Lettre ouverte à Monsieur le président de la République Française, François Hollande, et à Monsieur le Premier ministre du gouvernement français, Emmanuel Valls :
Messieurs,
Nous sommes aujourd'hui réunis à Rennes dans le calme et la dignité, pour marquer notre soutien à travers une marche silencieuse, à nos quatre compatriotes bretons et Bonnets Rouges, détenus en détention provisoire dans l'attente de leur procès du 15 mai prochain.
Nous sommes convaincus de l'aspect politique de cette détention, de la volonté de casser l'image des Bonnets Rouges en Bretagne, et celle de répondre concrètement par la répression à notre demande démocratique : onze revendications qui n'auraient jamais eu lieu d'être, si la France avait été le pays fondateur des Droits de l'Homme qu'elle prétend être.
Dans ce cas effectivement, la France n'aurait jamais pillé la Bretagne comme elle le fait depuis cinq siècles !
La France n'aurait jamais utilisé les Bretons comme chair à canon dans toutes ses guerres coloniales et internationales !
La France n'aurait jamais mis fin de façon autoritaire et unilatérale au parlementarisme breton, qui avait pourtant perduré depuis l'annexion de la Bretagne par François Ier jusqu'à sa négation pure et simple sous la Révolution !
La France n'aurait jamais interdit de parler les langues bretonne et gallèse dans les écoles de la République, et les aurait même officiellement reconnues, afin de faire des Bretons de parfaits bilingues ou trilingues, plutôt que des apatrides linguistiques !
La France n'aurait jamais laissé en place la partition de la Bretagne, à la Libération de 1945, alors que les Bretons avaient été les premiers à rejoindre massivement le général de Gaule dans la France Libre à Londres !
La France n'aurait pas décidé d'infantiliser les Bretons au point de tout décider à leur place au quotidien, et bien souvent contre leurs intérêts et leur volonté !
La France n'aurait jamais imposé des portiques écotaxes à un peuple de marins, d'agriculteurs et d'artisans excentrés, que la distance pénalise sur les débouchés de leurs produits alimentaires, transformés ou manufacturés !
La France en ce domaine aurait compris que le problème de pollution ne vient pas des moteurs au gaz oil des camions, bateaux et engins agricoles, mais des lobbies pétroliers qui imposent cette combustion polluante, au détriment des solutions propres aux brevets déjà existants !
La France n'aurait pas arrêté en garde à vue puis en préventive, des résistants bretons oeuvrant dans l'intérêt général, dans l'esprit de la résistance aujourd'hui médaillée de 39-45 !
La France aurait compris et agi en conséquence !
Nous vous posons donc la question, monsieur le président de la République française et monsieur le Premier ministre : êtes-vous réellement à la tête du Pays des Droits de l'Homme, ou bien est-ce seulement une conception vide de sens qui vous permet, aux yeux de tous, de continuer à assujettir un peuple dans l'interdiction de son droit inaliénable à s'épanouir, par lui-même et pour lui-même, avec le fruit de ses impôts, dans sa conscience bretonne, son patrimoine culturel, historique et linguistique, et dans son génie particulier qui dans un système fédéral trouverait les bonnes solutions à ses problèmes ?
Nous vous posons la question, monsieur Hollande et monsieur Valls, voulez-vous poursuivre sur la voie de la répression et du conflit, contre les intérêts bretons, ou bien voulez-vous enfin entendre la voix de notre peuple souffrant, dans ses revendications justes et démocratiques ?
Personne ne prendra les mesures qui s'imposent à votre place, mais nous nous permettons juste, en tant que Bretons et citoyens administrativement français, de vous dire qu'actuellement l'Histoire vous regarde, et nous attendons tous de savoir si vous voulez y rentrer par la grande porte, ou bien, comme tous vos prédécesseurs en matière bretonne, vous abstenir !
Le Peuple Breton bat d'un seul coeur et n'a qu'une seule parole : si vous savez l'écouter et le reconnaître, il sera reconnaissant et saura vous soutenir.
Le choix de la décision vous appartient, en votre âme et conscience : pour ou contre la liberté de nos prisonniers politiques, pour ou contre nos intérêts bretons en tous domaines, pour ou contre le soutien breton à la République française… ?
Nous donnons maintenant la parole à un de vos grands poètes français, Victor Hugo, dont la mère Sophie était Nantaise d'origine : « La Bretagne est une vieille rebelle. Toutes les fois qu'elle s'est révoltée pendant deux mille ans, elle avait raison. Contre les Romains ou les Francs, contre la Monarchie ou la Révolution, contre les gouverneurs du Roi ou les représentants de la République, c'est toujours la même guerre que la Bretagne a faite, la guerre contre l'étouffante centralisation ».
Messieurs François Hollande et Emmanuel Valls, nous espérons avoir été entendus, et nous nous permettrons non pas de vous juger sur vos paroles ou vos silences, mais bien sur vos décisions concrètes prochaines, concernant la Bretagne et les Bretons, notre économie, notre culture, notre réunification, et bien sûr la libération très prochaine de nos quatre compatriotes embastillés pour une juste cause !
A Rennes, le 8 mai 2014.
Le Comité des Bonnets Rouges Unis et Solidaires.
■Il est plus facile d'accuser Paris, Bruxelles que de regarder ses propres manquements et ses erreurs.