Non à l'exclusion des écrivains bretons : lettre ouverte de Catherine Marc

Lettre ouverte publié le 20/01/13 14:58 dans Cultures par Marie-Josée Christien pour Marie-Josée Christien

L'Odyssée des mots, organisée par les médiathèques de Quimper-Communauté accueille, jusqu'en février, une manifestation d'envergure sur le thème «Osez dire dire non à l'indifférence» proposée par les éditions Actes Sud Junior.

Une thématique à laquelle les auteurs bretons sont sensibles et qu'ils explorent avec constance dans leurs écrits. Mais aucun auteur de Bretagne n'a été invité à mêler sa voix pour «dire non à l'indifférence»,les six auteurs programmés aux lectures, rencontres et ateliers d'écriture étant issus du seul collectif d'auteurs des éditions d'Actes Sud Junior.

La revue Spered Gouez a reçu cette «lettre ouverte» de Catherine Marc, membre de l'association Ker-Hars, aux organisateurs de cette manifestation. Il nous semble intéressant de la publier ici, afin de susciter le débat et l'échange de points de vue.

De l'indifférence à l'exclusion

Comment être neutre quand on a vu placardée d'une rue à l'autre, l'affiche qui sur chaque livre déploie les lettres « osez : » et le reste de la phrase: « dire non à l'indifférence! ». Elle est actuelle, l'indifférence, et plus fort encore l'acte d'exclusion ! Aucun auteur quimpérois ou des alentours n'est invité à être un de ceux qui savent dire non à l'indifférence. Seraient-ils eux- mêmes des indifférents ? Est-ce la signification induite dans le choix de cette thématique ? Ou serait-ce plutôt l'institution qui veut l'ignorer ? Pas facile effectivement d'être confronté à ceux, qui aujourd'hui disent non, là, sur le parvis de la cathédrale.

Comment peut-on vivre alors décemment chez soi ? Quelle est la place que la politique culturelle quimpéroise donne à ses artistes ? L'indifférence étant là, présente, dans le quotidien, dans la proximité au sein même de l'Odyssée des mots. Justement c'est cette réalité là qui est un paradoxe : aller chercher ailleurs, avec d'autres auteurs et ne faire aucun effort pour donner ne serait-ce qu'un minimum de place, à ceux qui ici, vivent, créent, portent et passent le flambeau de notre riche culture, au quotidien des mots écrits au présent. Ce propos ne va pas contre le fait d'inviter ces auteurs, mais bien contre le fait de laisser de côté les auteurs de Bretagne – « les régionaux » de l'étape dont les écrits, parce que d'ici, n'auraient aucune portée universelle ? - C'est encore, aujourd'hui, hélas comme hier de sinistre mémoire, arracher à la culture «locale» cette place dans le concert de l'humanité de l'intelligence humaine. C'est le déni du citoyen, même si on l' invite à participer, le déni du travail et du contribuable, le déni de l'artiste, le déni des auteurs et créateurs bretons.

L'affiche devient alors celle du cauchemar, de l'indécence, quand en plus on choisit des écrivains pour les « juniors » ! comme si le thème était trop scabreux pour être proposé à l'adulte. Un seul « grand » Editeur ! On a donc besoin d'un audimat sélectif ! On raconte le passé, personne ne s'y oppose, mais en occultant le présent. Pourtant exprimer l'indifférence devrait être justement le fruit d'un travail fédérateur. Cela devrait être une politique qui met l'accent sur la création comme levier social , comme incitation à aller vers la connaissance, vers l'information, vers plus d'humanité.

Les artistes, les auteur(e)s sont souvent le socle essentiel pour interroger notre société sur les injustices. Et il n'existe pas de désert breton ni quimpérois sur la question. Quel est donc ce prix du « non à l'indifférence ? Et d'une manière générale que fait Quimper pour ses créateurs et ses citoyens indignés d'être ainsi relégués au rôle passif de ceux qui doivent recevoir car incapables d'enrichir l'échange ?

Catherine Marc


Vos commentaires :
Marie-Anne B.
Dimanche 22 décembre 2024
Catherine Marc, que je ne connais pas, a raison de dénoncer la mise à l'écart systématique des écrivains bretons à Quimper. Habitant depuis peu dans la région quimpéroise, cela m'a sauté aux yeux à la moue d'une bibliothécaire que j'interrogeais sur les livres des auteurs du coin disponibles dans les rayons des bibliothèques de Quimper.

O. Curieux
Dimanche 22 décembre 2024
Repères et programmes 7 janvier 2013
pour savoir un peu de quoi il s'agit :
www.letelegramme.com/tag/Odyssée%20des%20mots

J. Le Corre
Dimanche 22 décembre 2024
L'affiche est vraiment hydeuse. J'espère qu'elle a été faite en interne par la médiathèque ou la mairie, parce que sinon...

Jean Pierre
Dimanche 22 décembre 2024
J'ai assisté à quelques lectures, bof, pas très convaincant.

anne-marie c
Dimanche 22 décembre 2024
bonjour
en effet c'est dommage de ne pas avoir invité des auteurs du cru d'autant que l'indifférence se joue chaque jour ,à chaque coin de nos rues bien qu'il ait aussi des formes de solidarités formidables à côté de chez soi.il est souvent interessant de confronter les idées des gens un peu plus médiatisés avec celles rester dans l'ombre ,et qui oeuvrent aussi à faire avancer le débat.pour eviter l'indifference,restons connectés les uns aux autres malgré parfois nos divergences.

Agnès Lambert
Dimanche 22 décembre 2024
Moi je vous dirais qu'en tant qu'auteur non breton vivant en Bretagne depuis 8 ans et ayant publié chez un éditeur non breton un roman inspiré des légendes celtes et se déroulant en Bretagne (après d'autres textes publiés chez divers éditeurs hors du territoire breton), j'ai reçu un accueil plus que froid de la part des milieux celtisants, de la part des libraires du coin, de la part des médiathèques, de Coop-Breizh, etc. Hormis l'ABP, Breizhbook, et un rapide article dans le Télégramme et une super interview sur France Bleu Armorique...toutes les autres portes auxquelles j'ai frappé sont restées closes.

Hélène H.
Dimanche 22 décembre 2024
C'est tout le problème des animations «clé en main» qui ne permet aucune adaptation par les structures qui les emploient. Elles sont les mêmes de Marseille à Lille, de Strasbourg à Quimper et surtout parfaitement adaptés au public bobo parisien. Bien sûr c'est reposant et ça ne demande aucun travail aux médiathèques. En contrepartie, celles-ci laissent là la majeure partie de leur budget alloué aux animations. Malgré l'avalanche de sollicitations, de plus en plus grande chaque année, la médiathèque du Morbihan où je travaille a toujours résisté et a la mainmise sur toutes ses animations, contrairement à celle de Quimper. Nous sommes contents de notre choix, car cela nous permet de travailler sur toute l'année en équipe et avec des partenaires locaux, associations et enseignants. Nous essayons avant tout de mettre en avant le fonds de notre médiathèque en créant du lien entre des auteurs bretons et des auteurs d'autres régions. Nous sommes souvent fiers de voir des projets naître grâce à nous. Un auteur jeunesse a rencontré ainsi une illustratrice avec laquelle il travaille depuis, une conteuse un musicien et il y a bien d'autres exemples.

Gérard CLERY
Dimanche 22 décembre 2024
En accord avec votre constat d'absence de consultation d'écrivains bretons sur le «NON A L'INDIFFERENCE», écrivains dont on ignore, délibérément ou non, la présence non dormante. Cet ostracisme n'en n'est malheureusement pas à sa première manifestation. Il relève sans doute d'un manque de curiosité à l'égard d'une parole, pourtant proche, d'une expression dont l'existence est pourtant visible, comme si ceux qui en sont les auteurs devaient se résigner purement et simplement à l'affront. Un peu de respect, de respect humain, serait le bienvenu !! GERARD CLERY. Quimper le 27 janvier 2013

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