La devise de la République interdite aux langues de France

Communiqué de presse publié le 23/10/13 16:12 dans Editorial par Tangi Louarn pour Tangi Louarn

Monsieur Le Recteur d’Académie,

Nous avons pris connaissance de votre courrier au Président du Conseil régional de Bretagne en date du 3 octobre 2013, par lequel vous estimez qu'en vertu du principe d'indivisibilité de la République, il vous paraissait que sa devise « qui contribue à l'affirmation de l'identité nationale » ne pouvait s'exprimer qu'en français, et ne saurait être accompagnée d'aucune traduction en langue régionale.

Comment expliquer votre position ? Que révèle ce choix du monolinguisme pour traduire des valeurs universelles ?

Ce que vous dites à nos concitoyens et aux enfants qui chaque jour passent le seuil des écoles, c’est que la langue bretonne, pas plus qu'aucune autre langue régionale, n’a de légitimité à transmettre « l’idéal commun de liberté, d’égalité et de fraternité » qui, conformément au préambule de la Constitution fonde nos institutions. Et cela, malgré l'article 75-1 de cette même Constitution, qui affirme que «les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France ». Malgré, encore, la récente loi de Refondation de l'école de la République, qui, en son article L.312-10 reconnaît officiellement « un enseignement bilingue en langue française et en langue régionale». Ignoreriez-vous que les Bretons ont été à l'avant garde de la Révolution contre l'absolutisme royal et que la devise de la République s'est aussi inscrite en breton comme en d'autres langues régionales, avant les errements de l'abbé Grégoire, de Barrère et de la Terreur ?

Comment pourrez-vous, en tant que Recteur d'Académie de Rennes, expliquer aux enfants des classes bilingues que le breton qu'ils utilisent à l'école n'a pas le droit d'exprimer la devise de la République qui ne pourrait s'afficher qu'en français ?

Mais de quelle République parlons-nous ?

Le refus de traduire la devise «Liberté Egalité Fraternité» dans une langue régionale pose, de toute évidence, la question de la nature de la République. Votre position dit que vous ne vous référez pas à une nation civique fondée sur la volonté de vivre ensemble, mais à une nation ethnique fondée sur un héritage culturel et linguistique exclusif. Ce choix contribue, non pas à reconnaître l’universalité de ces valeurs, mais à en faire une exception française. Cette ethnicisation des idéaux partagés, réduits à des valeurs «franco-françaises», est un mauvais coup pour leur diffusion : non traduisibles, ils ne sont exportables qu’au nom d’une volonté d'impérialisme et de domination.

Le 11 septembre 2013, le Parlement européen a voté la résolution Alfonsi pour la diversité linguistique au sein de l'Union européenne, à une écrasante majorité (625 voix contre 26 voix venues essentiellement des extrêmes droites européennes, les parlementaires français en représentant la moitié) en demandant aux États de condamner les pratiques linguistiques discriminatoires qui ciblent l'identité et l'usage linguistique des communautés linguistiques menacées. C'est aux opposants à cette résolution et aux moments les plus sombres de la colonisation française que renvoie votre courrier.

Que craint un haut fonctionnaire, qui s'arroge le pouvoir de prendre de telles décisions ? Que les langues régionales ne se développent à l’instar de ces espèces botaniques qui deviennent invasives si on n’y prend garde ? Qu’elles ne menacent une République qui serait si peu sûre de ses valeurs ? La crainte n’a jamais été un facteur de démocratie, tel est le danger.

Nous vous laissons la responsabilité de vos propos qui reflètent un détestable retour en arrière vers un nationalisme nauséabond bien éloigné des valeurs d'égalité et de respect que devrait transmettre l'école et qui favorise, au contraire, la montée des mouvements de repli identitaire et de chauvinisme dont la France semble hélas prendre la tête aujourd'hui en Europe.

Veuillez agréer, Monsieur le Recteur, nos salutations affligées.

Pour le bureau de Kevre Breizh

Le Président,

Tangi Louarn

KEVRE BREIZH : Agence Culturelle Bretonne de Loire Atlantique, Al Levrig, Amzer Nevez, Ar Falz-Skol Vreizh, Ar Redadeg, Association des Écrivains Bretons, Association des Enseignants de Gallo, Bertaeyn Galeizz, Bodadeg Ar Sonerion, Dastum, Digor Gwengamp, Breizh Unvan – Bretagne Réunie, Dihun, Div Yezh, Diwan, Emglev Bro An Oriant, Emgleo Breiz, FALSAB, Gouelioù Breizh, Gouren Breizh, Identité Bretonne, KBP – Association des Professeurs de Langue Bretonne Paris, Kanomp Breizh, Kendalc'h, Kuzul Ar Brezhoneg, C'Hoariva, Poellgor An Tarv, Radio Kerne, Sked Brest, Skol An Emsav, Skol Uhel Ar Vro – Institut Culturel de Bretagne, Skourr Breizh Kendalc'h Keltiek, Spered Kelt, Stumdi, Ti Ar Gouren, Ti Ar Vro Kemper, Tud Bro Konk, Unvaniezh ar Gelennerien Brezhoneg, War’l Leur.


Vos commentaires :
Annie Le Dran
Vendredi 15 novembre 2024
Tant mieux !!!
De toute evidence, Liberte en conscience de
l'autre, ils ne savent pas ce que ca veut dire !
Egalite... Desolee, ca n'existe pas... Je prefere Solidarite !
Fraternite... Qu'ils commencent par eux !??
An~

mac kinle
Vendredi 15 novembre 2024
Nous avons le notre: le Bro Gozh ma zadoù!

Plan Planeta
Vendredi 15 novembre 2024
En y regardant de plus près ou tout au moins en essayant :
Depuis Robespierre ou à cause de celui-ci, toute velléité d'une République non jacobine, c'est à dire non centraliste, est absolument exclue. Oui, ABSOLU-ment , comme le régime précédent et combattu de toutes les forces et de tout le sang d'hommes, de femmes et d'enfants ! A compter de ces jours sombres, terriblement horribles de la «terreur», toutes pensées, c'est à dire toutes personnes, pensant autrement que le tyran et de son mythe de «l'Homme universel» furent éradiquées, en clair et en forme : Décapitées ! ! !
LA République est restée ainsi pendant près de deux siècles, dans un centralisme absolutiste avant une petitounette (pardonnez ce néologisme diglossique) décrispation, arrivée justement dans les années 80 du siècle passée. Aujourd'hui cette décentralisation ne consiste pour l’État qu'à refiler les secteurs où les dettes et le passif sont colossaux mais ceci n'est que politique capitaliste n'es-ce-pas ? Et démerde toi ! Enfin un peu de «Fraternité» oserais-je imaginer ?
Depuis donc cette époque Robespierrenne, tyrannique tel un Staline ne l'aurait rêvée et toute la pléiades de fascistes : Hitler, Mussolini, Pinochet, Franco... -nul doute qu'en cette personne (Robespierre) ils n'aient trouvé leur modèle idéal- il n'y a plus eu au pouvoir exécutif une autre forme de pensée que «Nationaliste». Nous comprendrons au passage que si demain, c'est à dire tout à l'heure, la France glisse irrémédiablement vers l'extrême droite et son mouvement bleu marine le plus représentatif, ce ne sera que le résultat logique de ce jacobinisme, de ce racisme, ostracisme, fascisme, appelons-le comme on veut mais en tous cas par son vrai non de famille de pensée, à l'égard des langues régionales, de ces citoyens, de tous les enfants de la République...
Bien évidemment ceci commence par l’éducation à l'école de la République, par la plus tendre enfance, l’Éducation «Nationale». Le vers est donc dans le fruit, la propagande bien en place, et depuis bien longtemps. Il ne fut «retenu» (le vers) que par le combat de beaucoup d'hommes et de femmes qui aujourd'hui se réduisent en nombre considérablement, hélas, comme peau de chagrin. Pas besoin de psychanalyse pour savoir que les mots employés, serinés, représentent l'objectif profond conscient ou inconscient d'une personne morale, si ?
La Nation !
Alors on pourra toujours écrire, protester, justifier,... , rien n'y fera, car le cerveau tout simplement ne l'acceptera pas et pour le plus grand nombre d'entre-nous, jamais. Ceci apparaîtra plutôt comme au mieux des gesticulations passéistes donc veines et inutiles car nous avons d'autres chats à fouetter voyons, soyons raisonnables, ou une menace fasciste dans un pur effet de miroir, de la psychée, renvoyant l'image d'un moi profond (politique) car si l'on n'éradique pas, décapite pas, les langues régionales, c'est nous-même qui seront décapités au nom sacré de la République.
Depuis près de 8 générations nous prouvons que que Bil Gates et son Windows n'avaient rien inventer en méthode de formatage. Nous vivons ainsi une «Histoire de France» complètement erronée, préfabriquée, propagandiste. Nous y voyons un Louis XIV surnommé «Soleil» alors qu'il révoqua «l’Édit de Nantes» et remis un pays dans le pire des contextes c'est à dire allier dans un même espace, une guerre de religion à une guerre civile. Un Saint-Louis qui n'était en fait qu'un «gros porc»...
Pourquoi bâtir un pays sur un passé dont ont vient de décapiter ses «derniers »représentants ? Et bien parce que l'on reprend sa sainte trinité : Noblesse, Clergé, Esclaves et on change simplement les noms sans n'y rien changer de son fonctionnement : Politiques, Intellectuels (profs, journalistes, artistes (conventionnés)... qui dispensent la bonne parole de l’Évangile Républicain sauce France) et encore et toujours les Esclaves.

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