Plogoff : trente ans déjà !
Avec les confrères de mon titre et ceux de la presse régionale – ceux des médias nationaux, radios, télés, journaux on ne les a pas beaucoup vus pendant ces événements : fallait pas parler d'un sujet qui fâchait ces messieurs de la capitale ! – nous avalions chaque jour à pleins poumons les gaz de la «messe» de cinq heures. C'était le moment où les deux «mairies-annexes» censées recueillir les avis sur l'implantation prévue de la centrale de Plogoff reprenaient la route du petit séminaire de Pont-Croix. Sous une pluie de cailloux, d'objets divers et une bordée d'injures «que ma mère m'aurait interdit de dire ici» (Brassens), les malheureux gardes mobiles allaient se remettre le temps d'une nuit des fatigues d'une rudes journée. Nous aussi.
Et le lendemain on remettait ça. Eux et nous.
Jean-Marie, le maire, qui a aujourd'hui son nom inscrit dans une rue de la cité en attendant un jour, j'espère, sa statue, donnait alors les consignes pour le lendemain. D'une voix nasale qui roulait comme les galets de Feunteun-Aod, il faisait alors un bref bilan de la journée et invitait les manifestants à la manif du lendemain. «Aujourd'hui vous avez encore été très bons». «Restons calmes». «Nous gagnerons». «Merci à ceux qui nous ont une fois de plus apporté leur soutien. Mais n'oublions pas que ce combat est d'abord le nôtre : celui des Plogoffites», etc.
Les blev hir, les gens en cravate, les jeunes, les vieux, tout le monde prenait bonne note et applaudissaient le sage.
Il nous fallait ensuite rédiger nos textes transmis le plus souvent au téléphone (sur écoute) à une sténo.
Un jour (la fatigue ?), je me trouvais à court d'idée. J'eus l'idée de demander son témoignage sur les événements à Ulrich Wickert. Envoyé spécial de la première chaîne de télé allemande, il était sur le coup chaque jour. Depuis le début.
«Nous trouvons qu'il est passionnant de montrer chez nous des gens qui luttent contre le nucléaire pour préserver une société lentement bâtie au cours des siècles. D'autant plus que des pays comme l'Allemagne, les États-Unis, le vôtre aussi sont confrontés à de graves problèmes de drogue, de sectes, car leur société, justement n'est plus intacte.»
Ulrich réfléchit un instant avant de répondre à ma question sur les motivations, déterminées, incompréhensibles pour beaucoup des manifestants. Sa réponse : «Les peuples appartenant à des civilisations anciennes trouvent en eux une force imprévisible, inexplicable, pour lutter contre l'adversité. Nous découvrons ici une société qui possède beaucoup de valeurs spirituelles qu'il faut défendre aujourd'hui. Je ne crois pas que son combat soit perdu. Mais je ne peux pas dire qu'il est gagné».
Il le fut, Ulrich. Grâce à Jean-Marie, sa petite troupe d'irréductibles Plogoffites et leurs alliés.
«Chonchon» Perazzi
Plogoff : les 30 ans
C'est le titre de la manifestation et de l'exposition organisées par «Ti ar Vro Kemper» (3, esplanade Famille Gabal), jusqu'au 17 novembre.
Tout ce qu'il faut voir et savoir sur les événements. Remarquable. Des photos, des ouvrages, des affiches, des conférences, du théâtre, une maquette du site et, pour terminer, le dernier jour, le film-culte «Des pierres contre des fusils», de Félix et Nicole Le Garrec.
■Lorsque que je nomme «l'esprit de Plogoff » , je ne parle absolument pas des calculs et manipulations des partis de gauche français et de leurs suceurs de roues bretons!!!
Oui je pense que cela serait très intéressant. J’espère que vous avez des souvenirs, des documents, des témoignages sur toutes les idées et les volontés du moment qui ont germé afin de mettre en place un projet alternatif localement et qui n’aurait demandé qu’à être étendu…
Dans le foisonnement d’intentions, d’idées et de recherche d’autonomie énergétique la notion de combat était très présente et bien des individus étaient près à beaucoup d’éventualités, dans l’inconnu de la tournure que devaient ou pourraient prendre les évènements..
L’une d’entre elles, il me semble, était une réflexion sur la création d’une banque ou tous les volontaires auraient placé leur argent et appelé à suivre cette démarche. La recherche de renseignements avait relativement avancé…
À propos de l’engagement populaire à Plogoff, l’intervention de Mr UlrichWickert me pousse à utiliser la réponse en deux parties, qu’il vous a faite à Plogoff il y plus de trente ans, pour faire constater trois décennies plus tard, la situation hibernante de la Bretagne et tout le poids des différences politiques, étatiques et écologiques entre l’Allemagne et la France !
« Nous trouvons qu'il est passionnant de montrer chez nous des gens qui luttent contre le nucléaire pour préserver une société lentement bâtie au cours des siècles. D'autant plus que des pays comme l'Allemagne, les États-Unis, le vôtre aussi sont confrontés à de graves problèmes de drogue, de sectes, car leur société, justement n'est plus intacte. »…
« Les peuples appartenant à des civilisations anciennes trouvent en eux une force imprévisible, inexplicable, pour lutter contre l'adversité. Nous découvrons ici une société qui possède beaucoup de valeurs spirituelles qu'il faut défendre aujourd'hui. Je ne crois pas que son combat soit perdu. Mais je ne peux pas dire qu'il est gagné. »
Merci Mr Ulrich Wickert pour ces réponses que vous fîtes à JC Perazzi, il y a trente et un ans à Plogoff.
Heureux de reprendre contact avec vous, trente ans après ces évènements.
Nicole et Félix Le Garrec vont bien et vous saluent.
A l'attention de Léon-Paul Creton
Il y a eu un avant, un pendant et un après Plogoff. Avec des solutions concrètes et judicieuses. Je rassemble actuellement, tirés de mes archives, des éléments sur ces évènements. Je compte faire un jour une chronique pour dire les solutions concrètes proposées à l'époque.
Dans l'immédiat, on peut, pour en savoir plus se reporter au site de Nature et Culture Lorient, qui propose des voyages d'étude aux élus et aux particuliers en Allemagne, en Autriche et en Suisse, pays qui ont pris des longueurs d'avance dans ce domaine:
www.nature-et-culture.org
Et, aussi:
www.negawatt.org