sur l'éventuelle responsabilité d'entreprises françaises dans ce que d'aucuns appellent le «génocide kurde». D'après l'AFP :
«le bombardement d'Halabja, lui, était intervenue en 1988, alors que la guerre contre l'Iran tirait à sa fin. Les peshmergas, les combattants kurdes, s'étaient emparés de Halabja, dans les montagnes du Kurdistan. L'armée irakienne avait riposté en pilonnant la localité, forçant les combattants kurdes à se replier vers les collines alentours, laissant derrière eux femmes et enfants. Le 16 mars, des avions de combat irakiens avaient survolé la zone pendant cinq heures, déversant un mélange de gaz moutarde et des neurotoxiques Tabun, Sarin et VX. Le bombardement a fait environ 5.000 morts -en majorité des femmes et des enfants- et plusieurs milliers de blessés. Nombre de survivants continuent de souffrir de séquelles».
Mardin Mahmood Fatah avait 5 ans au moment du drame. Toute sa famille a péri dans le bombardement. Elle est venue en France demander justice.
« La seule chose qui compte pour moi, c'est la condamnation de ces dirigeants d'entreprise, des ingénieurs, chimistes« affirme Mardin Mahmood Fatah qui souhaite que »chacun soit condamné selon son niveau d'implication".
André Métayer
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