Durant son histoire, la Bretagne a contribué plusieurs fois à « faire » des rois. Parfois il ne s'est agit que d'un coup de main, en d'autres circonstances, ce fut un coup de maître. L'histoire bretonne souvent narrée sous l'éteignoir de l'histoire officielle hexagonale, cette marâtre jalouse, est en réalité chatoyante, épique, et n'a rien à envier à celle d'Ecosse que le cinéma à souvent mis en scène. Il a manqué à notre pays un Shakespeare qui sût nous conter la gloire de nos armes, les passions et les drames, les avanies du peuple. Mais venons-en aux faits.
Clovis
Déjà son père Childéric avait eu maille à partir avec les Bretons, parmi les derniers défenseurs de l'Empire finissant. Il est probable que le siège de Paris, du temps de sainte Geneviève, fut levé pat l'action conjointe des Bretons et des «Impériaux» et Childéric fut obligé de se replier en Thuringe. Rhiotime, alias Ambrosius Aurélianus, fut un moment «roi des Francs et des Bretons armoricains» de même qu'un Gradlon, selon le cartulaire de Landevennec. Ce Rhiotime aurait régné des deux côtés de la Manche tout comme Riwal, Conomor et Daniel Drem Rud. Plus tard, Clovis ne pouvant battre les Wisigoths en même temps que les Bretons, il lui fallut traiter avec ces derniers et négocier la paix (vers 497) par l'entremise de saint Melaine, de Rennes, et de saint Paterne de Vannes; il dut aussi, condition du traité, se convertir au christianisme; aussi c'est sous la pression amicale des Bretons qu'il passa de l'état de païen à celui de croyant ! De ce moment date l'effondrement des Wisigoths.
Guillaume le Conquérant
En 1066, Guillaume partit à la conquête de l'Angleterre. Durant la bataille de Hastings, les Bretons occupent l'aile gauche de son armée. Le succès de Guillaume doit beaucoup à ces hommes. Arrivés avec le futur roi d'Angleterre, ils se taillèrent de beaux fiefs, tels Brian de Penthièvre, Alain Le Roux (Rufus) de Richmond, l'un des plus riches barons anglais, Raoul de Gaël, Geoffroy de la Guerche, Juhel de Totnes, et plus tard, Alain Fitzcont et Guillaume Fitzalan. Après les Normands, les Bretons furent les principaux possesseurs de fiefs en Angleterre, ils revenaient donc en vainqueurs dans ce pays anciennement ravagé par les Saxons, au temps du « roi » Arthur. D'après le Domesday Book, grand inventaire de l'Angleterre, les seigneurs bretons possédaient près de 20% des fiefs, 37% en Cornouaille, juste après les Normands et devant Saxons et Picards.
Henry I
Lors de la succession de Guillaume le Conquérant, Henry I prit le dessus sur son frère Robert, à la bataille de Tinchebray (1106). Il y fut puissamment aidé par un millier de chevaliers bretons réunis sous la bannière d'Alain Fergent, duc de Bretagne. En 1086, cet Alain Fergent fit lever le siège de Dol par Guillaume le Conquérant et lui confisqua un butin de 15000 livres. Son fils, Brian Fitzcount, fut un puissant baron anglo-breton. Beaucoup des «hommes nouveaux» d'Henry I venaient du Cotentin et du nord-est de la Bretagne. Ils firent carrière dans l'administration ou comme shérifs. Henry I a montré une faveur marquée pour ces bretons de la région de Dol où il avait fui au cours du siège du Mont-Saint-Michel. L'un de ceux qui profita de la chute des Montgomery et des grandes barons normands, fut Guillaume FitzAlain, fils d'Alain FitzFlaad (de cette famille bretonne est issue la dynastie des Stuart).
Plus tard, ces Bretons de Haute-Bretagne prirent le parti de la fille d'Henry I, Mathilde l'Empresse, contre Etienne de Blois. Brian Fitzcount, fils d'Alain Fergent, fut leur champion et permit largement l'accession au trône d'Henry II et des Plantagenêts. Décidemment les Blois n'eurent pas de chance avec les Bretons. Charles de Blois, dévot, «bienheureux» et auteur du massacre de Quimper en 1345 (Froissart) fut tué à Auray durant le guerre de succession de Bretagne.
Arthur de Bretagne (1187–1203)
Rappelons aussi qu'à la mort de Richard Cœur de Lion, les coutumes angevines désignent, son neveu, Arthur de Bretagne, comme héritier du trône d'Angleterre, Shakespeare en parle abondamment dans « le Roi Jean ». Il aurait été assassiné par Jean sans Terre en 1203.
Henry de Lancastre (Henry IV)
Dans le drame historique Richard II, où il raconte le détrônement de ce roi par Henry de Lancastre, qui devint le roi Henry IV en 1399, Shakespeare fait dire à Northumberland, l'un des mécontents qui attendaient en Angleterre le débarquement de l'usurpateur : « De Port le Blanc, une baie de Bretagne, j'ai reçu avis que Harry duc d'Hereford, Reignold, lord Cobham etc. tous bien équipés par le duc de Bretagne, avec huit grands vaisseaux et 3000 hommes de guerre, se rendent ici en toute diligence » (Acte II, scène 1), La Borderie.
Bertrand d'Argentré écrit, en 1386, «le duc de Lancastre remonta sur ses vaisseaux …des capitaines bretons firent partie du voyage» et Albert Le Grand, en 1393, «le Prince Pierre, comte de Montfort, reçut le Sacrement de Confirmation par les mains de nostre prélat, qui lui changea son nom et l'appela Jean (Jean V de Bretagne) et la même année le duc équipa une flotte de navires au Morbihan et y mit des soldats et munitions qu'il donna au duc de Lancastre son neveu, lequel au moyen de ce secours conquit le Royaume d'Angleterre». En effet, en 1399, Henry de Lancastre débarque secrètement dans le Yorkshire et vainc le roi Richard II, qui abdique. Jeanne de Navarre, l'épouse d'Henry IV était précédemment la femme de Jean IV, duc de Bretagne.
Owen Glendower (1359,1416)
Après avoir soutenu Henry IV d'Angleterre contre Richard II, la. Bretagne soutint Owen Glendower dans sa lutte pour l'indépendance. Ce fut le dernier prince de Galles d'origine galloise. Il y eut un traité et une aide franco-bretonne. En juillet 1403, l'amiral de France, avec 120 bateaux et 1200 hommes, partit de Brest, débarqua à Haverfordwest et causa de nombreux dégâts, puis il se joignit à Glendower à Tinby,
Norman Longmate. Une force galloise et franco-bretonne mit le siège devant le château de Kidwelly. En 1403 toujours, les Bretons battent les Anglais dans le chenal et dévastent Jersey, Guernesey et Plymouth tandis que les Français atterrissent sur l'île de Wight. Les alliés débarquent à Milford Haven au pays de Galles et rencontrent l'armée anglaise près de Worcester. En.wikipédia.
Charles VII et le connétable Arthur de Richemont
La guerre de cent ans commença par la guerre de succession de Bretagne et finit à la bataille de Formigny et à Castillon où, à chaque fois les troupes bretonnes firent merveille. Il n'est pas exagéré de dire que lorsque la Bretagne mit ses forces du coté de la France, le sort des Anglais fut scellé, car selon Jules Michelet, de tous temps « la meilleure arme de la France contre la Grande Bretagne avait été la Bretagne ». Peut être les bretons auraient-ils du mettre fin au règne de Charles VII, ce roi pusillanime et médiocre, mais comment choisir entre le marteau anglais et l'enclume française ? L'homme qui libéra Paris et réorganisa l'armée française, méritait une statue dans la capitale et plus de reconnaissance dans les manuels, mais que faire contre la jalousie ? il reste que, « Parmi les hommes célèbres du règne de Charles VII, … s'il en est un qui mérite d'occuper à côté de Jeanne d'Arc le premier rang, on peut affirmer, tout bien pesé, que c'est le connétable de Richemont » Ernest Lavisse. « Du Guesclin, Clisson, Arthur de Richemont, les plus grands capitaines du moyen âge, sortirent du duché de Bretagne, Vies des grands capitaines français du Moyen Age, par Alexandre Mazas ». Le connétable fut ensuite duc de Bretagne. «Le connétable de Richemont était le seul homme qui prit à cœur les intérêts de la monarchie et songé à sa défense, Histoire des français. XIII. 1422-1456 par J. C. L. Simonde de Sismondi»
Henry Tudor (futur Henry VII)
A l'avènement d'Edouard IV, le jeune Henry s'enfuit en Bretagne et y passa la majeure partie de son temps, les 14 années suivantes. Il parlait breton ! En 1483, sa mère promut Henry comme alternative à Richard III. À la cathédrale de Rennes, le jour de Noël 1483, Henry promit d'épouser la fille aînée d'Édouard IV, l'héritière Elizabeth d'York et il «déclara publiquement sa détermination à saisir la couronne britannique», Norman Longmate. Henry reçu ensuite l'hommage de ses partisans. Il tenta de débarquer en Angleterre mais son complot fut découvert. «Cette première expédition fut financée par François II, à hauteur de 10 000 couronnes, 15 vaisseaux et 5000 hommes», Norman Longmate. Il réussit ultérieurement à saisir le pouvoir et, en 1485, devint Henry VII d'Angleterre.
Marie Stuart
En 1570, l'ambassadeur d'Angleterre à Paris prévint qu'on parlait d'une invasion de l'Angleterre (par Dumbarton) en préparation en Bretagne pour rétablir Marie Stuart sur le trône d'Ecosse, « Defending the Island, Norman Longmate ».
Jacques II
En 1688, après la «Glorieuse Révolution», le roi Jacques II d'Angleterre s'exile en France, sur un navire du malouin Phillip Walsh.
A sa suite, une importante colonie de jacobites Irlandais (dont les Walsh) s'installe en Bretagne, à Nantes et Saint-Malo où ils préparent la reconquête du pouvoir. Ces deux villes bretonnes seront les ports de départ des rébellions jacobites et la plupart des officiers jacobites de la guerre de la Ligue d'Augsbourg viennent de Saint-Malo. Des tentatives eurent lieu en 1708 et 1715 en Écosse, en 1741 en Irlande (dernière tentative de débarquement en Irlande), en 1745 en Ecosse.
En 1690 c'est de Bretagne, que le prétendant aux trônes d'Ecosse et d'Irlande, descendant des Stuart, embarque avant d'être défait à la bataille de la Boyne, en Irlande, par le prince protestant Guillaume d'Orange.
Charles Edouard Stuart (Bonnie prince Charlie)
C'est de l'estuaire de la Loire que partit, en 1745, le fils de Jacques II Stuart, Charles Edouard. Le jacobite nantais Antoine Walsh contribue à financer l'expédition. Pour ce faire il stocke quelque 11.000 mousquets dans l'un de ses entrepôts de Nantes. Bonnie prince Charlie souleva l'Ecosse, battit les Anglais à maintes reprises avant d'être écrasé à la bataille de Culloden. Traqué, il parvint à s'échapper, fut récupéré par le malouin Marion Dufresne et revint à Roscoff en Bretagne.
Références :
• Jean Ogée, Dictionnaire historique et géographique de la province de Bretagne
• Keats-Rohan 1991. The Bretons and Normans of England 1066-1154: the family, the fief and the feudal monarchy
• Léon Fleuriot, Les Origines de la Bretagne
• Abbé Poisson, JP le Mat, Histoire de Bretagne
• Norman Longmate, Defending the Island.
■voir un peu d'historique ,sur l'action bretonne au musée de guillaume le conquérant à Bayeux,quelques nobles bretons ont participé à l'épopée!
Très peu ont fait souche !( Guillaume n'a eu besoin que de ses normands!
C'est très intéressant et cela demande à être développé!
Car selon, l'histoire de «France» officielle, Clovis est devenu chrétien car Dieu lui avait fait gagner la Bataille de Tolbiac!
Si vous regardez le Wikipédia français, les bretons (sauf erreur) ne sont pas mentionnés, et pourtant ce n'est pas un secret qu'il a eu fort à faire avec nous, au point de changer de religion comme vous le souligné! Voir le site
En conclusion :
Si Clovis est devenu chrétien sous l'impulsion des bretons, il me semble que cela remet en cause toute le caractère «sacré» des rois de France, mais aussi les bases de leur histoire officielle!
Un mythe français qui s'effondre!