«Si vous enfermez un adorable matou dans le coin d'une pièce en ne lui laissant aucune possibilité de s'échapper, il devient un animal agressif qui, toutes griffes dehors, va vous attaquer. Qui est alors responsable de cette agressivité? Le chat ou celui qui l'a mis dans cette situation sans issue?»
Les auditeurs opinent du chef et Abdullah Demirbas peut développer son argumentation :
«Le peuple kurde est un peuple pacifique qui souhaite vivre en paix avec tous ses voisins, et à commencer avec le peuple turc avec lequel il a créé la République de Turquie, mais il a droit à l'existence, comme tous les autres peuples de la terre, et si ce droit lui est refusé, si le droit de se défendre politiquement lui est interdit, qui est alors l'agresseur ? Le peuple kurde poussé à la lutte armée ou celui qui le met dans une impasse?»
Abdullah Demirbas, maire de Sür, arrondissement central de la ville métropolitaine de Diyarbakir, élu en 2004, destitué en 2007 pour avoir adopté le multilinguisme et proposer les documents administratifs en plusieurs langues (turc, kurde, syriaque et arménien), réélu triomphalement en 2009, incarcéré en décembre de la même année, libéré pour raison médicales en mai 2010, aux prises avec plusieurs procès, risquant la somme cumulée de 480 années de prison, ne pratique pas la langue de bois, ses interlocuteurs rennais ont pu le constater.
Abdullah Demirbas était en effet à Rennes, dimanche et lundi, 20 et 21 mai, pour apporter le soutien de la ville de Diyarbakir au concert organisé par les associations «Amara, Maison du Peuple kurde» de Rennes et les «Amitiés kurdes de Bretagne» pour financer des activités en faveur des enfants de Diyarbakir. Koma Azad, groupe très renommé de Diyarbakir, dont la venue fut incertaine jusqu'à l'ultime instant, pour des problèmes de visas, fit un «tabac» auprès du public rennais, kurde et breton. Ulas Kelasin, Ozan Ali Gül, Ozan Yüksel, Koma Carnewa Suleyman, contribuèrent aussi au succès.
La participation bretonne était assurée par le jeune et talentueux groupe Eien habitué des festoù-noz.
A l'issue du concert, Abdullah Demirbas rencontra Ana Sohier, conseillère municipale de Rennes, membre du bureau politique de l'UDB.
Il sera reçu, le lendemain, par le Maire de Rennes, Daniel Delaveau, entouré de ses adjoints, Roselyne Lefrançois et Frédéric Bourcier, et des membres de la direction générale des services techniques, et de l'Aménagement Urbain.
«L'amitié, la solidarité de la ville de Rennes est un bien précieux», a-t-il confié en répondant au mot de bienvenue du Maire de Rennes, président de Rennes Métropole. «Votre présence à l'une des audiences du procès et votre prise de position à la sortie du tribunal, ça nous a fait chaud au cœur. Dans le monde carcéral, l'écho de tels gestes est considérable. Le vœu municipal adopté à l'unanimité, le projet de réhabilitation du quartier gecekondu» (habitat précaire, bidonville) «de ben U Sen montrent que l'action se situe dans la continuité, non seulement celle des élus municipaux et des services, mais aussi celles des associations amis du peuple kurde»
Il rencontrera également les secrétaires des fédérations départementales du Parti communiste français, Wilfrid Lunel, et du Parti socialiste, Frédéric Bourcier, et trois autres adjoints au maire de Rennes, candidats aux législatives : Eric Berroche, pour le PCF, Nathalie Appéré et Marie-Anne Chapdelaine, pour le P.S.
Abdullah Demirbas, auprès de chacun de ses interlocuteurs, a tenu un langage direct, empreint d'humanité et de hauteur de vue, forçant à la fois sympathie et admiration :
«Les jeunes ne croient plus à la politique, mais à qui la faute ? Je suis membre du Parti pour la Paix et la démocratie, le BDP, je n'ai jamais porté une arme, je crois à la paix et j'ai la confiance de mes concitoyens qui m'ont élu maire à plus de 70% des votants. Mais je suis menacé de 480 années d'emprisonnement ; 7 000 de nos membres sont détenus, sans jugement parmi lesquels des députés, des maires, des maires adjoints, les présidents d'assemblées départementales et régionales, des cadres du parti. Mon fils n'a pas supporté que je sois incarcéré et s'est enfui, à 16 ans, <
Abdullah Demirbas qui n'est pas venu en battu a su, malgré une santé délicate, insuffler son dynamisme aux deux cents Kurdes de Rennes qui se pressaient pour l'écouter dans les locaux de Amara, et à ses amis rennais. Il leur a dit, ainsi qu'aux candidats députés et aux responsables politiques : «le changement, c'est maintenant».
Il a souhaité une autre politique de la France dans ses relations avec la Turquie qui prend en compte les revendications légitimes du peuple kurde :
«Il n'y aura pas de solution à la questions question sans une négociation politique avec les vrais représentants du peuple kurde, associant BDP, PKK et Abdullah Öcalan» [leader du Peuple kurde purgeant depuis 13 ans une condamnation à la prison à vie, et tenu au secret absolu depuis 10 mois].
«La France et l'Europe peuvent donner un signal fort en faisant la distinction entre lutte armée et terrorisme et en retirant le PKK de la liste des organisations terroristes [...] il n'y aura pas, non plus, de solution à la question kurde sans des changements constitutionnels profonds : les Kurdes ne sont pas séparatistes. Ils veulent une constitution démocratique qui leur garantit des droits en tant que peuple»
Le changement, c'est possible
Des différents échanges on peut retenir quelques orientations :
o Un groupe d'amitiés franco-kurde pourrait voir le jour à l'Assemblée Nationale.
o La France ne devrait plus encourager la politique répressive d'Ankara envers les Kurdes, et les accords sécuritaires passés entre Erdogan et Guéant, ministre de l'intérieur du gouvernement Sarkozy devraient être dénoncés.
o La reconnaissance du génocide arménien, le respect des droits humains, le respect des droits politiques, culturels et linguistiques et religieux de tous les peuples de Turquie devraient être autant de conditions non négociables pour l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne.
Courageux Abdullah Demirbas ?
«Je ne cherche pas à être héroïque. Je veux vivre en homme, debout, tout simplement».
André Métayer
dernière minute
Leyla Zana a été condamnée ce jeudi 24 mai à 10 ans de prison de prison par un tribunal de Diyarbakir pour « appartenance à une organisation terroriste » et « propagande ».
■«Abdullah Demirbas, maire de Sür, arrondissement central de la ville métropolitaine de Diyarbakir, élu en 2004, destitué en 2007 pour avoir adopté le multilinguisme et proposer les documents administratifs en plusieurs langues (turc, kurde, syriaque et arménien), réélu triomphalement en 2009, incarcéré en décembre de la même année, libéré pour raison médicales en mai 2010, aux prises avec plusieurs procès, risquant la somme cumulée de 480 années de prison, ne pratique pas la langue de bois, ses interlocuteurs rennais ont pu le constater.»
On n'en dira pas autant pour son voisin sur la photo, le maire de Rennes, qui semble-t-il tousse un peu quand il s'agit d'aider la langue bretonne, et et oposé à la Réunification de la Bretagne.
bref, rien que de l'habituel chez nos hommes politiques «bretons» ou «français» : on aime les causes un peu lointaine, et on combat les causes qu'on a directement sous la main, et dont on est directement responsable.
Ce serait bien qu'Ana Sohier mette un peu les points sur les «i» sur cette question..
Nous pourrions nous bretons écrire: «La reconnaissance du génocide britto-vendéen et des ethnocides des peuples originels de l'hexagone, le respect des droits humains, le respect des droits politiques, culturels et linguistiques et religieux de tous les peuples de l'hexagone devraient être autant de conditions non négociables pour le maintien de la France dans l'Union européenne.»
Les jacobins adorent voir la paille dans l'oeil du voisin sans voir la poutre dans le leur... Le centralisme à la française est un des dernier systèmes totalitaires d'Europe qui a su se parer du costume de «champion des droits de l'homme!» Un COMBLE !!