Le Tribunal constitutionnel (TC) de Madrid a validé l'essentiel du nouveau statut d'autonomie de la Catalogne voté par le parlement catalan en 2006, puis approuvé par référendum en Catalogne, finalement voté au parlement de Madrid.
Saisis par le PP (le parti espagnol de droite), les hauts magistrats du tribunal de Madrid ont par contre déclaré 14 articles (sur 114 litigieux), «anticonstitutionnels». Parmi eux, le concept de «nation catalane», un point crucial aux yeux des partis nationalistes catalans. Pour les juges de Madrid, la Catalogne serait une nationalité (*), pas une nation. À leurs yeux et selon la Constitution espagnole, seule l'Espagne peut prétendre être une nation.
Le TP a aussi invalidé la référence au caractère «préférentiel» de la langue catalane, co-officielle dans la région.
Les partis politiques catalans ont vivement réagi et une grande manifestation est prévue le 10 juillet à Barcelone. Les observateurs font remarquer que cette décision du TC ne fera que booster le vote pour les partis nationalistes lors du vote pour les législatives régionales en novembre prochain. Un référendum pour l'indépendance est aussi prévu bien qu'aucune date n'ait été spécifiée.
(*) Le terme espagnol exact est «Nacionalidad» mais qui n'a pas la même signification que le français «nationalité» – qui est confondu le plus souvent en France avec le terme «citoyenneté». La citoyenneté définit l'appartenance à un État et aux droits et devoirs qui en découlent. Les juristes espagnols considèrent que l'Espagne est une nation composée de nationalités, où «nationalité» est défini comme le terme russe национальность : un groupe ethnique ou une communauté culturelle historique (c'est aussi la définition des Chinois). Autrement dit, le pouvoir central espagnol, comme d'ailleurs le pouvoir central français et chinois, quoi que de façons différentes, redéfinissent les mots pour des raisons politiques. Ces États se réservent le droit de se définir comme nation et de nier ce droit aux autres nations qui pourraient se trouver sur leur territoire.
Si, pour l'Espagne, il n'y a qu'une seule nation : la nation espagnole – mais avec des nationalités – pour la France, c'est plus simple, il n'y a même pas de nationalités (selon la définition espagnole) ou de minorités nationales (selon la définition européenne), il y a juste une nation phagocyte : la nation française. Pour aller plus loin, voir l'entrée wikipédia pour «nationality», bien plus objective que l'entrée «nationalité» ou même «Nacionalidad».
Philippe Argouarch
■Si nous avions le régime espagnol, ce serait déjà le paradis en comparaison de cette prison des peuples qu'est l'état français.