Mark Knopfler : un concert aux accents très celtiques

Musique publié le 29/06/10 19:20 dans musique par Gérard Simon pour Gérard Simon
Extrait Culture et Celtie

« Comme dans un fauteuil »... un concert aux accents très celtiques !

Mark Knopfler au Royal Albert Hall de Londres.

Nous sortons de la gare de Saint-Pancras, en plein centre de Londres. Nous nous rendons d'un pas rapide vers notre hôtel dans le quartier de Paddington. A peine le temps de déposer nos bagages que nous voici, déjà, traversant, sous le soleil, avec une excitation certaine, Hyde Park.

Sans nous presser, puisque nous avons tout le temps, avant le concert qui débute à 19 h 30, nos pas nous amènent, tout naturellement, face au très solennel Royal Albert Hall dont le dôme, de 41 mètres, surplombe Kensington Road et l'alentour de manière imposante.

Telles des oriflammes ondulant au vent léger, des banderoles suspendues sur la façade de l'entrée principale du majestueux théâtre, nous rappellent que Mark Knopfler, jouera « sold out » devant plus de 5.500 spectateurs, chaque soir, et ce durant 6 jours !...

Heure « H »…

Nous sommes invités à pénétrer dans cette prestigieuse enceinte dont la vaste salle circulaire est parée par ses multiples loges et balcons habillés de velours cramoisi. Les dorures aux arabesques raffinées ornementent ce très « royal décorum » tout entier dédié à la musique, sous toutes ses formes. Un grand orgue, le second d'Angleterre, par son importance, surplombe la scène, lui conférant la noblesse d'une cathédrale.

Voici bien un endroit digne, par son grandiose esthétisme et son acoustique, d'accueillir l'un des plus brillants auteurs-compositeurs interprètes du Royaume Uni, d'origine... écossaise !

Après un brouhaha contrôlé et quelques applaudissements épars invitant l'artiste à nous rejoindre, le silence inonde progressivement cette majestueuse arène. Une lumière d'un nocturne bleuté caresse les instruments. Les musiciens entrent en scène sous les ovations, bientôt suivis par Mark Knopfler. Le très flegmatique et charismatique « guitar hero » de feu Dire Straits, salue les spectateurs. Si Knopfler n'a jamais eu le soucis de l'élégance vestimentaire, ce soir, l'artiste dérogera, un peu, à la règle : Jean's et Tee shirt sombres, boots de cuir léger, sur-chemise bleue nuit parsemée de minuscules motifs clairs en étoiles, du plus bel effet, viennent capturer subtilement les éclairages.

Très naturellement, comme il le ferait chez lui, Mark s'installe confortablement sur le siège campé bien au centre de la scène. Nous vous avions bien titré : un concert, « comme dans un fauteuil ». Ses doigts effilés effleurent, l'espace d'un instant, la rutilante Stratocaster rouge qui fit sa renommée internationale dans les années quatre-vingts.

Les premières notes du morceau intitulé « Border Reiver », issu de son dernier et remarquable album « Get Lucky » s'égrènent délicieusement. Outre ses talentueux et fidèles accompagnateurs, l'intervention fluide, au whistle, de Mikaël Mac Goldrick. vient se mêler, avec beaucoup de délicatesse, aux subtils arpèges de Mark, à

la guitare. Cette fusion instrumentale nous révèle, immédiatement, quelle sera la tendance musicale de la soirée : celtisante !

« Border Reiver » est le nom que l'on donnait, jadis, aux célèbres pirates qui, écumaient les frontières anglo-écossaises, voici des siècles. Par analogie, cette jolie « ballade » aux couleurs celtiques, narre les aventures d'un vieux routier vêtu de son inénarrable blouson de cuir noir dont la vie « routière », était une incitation au voyage pour le futur guitariste qui, à l'époque, menait une existence paisible certes, mais bien trop monotone à son goût, à Glasgow.

Si la planète Terre trembla, et de belle façon, voici quelques vingt ans, sous le « son » incomparable de Dire Straits, à présent, les compositions de Mark Knopfler semblent s'exhaler des Monts d'Écosse, terre natale du compositeur où il puise, désormais, son inspiration folk celte qui fit, naguère, le charme de ses musiques de films mais que l'on retrouve dans son actuel et très peaufiné opus.

Nombre de morceaux du concert viendront confirmer nos dires quant à cette forte influence. Le compositeur ne joue pas dans le même registre que la plupart des autres chanteurs. Il va de son côté et les autres du leur, mais l'artiste pense que le « jeu qu'il pratique a toujours sa place ». Et quelle place il occupe, en effet !

Sa voix chaleureuse et bluesy se fond naturellement dans la nonchalance de ses nouvelles compositions aux sonorités si originales et celtiques.

Avec son style unique de jeu « aux doigts », et non au médiator, ce gaucher à la virtuose main droite ponctue ses effets, ses gimmicks, ses riffs, son picking si particulier, en effleurant les cordes de ses différentes guitares : National irisée de lumières multicolores, LP 58, Stratocaster 54, Pensa Suhr flamme, Martin. Mark Knopfler règne sur scène de toute sa surprenante vélocité qui échappe aux règles classiques de la guitare.

Des éclairages léchés d'un bleu profond auréolent les musiciens. Concentré, ou le regard dans le vague, Knopfler déverse dans la souveraine salle du Royal Albert Hall ses mélodieux soli qui portent indéniablement « sa signature ».

« Sultan of swing », « Telegraph Road », sans doute le plus beau solo de toute l'histoire guitaristique, et le final symphonique de « Speedway of Nazareth », confirment que Mark Knopfler demeure l'incontestable « Prince de la six cordes ».

Même si Mark continue de jouer en public ces titres incontournables et liés à l'aventure Dire Straits, c'est la musique « celtisante », très présente tout le long du concert, qui emporte la préférence de Knopfler.

Ne déclarait-il pas, voici quelques jours, à un journaliste, peu avant le début de sa tournée :

« La cornemuse a toujours évoqué quelque chose en moi, et ayant grandi à Glasgow, puis à Newcastle chez ma grand-mère, il y avait des disques de Jimmy Thand, le son de la musique celtique m'a toujours été très familier.

Dès que je commence à écrire sur mon passé, l'humeur de mes chansons est souvent mélancolique et ce sont ces influences qui ré-émergent immédiatement. Je ne le fais pas exprès, ça me vient naturellement. Depuis mon enfance, j'ai été bercé par cette musique, du coup c'est normal pour moi de puiser à la source ».

L'accordéon, le banjo de Richard Bennett, et l'Uillean Pipe, très présent, de Mickaël Mac Goldrick versant ses torrents de larmes, nous le rappelle tout au long de la soirée. « Done with Bonaparte » nous raconte la complainte d'un jeune soldat enrôlé dans les troupes du Petit Caporal qui rêve de retrouver sa « belle France » et notamment les chers paysages de sa Bretagne.

On ne quitte pas la Celtie. Le groupe méduse l'assistance par un « Jig » très endiablé qui vient clore, en apothéose, la première partie du spectacle. Toute la salle est debout et le public vient, dans une muette contemplation et avec beaucoup de discipline, se placer face à l'artiste souriant qui joue, ce soir, au Royal Albert Hall comme dans son salon particulier.

Un émouvant « Brothers in Arms » nous rappelle les drames humains générés par tous les conflits.

Mark revient, en final, sur scène avec une émouvante interprétation de « Piper to the end » écrite en hommage à son oncle Freddy, joueur de cornemuse au 1er Bataillon Tyneside Scottish, célèbre Royal Highland Piper, mort à tout juste vingt ans, à Ficheux, près d'Arras en mai 1940, alors qu'il débarquait avec son inséparable instrument.

Comme dans un pub irlandais, un verre de bière à la main, le groupe salue un public comblé. Nous étions bien, ce soir, en terres celtes !...

Textes et photos : Anny Maurussane – Gérard Simon

Sonothèque extraits en public : Isabelle Bremer

Article publié sur Culture et Celtie, le MAGazine.... (voir le site)

Mark est actuellement en tournée européenne, dont pour la France :

Le 21 juillet 2010 au Théâtre Antique de Fourvière à Lyon

Le 22 juillet aux Arènes de Nîmes.

Il sera accompagné de ses musiciens habituels :

Guy Fletcher, Danny Cummings, Richard Bennett, Glenn Worf, Matt Rollings,

… et du grand joueur de Uillean Pipe : Mickaël Mac Goldrick !


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