C'est un de nos rituels de l'été, passer une journée à Quimper durant le festival de Cornouaille. Il est vrai que durant quelques années, nous avions fait l'impasse vu l'ambiance et la programmation quelque peu décevantes du rendez-vous quimpérois ; mais depuis 2 ou 3 ans, nous avons retrouvé ce plaisir de déambuler à travers les rues, les scènes et les expos de la capitale de la Cornouaille.
Et c'est entre amis que vendredi dernier nous avons entrepris cette nouvelle ballade culturelle en commençant par un lieu que je ne connaissais pas, la chapelle de l'ancien grand séminaire de Kerfeunteun, bâtiment imposant qui abrite désormais expositions et concerts. A noter ses vitraux qui représentent les principaux saints bretons. La chapelle abrite jusqu'au 16 août une exposition tout à fait originale avec 200 ½uvres de 35 artistes différents de Paul Bloas à Catherine Raoulas, de De Bellay à Jean Fréour dont une vingtaine d'½uvres sont présentées.
Jean Fréour (1919-2010), membre des Seiz Breur, a créé au cours de sa carrière près d'un millier d'½uvres la plupart sur commande. Inspiré par Rodin, Maillol, la Bretagne, Jean Fréour est l'auteur de plusieurs statues monumentales dont celle d'Anne de Bretagne, devant l'entrée du Château des Ducs de Bretagne à Nantes, La Paludière à Batz-sur-Mer ou Les Laveuses d'huîtres à Cancale ou encore La Rouërie à Fougères. C'est la première fois que je vois autant d'½uvres de Fréour ainsi rassemblées. A voir absolument.
Après cette première étape, retour au centre-ville à Quimper où, après de multiples tours et détours, l'on trouve enfin une place pour se poser, pas facile la circulation à Quimper en cette période....
Une nouveauté que j'avais déjà remarquée l'année dernière mais qui cette année a pris une nouvelle ampleur, c'est l'espace consacré aux produits alimentaires bretons situé désormais sur la place de la Résistance et qui avec une scène et le restaurant du festival forme l'Espace Gradlon. Cette présence de produits bretons et surtout cornouaillais est une excellente chose qui permet de mettre en valeur des productions à forte image culturelle, une illustration tangible des liens entre économie et culture. Autre point positif: l'espace «vert» consacré au développement durable.
Pour en revenir aux expositions, le passage par Locmaria est quasi obligé avec le Musée de la Faïence qui propose cet été une rétrospective Fouillen, Paul et son fils Maurice, créateurs atypiques dont le style est reconnaissable entre tous. A quelques dizaines de mètres de là, la fabrique Henriot a retrouvé une nouvelle jeunesse grâce à son nouveau propriétaire Jean-Pierre Le Goff. Les salles du rez-de-chaussée ont été rénovées et présentent au public les nouvelles créations des artistes de la faïencerie. Ce retour de la création est à saluer après quelques années de flottement et de production de décors à tendance folklorique. Je recommande les créations de Yann Kersalé tout à fait étonnantes. C'est un vrai plaisir de retrouver une grande maison Henriot (enfin !) .
Encore quelques mètres et c'est l'atelier du brodeur Pascal Jaouen qui propose jusqu'au 18 septembre une rétrospective de ses vingt années d'activités. Là aussi un grand plaisir devant ce talent et cette créativité issus de la tradition qui se trouve ainsi complètement revivifiée. Si vous passez au Festival Interceltique de Lorient, ne manquez pas le défilé de mode proposé par Pascal Jaouen le mardi 11 août autour du thème du Gwenn-ha-Du.
Avant de quitter Locmaria, jetez un ½il au jardin médiéval, juste à côté du Prieuré, une véritable réussite horticole, où l'on apprend plein de choses sur les plantes anciennes, y compris leur nom en breton.
Retour vers la place Saint-Corentin, en longeant l'Odet, les quais où s'alignent les stands d'artisanat et de productions bretonnes, globalement de bonne qualité et qui participent à cette ambiance festivalière.
Sur les conseils de Naig Le Gars rencontrée au détour d'un stand, nous voilà Chez Max, à la fois lieu historique (c'est là que vécut Max Jacob), restaurant et lieu d'expositions. Petit salon d'écrivains quimpérois et cornouaillais, l'occasion pour moi de redécouvrir la revue Hopala avec son directeur Alain-Gabriel Monot. Créée en 1999 par l'ami Jean-Yves Disez, Hopala s'inspirait de la revue galloise Planet alors dirigée par Ned Thomas. Parfois déroutante, Hopala offre une lecture de la Bretagne qui peut paraître un peu trop intellectuelle certes mais qui offre des ouvertures sur de nombreux aspects méconnus de notre pays. Bref, je m'y suis réabonné .....
L'occasion aussi de revoir Angèle Jacq et de parler littérature, actualités et politique. Toujours Chez Max, au premier étage, une exposition de photos de SdR sur la Bretagne. De superbes vues. Et de discuter avec l'auteur, Sophie de Roumanie, Roumaine de Carhaix, qui, à travers ses photos, déclame son amour pour ce pays. L'occasion aussi d'évoquer la Roumanie, le pays de son père, le Roi Michel, dernier roi de Roumanie, Sinaia, la station de villégiature au pied des Carpathes, avec ses trois châteaux royaux Peles, dont le premier construit à la fin du XIXe siècle a un lien avec la Bretagne : chaque pièce est meublée suivant le style de différents pays et la Bretagne y est représentée par une salle à manger du XVIIIe siècle. Étonnant, non ?
Le temps passant à toute vitesse, impossible de voir l'exposition du Musée des Beaux-Arts consacrée à Alexandre Séon ou celle du Musée Breton. Next time !
Toujours une ambiance du tonnerre place Saint-Corentin avec ce grand chapiteau où l'on apprend à danser, où l'on danse, où l'on écoute d'excellents groupes. Un des c½urs du Cornouaille Quimper.
Pour les amoureux de l'art et de la culture, il suffit de faire quelques pas derrière la cathédrale, rue du Frout, pour rendre visite à la Galerie de Bretagne, galerie qui propose notamment des ½uvres de Maurice Le Scouëzec, peintre du XXe siècle. J'ai particulièrement apprécié une peinture datant de sa période africaine réalisée au Soudan. A découvrir. Juste à côté, la galerie du peintre Yann Queffelec , à ne pas confondre avec l'écrivain. Étonnante, son utilisation des couleurs blanche et noire. A voir.
Avant de continuer plus avant, une pause restauration au Maharadja, quai de l'Odet, sans aucun doute le meilleur restaurant indien entre Quimper et Vannes... Une bonne introduction (une mise en bouche pour ainsi dire) pour le spectacle du soir, India Noz, avec Olli goes to Bollywood et Eostiged ar Stangala. Comme pour tout Lorientais qui se respecte, ce qui touche à l'Inde m'intéresse et l'affiche de ce spectacle mêlant l'Inde et la Bretagne a attiré immédiatement notre intérêt. J'avais déjà assisté au showcase d' Olli (en fait Olivier Leroy, un Breton tombé amoureux de l'Inde) il y a quelques années au Musée de la Compagnie des Indes de Port-Louis et avais apprécié ses interprétations bollywoodiennes. C'est donc avec un intérêt un peu interrogatif que nous nous dirigeâmes vers le Théâtre de Cornouaille pour assister à cette première mêlant Bollywood et Eostiged ar Stangala, le célèbre cercle de Kerfeunteun.
Passons sur la gestion assez nulle du flux de spectateurs et arrivons au spectacle. Après une introduction mêlant Olli et danseurs du cercle pas très convaincante, l'alchimie a pris petit à petit et l'enthousiasme a gagné les rangs du public devant cette fusion entre chants indiens et danses bretonnes particulièrement entrainante. Et une partie du public de se retrouver à danser y compris sur la scène au rythme d'un Tri Martolod version indi .... Incroyable ! Il fallait oser et Oli et les Eostiged l'ont fait, bravo ! Ce fut un vrai plaisir. Tout à fait digne d'un des principes du cercle quimpérois, «lutter contre la folklorisation» . A renouveler.
Jusqu'à présent, l'une des grandes différences entre les festivals de Quimper et de Lorient, c'était les «after» avec une ambiance assez chaude à Lorient et ...rien à Quimper. Et bien grâce à quelques courageux, la place de la Cozanie centrale, la place du Ceili, a connu son festival off qui a rencontré un grand succès avec une super organisation, grands écrans, retransmission web, plateau, soirées thématiques... Parfait pour terminer les soirées quimpéroises durant le festival.
Cette année, c'est évident, ça se confirme, Quimper est bien l'un des hauts-lieux de la créativité culturelle bretonne. Ce fut super fiskal !
Jacques-Yves Le Touze
Voir mon blog Tanwezhen (voir le site)
En dehors de la musique et des expos,
Ce que j'ai aimé : la place correcte de la langue bretonne (par rapport à d'autres festivals), correcte n'est pas idéale mais ce n'est pas trop mal.
Ce que j'ai moins aimé : le bazar sinon le foutoir au Théâtre de Cornouaille pour gérer l'afflux des spectateurs
■Toujours impressionnant. Les gens photographient.