Kan evit ar Peoc'h à Châteaubriant : une cantate pour la Paix et pour l'Europe

Communiqué de presse publié le 14/11/08 11:06 dans Cultures par Maryvonne Cadiou pour Maryvonne Cadiou


Kan evit ar Peoc'h : une cantate pour la Paix et pour l'Europe

Message humaniste et spirituel à l'Europe des Cultures

Dans cette belle et grande église du XIXe siècle de Châteaubriant, le fracas du tonnerre de la guerre pour commencer. Puis les choristes. On les croirait deux mille. Ils sont 140, sans sonorisation. Les voix envahissent le volume. Les pierres nous renvoient les vibrations, mais aussi certainement les absorbent et les conserveront longtemps. Quarante minutes de recueillement pour le public, nombreux – l'église était pleine – attentif, yeux fermés pour quelques-uns, plongés dans des souvenirs douloureux de guerres, de deuils, pour certains.

Dès le début de la mélodie on reconnaît avec plaisir la “patte musicale”, le style de René Abjean, le compositeur de plusieurs autres œuvres bretonnes pour orchestre et chœurs (1), mais ne laissons surtout pas croire qu'il se répète. Il y a du grandiose de grande symphonie universelle dans cette œuvre dont l'ensemble symphonique Mor Bihan de 40 musiciens soutient parfaitement le défi sous la baguette de Jacques Wojciechowski (2). Les arrangements et l'orchestration sont de Yvan Cassar (3). Un jeune prodige de... 16 ans ? joue la partition pour cornemuse. Ewen Couriaut répondra plus tard «J'ai 14 ans, je joue de la cornemuse depuis 7 ans. Je suis au bagad de Vannes». Dialogue à côté ensuite entre deux dames qui ont entendu Ewen : «– Comment peut-on choisir à 7 ans un tel instrument ? C'est difficile quand même, si jeune...» «– Je suppose que quand on est doué pour la musique et qu'on est breton, on se tourne vers la cornemuse et la bombarde, surtout s'il y a un bagad dans sa ville...»


« Avant de devenir “Musique”, cette Cantate pour la paix fut d'abord un magnifique poème, fort, poignant, écrit en langue bretonne par Job an Irien », nous apprend la brochure distribuée à l'entrée, bilingue breton-français pour ce texte.

Il serait vain de tenter un “commentaire de texte” du poème de Job An Irien (4). C'est, en huit parties, une grande prière païenne humaniste. Dénonciation de toutes les guerres, pas seulement celles auxquelles nous pensons... Appel à la paix, à toutes les paix, pas seulement celles qui se signent dans un wagon ou un bureau...

« Gwelet am eus ar peoc'h en had... » J'ai vu la paix en devenir... Il faut lire ce très beau texte, s'en imprégner jusqu'aux derniers vers : « Ha peoc'h deoc'h c'hwi bugale, ennoc'h e kan bleuñv on ene ». Et paix à vous les enfants, en qui chante la fleur de notre âme.


Michel Chauvin, président de Dihunerien, avait présenté le programme : « Nous sommes heureux d'être ici à Châteaubriant, en Bretagne... » Il laissa un temps, répéta, et alors ce furent les applaudissements... qu'il attendait.

En prélude à la Cantate, la Fantaisie Opus 80 de Ludwig Van Beethoven, (voir le site) pour piano solo, chœur, soli et orchestre – composée en 1818 – avec, au piano, Christian Foison, qui a été 30 ans professeur de piano à Châteaubriant. On y reconnaissait déjà par instants l'air de la future Ode à la joie, du dernier mouvement de la Neuvième Symphonie, qui fut officialisé comme Hymne européen en 1972.

Le concert se termina par l'« Hymne européen » avec l'orchestre, les 140 choristes et Jacques Wojciechowski au piano. Le public, bien que convié à chanter avec les chœurs, n'a osé que très timidement. Alors Jacques Wojciechowski le sollicita à nouveau et ce fut magnifique. Les paroles (dans la brochure) se succèdent en allemand, français et breton et l'église s'imprégna de ce flamboyant final plein d'espoir : « Ar peoc'h a bado bepred » (la paix durera toujours, n'aura pas de fin...). L'hymne européen n'est pas encore rentré dans les habitudes en tant qu'hymne comme ceux pour lesquels on se lève spontanément. En effet le public est resté assis.


Ce concert fut organisé en partenariat avec la Confédération Kendalc’h, par l'association « Dihunerien » dont le président est Michel Chauvin. Membre par ailleurs du conseil d'administration de l'Institut culturel de Bretagne, il est un infatigable éveilleur de la conscience artistique musicale bretonne. Il est “initiateur” de compositions bretonnes telles que l'Opéra « Anne de Bretagne », l'Oratorio « L'Inconnu me dévore » – qu'il a produit – d'après des textes de Xavier Grall. Il s'implique fort dans la diffusion de ces œuvres bretonnes modernes de grande envergure pour les faire interpréter en Bretagne et ailleurs et ainsi les faire découvrir ou mieux connaître et par là, faire prendre conscience en-deçà et au-delà de nos frontières, de la richesse créative de la Bretagne. Il s'investit aussi, volet indispensable, dans la recherche de mécènes et sponsors...

La Cantate pour la Paix sera donnée à Vannes au Théâtre Anne de Bretagne le 13 mars et au Mémorial de la Paix à Caen le 9 mai prochain pour la Journée de l'Europe.

Le concert de Châteaubriant nécessita le déplacement de pas moins de trois cars de la région vannetaise.
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(1) [[René Abjean]] : très impliqué dans la culture musicale bretonne (livres articles, création de chorales...) il est aussi compositeur. Quelques œuvres : Missa Keltia, Ar Marc'h dall, War Varc'h d'ar Mor, Kan evit ar Peoc'h...

(2) Jacques Wojciechowski : Pianiste et professeur de piano au Conservatoire de région Rennes. Pour résumer... il est directeur du Conservatoire intercommunal de Châteaubriant. Il a fondé en 1989 les Chœurs et l'Orchestre de Brocéliande. Il compose des œuvres contemporaines de musique vocale en langue bretonne.

(3) Yvan Cassar : Rennais, il est ancien élève du Conservatoire National Supérieur de Paris. Il a travaillé avec de nombreux artistes français, compose des musiques de films, est invité pour des albums par des artistes prestigieux des musiques du monde...

(4) [[Job An Irien]] : dont la page sur Wikipedia est incomplète de ses écrits, est un prêtre bretonnant du Léon. (voir le site) et (voir le site)

(5) Le CD de la Cantate. Enregistré à Lesneven et Rennes en 1993. Les paroles en breton (la langue du concert), français, anglais et allemand sont dans le livret.
Le disque est augmenté du « Lamento » de Jean-Guy Ropartz (1864-1955) et de sa « Messe brève en l'honneur de Sainte Anne », de « Légende » de Jean Cras (1879-1932), interprétés, comme la cantate, par l'Orchestre et les Chœurs de Brocéliande. Il se termine avec le « Bro Gozh Va Zadoù », l'hymne national breton adapté en 1897 de l'hymne national gallois par François Jaffrennoù (grand druide Taldir, 1879-1956), chanté par les 10 chorales du « Breizh a Gan ».


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