En septembre 2016, ABP était invitée sur l'Ile de Molène par l'Association des îles du Ponant (AIP). Son directeur, Denis Bredin, y avait lancé le programme d'autonomie énergétique et de la production d'énergies renouvelables dans les îles du Finistère. Le but annoncé alors, était que toutes les îles bretonnes atteignent une autonomie énergétique décarbonée, basée sur le renouvelable, d'ici 2030 (voir notre article).
Six ans plus tard, ABP est de nouveau invitée, cette fois sur l'île de Sein. Une occasion pour y dresser le bilan des progrès réalisés.
Ce qu'il se passe sur ces îles de la mer Celtique est important car ce sont les fondations vers un nouveau système décentralisé de la production d'énergie. Au 21e siècle, l'énergie sera produite localement par tous et partout et pas seulement sur les îles. Oui, partout sur le continent dans le monde rural, il y aura des panneaux solaires, des éoliennes et même des moulins à eau, voire des moulins à marée. Le tout sur un immense réseau intelligent horizontal ou smart grid.
Les îles sont parties de loin car il y a 10 ans, 100% de l'électricité des îles du Finistère étaient générés par des groupes électrogènes alimentés au fuel importé du continent. Les groupes sont fortement émetteurs de CO2 et les coûts de production du Kwh dépassent largement ceux du continent.
EDF a été très lente à comprendre les enjeux au vu de son passé, c'est-à-dire l' héritage d'un monopole, d'une philosophie calquée sur l'environnement hyper-centralisé français héritée de l'époque de l'électrification du pays genre Ve plan. Un exemple est Saint-Pierre et Miquelon, une autre île atlantique. En 1977, la production électrique indépendante de l'île est nationalisée et l'EDF s'en empare. En 2014 les 10 éoliennes sur l'île de Miquelon son abandonnées et sont démantelées définitivement en 2021. Ces faits sont rapportés par des habitants de l'île de Sein, très méfiants à l'égard d'EDF. Ils se sont regroupés au sein d'une association pour faire bouger les choses, Île de Sein Energies (IDSE). IDSE pense que le retard pris dans le développement des renouvelables sur les îles est entièrement la faute d'EDF. EDF, propriétaire du réseau de distribution sur l'île, aurait bloqué toutes les initiatives des habitants.
Malgré une certaine défiance des îliens, membres de IDSE ou pas, on ne peut que constater que les choses ont avancé et EDF, qui est aujourd'hui partenaire dans bon nombre de projets, a joué un rôle déterminant. L'État, le Département et la Région ont investi des centaines de milliers d'euros. Selon AIP, le montant total des subventions pour des projets s'élève à 438 000 euros et le montant total des investissements à environ 1,5 million.
L'isolation de l'habitat (300 bâtiments en tout), la distribution d'ampoules LED à basse consommation (9000 en tout), la synchronisation des activités énergie dépendantes avec les pics d'énergie produits, la suppression progressive des chaudières à fuel et des appareils électroménagers énergivores, ont fait diminuer la consommation. Sur chaque île, un EMS (Energy Managment System), un moniteur tout informatisé, permet de suivre la production et la consommation d'énergie en temps réel. En tout ce sont 2000m2 de panneaux solaires qui ont été installés sur les trois îles de la mer d'Iroise : Sein, Molène et Ouessant. Chaque île est aussi dotée d'un système de stockage à base de batteries et d'onduleurs pour produire du courant alternatif.
La consommation de fuel de l'île de Sein est passée de 400 tonnes par an à 300 tonnes grâce à la diminution de la consommation et au photovoltaïque. L'île de Sein aura bientôt une éolienne, en 2024. C'est ce qui a été annoncé mercredi dernier sur l'île lors de l'incorporation, devant la presse, de la société Enez Sun Énergies par Didier Fouquet, maire de l’île de Sein, Jean-Philippe Berton, délégué régional d’EDF en Bretagne, et René Souben, vice-président du Syndicat Départemental d'Énergie et d'Équipement du Finistère (SDEF). La société sera chargée de porter l’installation d’une éolienne de 45m de haut. EDF sera le maître d'oeuvre. Cette éolienne s'ajoutera donc à la ferme photovoltaïque qui produit déjà 15% de l'énergie de l'île. Avec l'éolienne, la production d'énergie devrait atteindre 65% selon AIP (association des îles du Ponant). A noter que le permis de construire avait été déposé en 2018 et que toutes sortes de problèmes administratifs ont retardé le projet. On a interdit de construire l'éolienne près du phare au bout de l'île. Elle sera finalement construite près de la décharge publique à 300m des habitations alors que le phare est inhabité.
Molène a installé plusieurs sites de production photovoltaïque. Le but est d'atteindre 30 % d’énergie renouvelable dans son mix énergétique d’ici 2023, puis 70 % en 2028, Molène envisage d’équiper son [[impluvium]] - une installation permettant de récolter l’eau de pluie et d’alimenter les habitations de l’île en eau potable – de panneaux solaires. 4 500 m2 de panneaux voltaïques devraient bientôt être installés sur cet ouvrage en béton par le syndicat d’énergie du Finistère, pour une mise en service prévue fin 2023. Des études ont été conduites qui montrent que la qualité de l'eau captée n'est pas affectée par les matériaux de surface des panneaux.
L'entreprise quimpéroise Sabella avance avec l'installation d'hydroliennes à Ouessant. Le prototype H10, d'une capacité de 1MW, a été remis en marche et produit en ce moment de l'électricité lisse (c'est-à-dire une énergie régulière, sauf à l'étal bien sûr) depuis juin 2022. Deux hydroliennes de production seront bientôt installées par Sabella si tous les tests sont concluants.
Au final il devrait y avoir sur Ouessant, deux hydroliennes Sabella de 15 mètres de diamètre et 500 kW chacune, une éolienne de 0,9 MW et un parc solaire photovoltaïque de 480 kW.
La représentante de Sabella a par contre avoué que des problèmes de financements existaient concernant les hydroliennes.
■Ils y ont peut-être pensé...sans nul doute, n'est ce pas?