La nation catalane défie l'Etat espagnol, où certains sont nostalgiques du franquisme

Dépêche publié le 28/09/14 19:43 dans Politique par Christian Rogel pour Christian Rogel
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Le président de la Généralité de Catalogne, Artur Mas.

Quand trois-quarts des autorités locales indiquent qu'elles veulent qu'ait lieu une consultation populaire, quelle légitimité a un État de ne pas l'autoriser ? C'est pourtant, en Espagne qu'on invoque une constitution, déjà ancienne, pour ne pas même imaginer prendre en compte l'opinion des citoyens. Les derniers sondages montrent que plus de trois-quarts des Catalans veulent un référendum et que 58% soutiennent l'indépendance. Le slogan en vogue est « El dret de decidir » », parallèle à celui utilisé en Écosse (« Scotland decides »). L'Assemblea Nacional Catalana a collecté 750 000 signatures pour un État indépendant.

Hier, samedi 27 septembre, le président de la Généralité de Catalogne, Arthur Mas, qui n'a jamais prôné la séparation d'avec l'Espagne, a signé solennellement le décret de convocation des électeurs catalans pour le 9 novembre, mais, elles ne pourront avoir lieu que si les municipalités locales l'organisent. La veille, le Parlement de la Généralité de Catalogne avait voté par 106 voix contre 28 la loi permettant d'organiser cette consultation que le gouvernement et le parlement catalans estiment pleinement légale et démocratique. Les socialistes catalans ont voté pour une consultation, mais, désapprouvent le référendum dans le délai prévu par le gouvernement.

Mariano Rajoy, président du conseil espagnol, à peine revenu d'un voyage en Chine, a estimé, de la plus grande urgence de convoquer, ce dimanche 28, un conseil des ministres extraordinaire à seule fin de faire un recours devant le Tribunal constitutionnel, lequel peut laisser l'affaire traîner pendant des mois, voire des années.

Le fait que le Royaume-Uni n'ait fait aucune objection à la tenue d'un référendum, dont l'issue était binaire : indépendance ou statu quo (voir notre article) a affaibli la position espagnole, qui apparaît comme verrouillée sur des a priori qui ont déjà conduit à trois attaques sur Barcelone (1714, 1921, 1939). Quelques déclarations, encore isolées, de militaires espagnols ne permettent pas d'écarter totalement des bruits de botte. La question qui sera éventuellement posée aux Catalans est double : « Voulez-vous que la Catalogne soit un État. Si oui, voulez-vous que cet État soit indépendant ? ».

Artur Mas veut poser la question de la souveraineté de Catalogne, mais, ne propose pas l'indépendance, car sa coalition politique (CiU) n'est pas unanime sur cet objectif. Le premier parti de Catalogne, la Gauche républicaine catalane (ERC) demande l'indépendance depuis plus de 90 ans, il est possible que les refus de l'État espagnol amènent à une déclaration unilatérale de celle-ci, si les élections qu'Artur Mas pourra être contraint de convoquer donnent encore plus de voix à ses rivaux. Les partis espagnolistes semblent destinés à devenir résiduels, tant la poussée catalane, aiguillonnée par la rancoeur contre un Etat absent et partial, est forte.

Des personnalités du Parti populaire proposent ouvertement de sanctionner la Catalogne entière, si le référendum est mis en oeuvre, en lui retirant son statut de Communauté autonome, comme l'avait fait le fasciste Franco en 1939. L'Union européenne envoie, via Angela Merkel, des signaux à Rajoy pour lui assurer qu'elle ne tolèrerait pas un Etat catalan, et que si cela advenait, il serait exclu immédiatement de l'application des traités.

Christian Rogel


Vos commentaires :
Alwenn
Vendredi 15 novembre 2024
«L'Union européenne envoie, via Angela Merkel, des signaux à Rajoy pour lui assurer qu'elle ne tolèrerait pas un Etat catalan, et que si cela advenait, il serait exclu immédiatement de l'application des traités.»

L'union européenne n'appartient pas à Madame Merkel !


Pôtr ar skluj
Vendredi 15 novembre 2024
Il me semble que les Catalans ignore tout du fonctionnement d'une démocratie. Après le vote d'une loi par le Parlement, celle-ci est soumise au contrôle d'un tribunal constitutionnel qui vérifie sa conformité avec la Constitution. Si la loi n'est pas conforme, elle ne peut pas être appliquée, c'est ainsi dans tous les États démocratiques. Le problème s'était déjà posé il y a quelque temps. Les Catalans auraient dû proposer une révision constitutionnelle au lieu de recommencer comme la fois précédente. Les mêmes causes conduisent aux mêmes effets, il ne faut pas s'en étonner.

marc iliou
Vendredi 15 novembre 2024
A Potr ar Skluj : si l'Espagne était une démocratie elle permettrait à la Catalogne de décider de son avenir mais voilà l'Espagne a de nouveau un gouvernement proche du franquisme ! et l'Union Européenne ne brille pas non plus de ses lumières démocrates que ce soit l'Allemagne de Merkel ou la France de Hollande entre autres !

Pôtr ar skluj
Vendredi 15 novembre 2024
La démocratie ce n'est pas bêtement la mystique de la volonté populaire. Le gouvernement espagnol ne va violer la Constitution pour faire plaisir aux Catalans. Que c'est dernier ne proposent-ils une réforme constitutionnelle ?

Christian Rogel
Vendredi 15 novembre 2024
@Pôtre ar Skluj
Il semble impossible de proposer une réforme constitutionnelle ouvrant la voie à une autodétermination des régions dans une Espagne dominée par un gouvernament nationaliste, qui, a du trouver des solutions pour combler les dépenses somptuaires de plusieurs Communautés autonomes.
La Catalogne voulait accéder directement au marchés financiers pour éponger sa dette (jusqu'à 40 M euros), mais, justement, là, aussi, la Constitution est un butoir, car, seul le gouvernement central se réserve le droit d'emprunter au niveau international.
La stratégie catalane, qui ne date que de 2012, est de montrer l'incapacité de Madrid à offrir une solution satisfaisante aux désirs d'autonomie catalane, même pas le fédéralisme à la mode US ou allemande. L'un des effets est que les Catalans sont stigmatisés en tant que tel dans le reste l'Espagne, ce qui alimente le séparatisme.

Pôtr ar skluj
Vendredi 15 novembre 2024
Dans ce cas, les Catalans doivent assumer leurs liens indissolubles avec l'Espagne : ils en sont responsables. Jusque dans les années 1920, la Catalogne entretenait peu de relations économiques avec la Castille et son affirmation identitaire passait par le Félibrige. Puis, les Catalans ont fait le choix du développement, rompant avec l'idéal mistralien : la préservation des identités locales par le maintien des structures économiques archaïques. Ils ont donc créé leurs liens économiques avec l'Espagne, faisant appel a une immigration castillane, par ailleurs méprisée. Il très égoïste de leur part d'accuser l'Espagne d'entraver une économie qui n'aurait pu naître sans elle.

Cela dit, l'Espagne a toujours géré ses différences internes avec moins de tact que ne l'a fait la France.


Christian Rogel
Vendredi 15 novembre 2024
@Pôtr ar Skluj
L'affirmation sur le splendide isolement économique me semble un peu difficile à montrer : la Castille et Madrid était si peu développés qu'ils constituaient un hinterland assez pauvre, donc, de peu d'intérêt. La plus belle gare de Barcelone était l'Estacio del Nort.
Dès la fin du XIXe, le catalanisme politique s'est développé en réclamant des pouvoirs et en créant avec l'argent de la bourgeoisie un mouvement d'affirmation très diversifié (Gaudi, palais de la musique catalane).
En 1921, l'ERC, sur un programme indépendantiste, a remporté la majorité des municipalités catalanes.

Christian Rogel
Vendredi 15 novembre 2024
@Pôtr ar Skluj
Je ne vois pas la signification de l'expression «liens indissolubles avec l'Espagne».
Toute formation humaine est, par nature, soluble. La seule incertitude porte sur la durabilité des liens politiques qui peuvent durer plusieurs siècles et se dissoudre rapidement, parce que les recompositions sont permanentes (l'Europe est très instable, même si la guerre froide a créé l'illusion contraire).
On ne peut prédire la rupture des liens entre Madrid et la Catalogne, mais, en cas de rupture des équilibres, un regroupement des Pays catalans reste une hypothèse admissible, mais, non certaine.
Une seule chose est sûre : depuis 1989, c'est reparti pour un tour.

SPERED DIEUB
Vendredi 15 novembre 2024
vu de Russie
Voir le site

Christian Rogel
Vendredi 15 novembre 2024
@Spered Dieub
La version de l'empire russe ex-soviétique relève du comique involontaire, puisqu'ils ont du gérer «un cataclysme», dont ils ne se sont pas remis. Ils devraient avouer avoir pris un peu d'avance, mais reconnaîtraient-ils qu'ils veulent remettre dans leur empire les «étrangers proches» ? L'Azerbaïdjan tente d'y échapper en relançant le projet de gazoduc via l'Arménie, la Géorgie et la Turquie. Si cela marchet, ils seront moins moqueurs.

laia ribes
Vendredi 15 novembre 2024
Bon, les 750.000 signatures sont pour demander au Parlement Catalan de faire une déclaration unilatérale d'indépendance, si c'est impossible de faire la votation.

Jordi Sàlvia
Vendredi 15 novembre 2024
Vive la Catalogne libre!

Raymond CASTERAS
Vendredi 15 novembre 2024
RAYMOND CASTERAS Paris 12/10/2014
Si voter est le fondement même de la Démocratie.
Quand une masse importante du peuple l'exige et le demande (manifestations et pétitions dépassant le million et demi de personnes, pour un population totale d'environ sept millons, plus des trois quarts des parlementaires élus en Catalogne...)
Comment peut ton prétendre l'interdire.
La CONSTITUTION de FRANCO interdisse aussi de voter.
Pourquoi ont nous a dit que FRANCO n'était Démocratique??
Ceux qui, en Europe, donnent raison à RAJOY et au gouvernement espagnol actuel au nom d'une constitution.
Ceux qui, en Europe, ont défendu et appuie le Printemps arabe et autres revendications Démocratiques dans le monde.
Comment sans se RENIER, peuvent intervenir et approuver l'interdiction faite au peuple catalan de se consulter SUR LER BIEN FONDE OU NON DE SA DEPENDANCE DE MADRID.
Merkel, Valls, Holande... Faire bien de faire de la Démocratie réelle au lieu de la Démocratie de discours.

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