Interview de Brigitte Kloareg

Interview publié le 29/12/10 21:24 dans Cultures par Fanny Chauffin pour Fanny Chauffin
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«ABP - Brigitte, comment as-tu connu les singing circles ? Comment t'est venue l'idée de lancer cette idée en Bretagne ?»

ßrigitte - En 1994, je suis tombée dans ce milieu des singing circles qui avaient été mis en place en Irlande à l'initiative d'Irlandais qui habitaient à Dublin et avaient créé un club de chanteurs non accompagnés «An Goilin». Ils se retrouvent tous les vendredis soirs au Teachers Club. Un vendredi sur deux, un chanteur ou un raconteur. les infos sont disponibles en ligne sur le site www.goilin.com. Cette initiative à été suivie ailleurs en Irlande: Nenagh, Spancil Hill, Clonmany, Knockcroghery, Cork, Ennis... Des enregistrements sont disponibles pour un certain nombre de ces clubs.

Une autre occasion pour les chanteurs irlandais de se retrouver sont des week-ends organisés en l'honneur d'un chanteur disparu. Ainsi depuis quelques années, à Dublin, s'organise en septembre le Frank Harte Festival. Pour ma part, je me rends souvent près de Galway en février pour le week-end organisé en souvenir d'un chanteur de Galway que j'ai bien connu et dont je chante certaines chansons -Mike Donoghue. Cet événement a lieu tous les ans dans un petit village où il s'était marié un an avant de trouver la mort dans un accident de voiture. Mais ces événements n'ont rien de triste. On évoque le disparu à une ou deux reprises mais surtout on se retrouve pour chanter ensemble.

Quand je suis arrivée en Bretagne, ces cercles de chanteurs me manquaient terriblement. Il fallait que je trouve un moyen de recréer cette ambiance, cette convivialité. J'en avais parlé dans une interview pour Ouest-France. Je rencontre alors par hasard Marido Le Guillou (alors présidente de l'association Lagadenn) au festival de Douarnenez. L'idée lui plaît et on décide de lancer ensemble les «Me a gan», réunions de chanteurs a capella qui se réuniront une fois par mois pendant neuf ans. D'autres seront organisés à Trégunc, Quimper, Locronan, dans le Trégor, à la fête des langues de Brest ..

«ABP- Neuf ans de Me a gan, quel bilan en tires-tu ? Quelles différences entre les »me a gan« de locronan, du trégor, de quimperlé ? Comment faire pour que cette expérience soit menée dans d'autres lieux ? »

Brigitte -Il faut que le meneur ou la meneuse de ces réunions soit très à l'écoute des autres et ouvre un espace. Je suis en quelque sorte une «colporteuse de chansons» comme aime à le dire Bastian Guillou. Il/elle doit faire preuve de bienveillance, faciliter le chant, chanter quand il y a un trou quelque chose qui va relancer la dynamique, alterner chant à répondre et chant à écouter, des thématiques différentes...

Une autre condition est le statut du chanteur intervenant : s'il est bénévole, pas remboursé de ses frais de transport, les possibilités d'intervenir se réduisent. Parfois il y a beaucoup de monde, et très peu de chanteurs, ce qui compte c'est que les gens se lancent, que l'ambiance facilite cette prise de risques.

«ABP- Le chant en Bretagne : pour les enfants, pour les adultes. Ont-ils l'occasion de chanter ? Comment faire pour que les écoles, les collèges, les lycées ... chantent davantage ? »

Brigitte - Je peux parler de l'expérience que j'ai en milieu scolaire. Il n'est pas évident de se lancer à chanter devant sa classe si on n'a pas l'habitude de chanter.Il paraît pourtant que c'est dans les programmes. Le chant est souvent pris à la rigolade.... La difficulté c'est de donner du sens, du contexte au répertoire et chanter avec conviction pour faire apprendre airs et paroles aux élèves. Il faut savoir se montrer exigeant comme pour toute autre discipline. Comment demander à des gens qui ne chantent pas de faire chanter les autres ? Il faut travailler avec les enfants, les aider à mémoriser des textes longs en utilisant le jeu, les gestes ... Le chant remplit de multiples fonctions depuis des millénaires, c'est bien plus qu'un divertissement.

J'enseigne depuis cette année à l'Université de Brest une option: l'anglais par le chant... tous les étudiants s'y sont mis pourtant au premier cours, ce n'était pas gagné!

«ABP - Le stage de Clohars ce samedi 8 janvier : quel programme, quelle intention ? »

Brigitte -On va apprendre des chansons courtes sur le boire et le manger, surtout en français. On verra deux chansons en breton et une bilingue. Le but est de réutiliser ces chansons tout le long du festival Taol Kurun.

Cinq occasions au moins vont se présenter : le café du nouvel an à Scaër le 9, la veillée écossaise à Riec le 12, le marché au Coat-Kaër, la dernière soirée appelée justement «me a gan» le mercredi 26 janvier chez Angèle à Riec. Et pour ceux et celles qui veulent chanter tout de suite, rendez vous à Clohars ce dimanche 2 janvier à 17h00 pour le off, avec chansons et café offerts ! Pour me prévenir, merci de m'appeler au 02 98 71 82 50. ou par mail kloareg@wanadoo.fr

«ABP- Tu as réussi à redonner confiance à de nombreux chanteurs amateurs (Servat ne dit-il pas dans sa chanson, chantez la vie l'amour et la mort : »pour vous faire taire, on vous donne des stars«)qui n'ont pas laissé leur voix muette et prennent aujourd'hui beaucoup de plaisir à chanter, à apprendre de nouveaux airs, à entraîner les autres sur le chemin que tu as tracé. Pourrais-tu nous citer un exemple, une expérience avec un de ces chanteurs qui t'a particulièrement touchée ?»

Brigitte - Ca me fait plaisir de penser à Maurice qui chantait souvent la même chanson : «le petit moine», il ne nous a pas chanté grand-chose d'autre pendant des lustres. Et un jour, il a dû avoir un déclic. Il s'est mis à rechercher des chansons au contact de contemporains de ses parents et il a retrouvé les chansons que chantaient des membres de sa famille. Il a commencé alors à organiser des rencontres chantées, à animer des randonnées chantées et est devenu très actif. Denise aussi, qui à 85 ans nous fait régulièrement la surprise de nouveaux airs, de nouvelles paroles, alors qu'au début elle disait qu'elle «ne savait rien»...

Pour s'inscrire au stage du samedi 8 janvier qui aura lieu à la salle de la MPT de St Jacques à Clohars Carnoet, de 9h30 à 17h00, téléphoner au 02 98 71 74 94 ou envoyer un mail à taolkurun@laposte.net

(voir le site)


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