Ce sont les travailleurs de l’ombre. Ils collectent, photocopient, numérisent ou scannent la gigantesque matière de Bretagne. Bénévolement, ils donnent gratuitement accès à des milliers de documents des revues introuvables, des sources de première main, des livres difficiles à dénicher dans des librairies officielles. Leur ambition ? Mettre librement à disposition toute la matière de Bretagne, en français, en gallo, en breton. Sans jugement, sans commentaire. Qu’elle soit jugée favorable ou pas. De la matière. Brute.
Dans une indifférence quasi générale, cette gigantesque aventure portée par l’IDBE (l’Institut de Documentation Bretonne et Européenne) est sans doute un des événements bretons les plus importants de ce début du XXIe siècle. Cela fait plusieurs années que l’aventure a commencé. Elle permet aujourd’hui d’en arriver au 10 000e document scanné. Avec déjà une matière colossale. On y déniche ici des classiques, là de réelles pépites, des revues oubliées, des textes improbables, des impasses dans la pensée ; quelques tapuscrits ou documents uniques, parfois des documents confidentiels, rarissimes ou très difficilement trouvables. Par exemple dans l’onglet « revue, journal, périodique » d’une richesse déjà phénoménale. C’est un véritable travail de titan tant la matière bretonne abonde, avec un site dans l’ensemble très bien organisé.
Les recherches sont possibles par auteur avec déjà près de 2000 patronymes et écrivains. Mais aussi par thème (agriculture, politique, art, économie, littérature, chants et danses, histoire, droit des minorités diaspora, sports, science, territoires, etc.) et donnent parfois accès à des sous-thèmes. Ainsi, l’onglet intitulé « breton » ouvre sur une arborescence « théâtre en breton », « poésie », « civilisation bretonne », « nouvelles en breton », met gratuitement à disposition pour l’apprentissage éventuelle des « méthodes », des « grammaires », etc. Une autre entrée est proposée par type de documents (actes administratifs, livres avant 1860, décret, opuscule, monographie, calendrier, guide, etc.). Et les deux derniers onglets isolent les nouveaux documents scannés ou proposent une recherche libre, parfois très utile, à partir de mots-clés. En naviguant au hasard, on tombe parfois par hasard sur des documents inédits, improbables, étonnants. La richesse du site facilite à l’heure du numérique une entrée facile et commode vers la matière bretonne, aide à la démocratisation du savoir, va aider aussi d’autres travaux universitaires, de recherches et permettre de nouvelles études plus riches, plus critiques et approfondies.
Un seul mot : bravo pour ce site généreux. Bravo pour cet immense travail qui met à disposition des écrits de toutes sortes, une littérature foisonnante et parfois oubliée. Bravo aussi pour offrir une matière brute, des sources de première main, en permettant aux gens de faire eux-mêmes le tri, en les laissant s’imprégner d’une matière impressionnante. Bravo surtout d’aider au souci de l’éducation à la matière de Bretagne. On sait que l’histoire ou même la géographie bretonne sont très peu enseignées par l’éducation nationale. La Bibliothèque numérique bretonne et européenne comble un immense vide. Est déjà une base essentielle pour retrouver des écrits majeurs, en revenir aux origines, remettre des documents dans leurs contextes, avoir librement accès à la matière du pays. Un site au final généreux. Uniquement généreux. Aux Bretons, s’ils le souhaitent de s’y intéresser et éventuellement de soutenir une véritable œuvre qui peut accompagner et amplifier la passion qu’ont déjà les Bretons pour leur pays.
Le site de l’IDBE en ligne :
Jean Ollivro, Bretagne Prospective
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