La Fête des remparts de Dinan dépasse le seul intérêt touristique

Reportage publié le 22/07/12 0:56 dans Festivals par Olivier Renault pour Olivier Renault

La fête, qui vient de lancer sa vingtième édition, a été inaugurée ce samedi matin par sa présidente Joëlle Le Guiffant, et par le maire, Réné Benoît. Depuis ce matin, et jusqu'à demain, des dizaines de milliers de visiteurs redonnent à la Cité historique son ambiance médiévale à la Fête des remparts de Dinan. Combats à l'épée, tournois de chevalerie, musique, danses et des citations de poèmes, ours et faucons, des dizaines d'animations se succèdent dans toute la cité médiévale, le long des remparts qui la ceinturent, ou à l'intérieur de la vieille ville. En plus des 600 comédiens invités, des centaines de particuliers venus d'horizons divers ont choisi de se costumer pour participer pleinement à la fête qui a pu, à nouveau, voir le jour grâce au travail des bénévoles, qui ont planché 9 mois sur son organisation.

Les rues du centre historique de Dinan sont déjà bondées. A chaque Fête des remparts les visiteurs costumés se font de plus en plus nombreux. Nous voyons des Chevaliers, des Croisés, des Nobles avec de gentes dames à la coiffe parfaite et quelques gueux, qui, cependant, ne peuvent pas rivaliser de véracité avec ceux qui restent dans un coin d'un mur tout au long de l'année.

Tout le week-end, Dinan revit à l'heure médiévale. Sur quatre sites, des animations sont proposées par des troupes professionnelles pour revivre les « Réjouissances princières et liesse populaire », thème de cette édition. Au cours d'un grand tournoi, les meilleurs chevaliers s'affrontent.

Les visiteurs habillés de leur costume viennent pour plusieurs raisons : s'amuser, pour le plaisir de se costumer en ayant la volonté de revivre une période de l'Histoire. Mais il y a ceux qui viennent à la recherche de leur identité jusqu'à atteindre un esprit carrément patriotique qui n'hésite plus à s'afficher. Nous avons rencontré plusieurs profils parmi ces visiteurs costumés qui nous montrent que nous sommes assez loin de la simple attraction touristique en cette saison estivale. Ce ne sont pas seulement les enfants qui poussent les parents à venir à la fête mais ce sont les adultes qui y trouvent un intérêt certain.

Des enfants et des adolescents sont venus en grand nombre

Comme Ivan qui vient de Paris, ils sont nombreux à porter une cuirasse ou un costume de soldat de l'époque médiévale. Ivan porte le costume d'un chevalier médiéval qu'il a réalisé lui-même. Il a fait les brocantes pour en trouver les éléments. Et son costume se rapproche le plus possible de la réplique des Chevaliers de l'époque. Pour lui, les détails historiques ont leur importance.

Ses proches qui sont des experts du monde médiéval l'ont guidé dans cette période historique. Tout comme les nombreux enfants et adolescents, il prend un grand plaisir à se costumer pour saisir au mieux la vie de l'époque médiévale.

L'intérêt pour le folklore

Benjamin, que nous croisons devant l'église de Saint-Malo, porte son costume d'époque et sa croix celtique pour faire joli. « Je viens de Rennes et ça vaut le coup de venir ici. » Il vient comme de nombreux visiteurs pour retrouver une ambiance surtout festive.

De nombreux Anglais comme John dans son costume de moine, viennent des îles Anglo-Normandes « Je viens de Jersey pour savourer l'ambiance » ou d'autres comme William, dans son costume de noble, arrivent de très loin « Je viens d'Australie et je passe six mois de l'année à Dinan et je suis fier d'être à ce Festival ». Accompagné de ces amis Anglais qui vivent depuis plusieurs années à Dinan, il savoure l'hospitalité des Bretons. C'est l'aspect ludique qui essentiellement les intéresse et l'envie d'en apprendre plus sur la culture française car « chez moi, en Australie, nous n'avons pas cette culture. » Une de ses amies nous dit que les Bretons sont têtus et que pour les Bretons la France est « un tout petit pays et termine toute souriante en expliquant qu'elle porte un costume de Aliénor d'Aquitaine.»

Le touriste à la recherche de la reconstitution historique en Bretagne

« Nous sommes du Sussex à côté de Portsmouth. C'est la quatrième Fête des remparts que nous faisons. » Ce couple porte des costumes du 15 siècle qui sont des répliques exactes des costumes d'époque. « C'est le vrai costume de cette période de la guerre de Cent Ans avec les Anglais et les Français que je porte » dit l'homme qui accompagne sa femme aussi dans un costume anglais du 15 siècle. « A cette époque les Bretons étaient du côté des Anglais contre la France » disent-ils.

Cette famille flamande aux costumes rose-violets vient tous les deux ans à la Fête des remparts et ils planifient leurs vacances en fonction des dates de cette Fête. « Nous adorons les animations. Les costumes que nous portons, c'est ma mère qui les a faits et nous avons, en nous aidant de détails trouvés sur Internet, réalisé ces costumes. »

Charles Martel, qui est flamand, accompagné de sa femme et de leur chien aussi costumé, est carillonneur dans la ville de Bègues. Il vient depuis 1998 à Dinan. « Quand on revêt un costume on change de personnage. Ici, de nombreuses personnes portent des costumes. C'est une chose importante car, avec le cadre fantastique de la ville, on retrouve un patrimoine vivant. »

Au fil de notre promenade dans la Fête des remparts, nous allons trouver des motivations plus profondes chez les individus costumés.

L'initié qui a des liens de sang avec cette période médiévale et qui montre un certain patriotisme

On croise un homme dans son costume de Noble qui a été donné par des amis anglais avant leur départ au pays. Pour lui, l'intérêt est de rester le plus proche possible de ses racines. Tout en regrettant que la fête ne dure que deux jours, il aime porter son costume pour mieux se fondre dans cette ambiance médiévale. Il est un des premiers à nous mettre sur les pas de ceux qui viennent ici pour porter les couleurs de leur famille ou pour défendre leur identité et qui nous amènent à la rencontre de ceux et celles qui ont des motivations plus « politiques ». La Fête des remparts c'est aussi l'occasion de renouer aussi avec une certaine idée d'un patriotisme qui clame haut et fort ses origines.

Bouillet dans son habit de ménéstrel a toute sa famille qui vient de Dinan depuis le 15 ème siècle ! Il montre fièrement sa bague en or sur laquelle se trouvent les armoiries de sa famille. Par la même occasion, il montre aussi ses vitelotes qu'il va cuisiner ce midi. Une véritable histoire, tout un patrimoine et une longue tradition historique se cache dernière cet homme costumé.

Devant un stand où on peut acheter des armures et autres casques de l'époque médiévale, nous rencontrons un homme dans un costume vert et rouge avec une côte de mailles sur la tête. C'est un Chevalier breton. Gilles porte une grosse croix noire sur son costume qui se révèle être plus un uniforme qu'un déguisement. Cette croix noire est le premier drapeau de Bretagne. « Les Celtes n'étaient pas une bande de Bisounours. » Ses descendants, de véritables Chevaliers bretons, sont du côté de la Région de Morlaix. Les couleurs de son costume sont celles de sa famille. La couleur rouge est pour les hommes et la couleur verte est pour les femmes. « Ce costume est une seconde peau. On se reconnaît par nos costumes. Être là aujourd'hui, c'est aussi une revendication politique ! Gilles n'aime pas la Révolution française : «Elle a détruit l'Histoire du pays et ça rappelle un peu les Bolchéviques. La France qui est très disposée à faire des repentances envers les gens de culture juive ou envers les Africains pour la Traite des Noirs doit aussi faire la même chose pour les Bretons». Sa mère, qui comprend le breton, reprend notre entretien et dit fièrement « j'aime la France, mais avant d'être Française,je suis Bretonne. Notre famille a eu l'interdiction de parler le breton. Ceux qui parlaient le breton devaient porter un sabot au cou. Et il était écrit à l'école, il est interdit de parler le breton et de cracher par terre. D'ailleurs, la langue bretonne est menacée. En France, on nous parle beaucoup de la démocratie mais ailleurs comme au Royaume-Uni, le parlement écossais légifère. Au nom d'une certaine liberté, on a supprimé un tas de libertés chez nous ! » Gilles et sa mère nous prouvent leur intérêt profond pour leur culture et leur langue bretonne et soulignent l'importance des écoles Diwan et nous montrent finalement que des motivations très profondes pour la Fête des remparts sont bien présentes.


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