Les ostréiculteurs, frappés depuis 2008 par une surmortalité des jeunes huîtres, tirent la sonnette d'alarme.
Et ils ont été entendus, après des coups d'éclat, en mai, à Paris et à La Trinité. « On se voit mourir. La profession est sur un tapis roulant en marche. Au bout, il y a le vide », s'alarmait alors Renan Henry, président du comité de survie de l'ostréiculture, producteur à Saint-Philibert. La surmortalité des jeunes huîtres touche la Bretagne depuis 3 ans, et d'autres bassins de l'Atlantique, comme à Arcachon, et de la Méditerranée. « Les naissains sont en forte baisse et les juvéniles meurent dans une proportion de 65 % », confirmait en mai au Télégramme Jean-Jacques Cadoret, patron de la maison Cadoret à Riec-sur-Belon et Carantec.
Mobilisation générale
Ifremer peine à trouver la parade à ce phénomène complexe imputé à un mystérieux virus. Fin mai, le ministre de la pêche, Bruno Le Maire, a annoncé aux ostréiculteurs un plan de soutien 2010-2012 destiné à comprendre les causes de la surmortalité, à aider à trouver des souches résistantes et, en attendant, à soutenir les professionnels. Reste à mettre la main au portefeuille pour l'État et les Régions. Les professionnels chiffrent les besoins à 150 M€ sur 3 ans. « L'Etat a déjà versé 85 millions d'euros pour indemniser les pertes des étés 2008 et 2009 », a rappelé Goulven Brest, président du conseil national de la conchyliculture, le 22 juin, lors d'assises sur l'avenir de la filière (huîtres, moules, coquillages). « Je souhaite que nous décrétions tous ensemble la mobilisation générale pour sauver la conchyliculture », a martelé le ministre français à cette occasion.
Une filière à repenser
Les pouvoirs publics sont au chevet des ostréiculteurs, mais toute la filière doit être repensée. « De nouveaux modes de fonctionnement, une nouvelle gouvernance des entreprises comme de la recherche, une diversification de la production », estime Goulven Brest. Les producteurs doivent passer le cap des deux ou trois ans à venir. C'est le temps pour qu'une huître parvienne à maturité. Les conséquences de la mortalité devraient se faire sentir, pour la première fois, cette année. Chute des stocks, cessations d'activité, licenciements…, les ostréiculteurs dégustent. Les consommateurs, quant à eux, dégusteront moins de plates et de creuses pour Noël et le Nouvel An. Les pertes de naissains de 2008 vont faire chuter de 40 à 60 % le nombre de bourriches disponibles. « Je veux des huîtres », clamait la publicité. Dans les années 1970 les ostréiculteurs bretons avaient dû implanter l'huître japonaise dans leurs parcs. En ce début de troisième millénaire, l'Histoire se répétera-t-elle ?
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