La crise actuelle en Bretagne est d'ordre économique, écologique, culturel, mais elle est aussi d'ordre symbolique : les Bretons prennent à nouveau conscience d'eux-mêmes. Ils « réfléchissent », c'est-à-dire qu'ils font, plus que jamais, « retour sur eux-mêmes ».
Ce n'est pas tant « comprendre leur passé » qui intéresse les Bretons (comme on l'entend dire ici ou là, à travers la référence à 1675), ni « trouver leur place » (dans un monde chaque jour plus absurde). C'est vivre que les Bretons souhaitent (la plus élémentaire des choses et qui est pourtant la plus difficile en ce début de 21ème siècle).
La philosophie (exercice symbolique par excellence, puisqu'elle permet justement « la réflexion » ou « le retour sur soi ») sert aussi à cela : à vivre. En effet, nous avons, plus que jamais, besoin de « reprendre nos vies en mains ».
Il est consternant, à l'occasion de cette crise bretonne, de constater, une fois de plus, un arrogant et autiste « point de vue français » sur les événements, à la fois replié sur lui-même et se développant impunément dans un total «manque d'esprit» (si la présence d'esprit se remarque déjà à la simple considération). Les Bretons seraient des « pollueurs » et des « naïfs » auxquels il faudrait expliquer plus qu'à d'autres, ou plus longtemps qu'à d'autres, certaines réalités.
L'écotaxe est une « mesurette » qui ne permettra pas d'enrayer la fonte des glaces et les Bretons ont eu raison de dénoncer la récupération qui en a été faite par l'Etat français (dont « les caisses », rappelons-le, sont « vides », ainsi que l'annonçait clairement, distinctement, et plutôt étrangement, en septembre 2007 le premier ministre de l'époque lors d'un déplacement en Corse).
Il est plus que temps, en 2013, que les Français se posent des questions sur leur rapport aux Bretons et qu'eux aussi « réfléchissent ». Car les Bretons ont des choses à leur apprendre et à leur faire comprendre. Ils pourraient commencer, par exemple, par relire leur philosophe favori : René Descartes (qui aurait sans doute encore été en vie en 1675 si le prêtre de l'ambassade française à Stockholm ne l'avait assassiné en 1650). L'année 2014, consacrée à Anne de Bretagne en Bretagne, devrait être propice à une telle relecture.
Simon Alain
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