Depuis le 19 septembre dernier et jusqu'au 4 janvier 2009, la Morgan Library, une des plus grandes bibliothèques de New-York, présente une exposition exceptionnelle de planches et de croquis des premiers albums de Babar intitulée : «Drawing Babar: Early Drafts and Watercolors» (Dessiner Babar : premiers dessins et aquarelles). Toute la presse française s'en est fait l'écho, mais personne n'a souligné le fait que la créatrice de Babar, le petit éléphant, était une Bretonne de Nantes, Cécile Sabouraud, fille du docteur Raymond Sabouraud (Nantes, 1864 - Paris, 1938).
Babar est un des personnages les plus aimés des enfants du monde entier, dont les albums continuent d'être réédités dans de nombreuses langues et dont les aventures ont été reprises sous forme de dessins animés présentés sur les télévisions de quelque 160 pays de la planète. Il est à noter que depuis le 1er janvier de cette année, les sept premiers albums publiés avant 1939 sont tombés dans le domaine public, ce qui devrait faciliter leur publication en breton et dans d'autres langues de moindre diffusion.
Née en 1904, Cécile Sabouraud épousa en 1924 Jean de Brunhoff, né lui aussi en 1904, qui était un jeune artiste-peintre, tandis qu'elle était elle-même une bonne pianiste. Le couple eut bientôt deux fils, successivement : Laurent et Mathieu, et c'est pour les aider à s'endormir que leur maman se mit à leur raconter de jolies histoires chaque soir.
En 1930, elle leur raconta l'histoire d'un petit éléphant vivant en Afrique, dont la maman venait d'être tuée par des chasseurs. Le petit éléphant réussit à leur échapper et à s'enfuir, mais, complètement dérouté, il arriva dans une ville où il eut la chance de rencontrer une vieille dame qui s'occupa de lui et lui fit faire des habits d'homme. Puis Babar rentra chez lui et fut bientôt couronné roi des éléphants. Jean de Brunhoff trouva cette histoire charmante et entreprit de la dessiner.
C'est en 1931 que parut le premier album «L'histoire de Babar le petit éléphant» publié par le «Jardin de la Mode». Le livre reçut un excellent accueil et Cécile de Brunhoff inventa d'autres histoires qui donnèrent lieu à de nouveaux albums, sept en total, qui connurent un succès incroyable. En 1936, leur édition fut reprise par Hachette et, de 1931 à 1939, il s'en vendit quatre millions d'exemplaires en langue française, mais aussi bientôt dans d'autres langues, y compris en anglais, et Babar fit son entrée sur le marché des États-Unis, pourtant totalement dominé par Mickey Mouse et d'autres créations de Walt Disney. Jean de Brunhoff mourut très prématurément, le 16 octobre 1937, et la belle histoire de Babar faillit s'arrêter là.
Dès le premier album, Cécile de Brunhoff avait refusé que son nom paraisse sur le livre comme auteure des textes, si bien que son rôle resta très longtemps ignoré. Cécile de Brunhoff se consacra à l'éducation de ses fils, puis, après la guerre, elle encouragea Laurent (né le 30 août 1925), qui avait hérité des talents artistiques de son père, à reprendre la plume et le pinceau pour poursuivre les aventures du petit éléphant. C'est ainsi que Laurent de Brunhoff fit paraître en 1946 «Babar et ce coquin d'Arthur» et allait se montrer le digne continuateur de son père. Le succès des albums de Babar allait s'amplifier mondialement, notamment en Amérique du Nord, si bien que Laurent décida d'aller s'installer lui-même définitivement aux États-Unis en 1985. Quant à Cécile de Brunhoff, elle s'éteignit discrètement à Paris, à l'âge de 99 ans, le 6 avril 2003.
En 2006, le 75e anniversaire de la naissance de Baba fut fêté grandiosement et la Poste française émit à cette occasion un timbre qui fut diffusé à 17 millions d'exemplaires.
En 2004, la Morgan Library avait fait l'acquisition d'un fonds important de dessins, de planches, d'épreuves d'imprimerie et d'exemplaires des premières éditions des divers albums de Jean et de Laurent de Brunhoff, et c'est ce fonds que les visiteurs de la belle exposition présentée actuellement à New-York peuvent découvrir. À cette occasion est paru un catalogue superbement illustré, réalisé par Christine Nelson, la conservatrice des manuscrits historiques et littéraires de la bibliothèque. Il est à noter que cette exposition a été en partie financée par The Florence Gould Foundation, celle-là même qui a financé en très grande partie la réalisation de la statue d'Armand Tuffin de La Rouërie à Fougères en 1993.
(voir le site) officiel de Babar.
(voir le site) de la Morgan Library, page de l'exposition.
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