Inauguration à Bouée de la chapelle bretonne Sainte Anne de Rohars restaurée

Reportage publié le 29/04/12 9:42 dans Patrimoine par Maryvonne Cadiou pour Maryvonne Cadiou
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La chapelle bretonne Sainte-Anne de Rohars à Bouée, située en bordure de Loire, a connu ce lundi une grande affluence pour fêter sa restauration.


Cette chapelle est le dernier témoignage du prieuré de Rohars, attesté depuis 1330, tenu par des chanoines régis par la règle de saint Augustin, et qui dépendait de l'abbaye bénédictine de Pornic. Un prieuré est une petite structure, comprenant un prieur dirigeant plusieurs moines, chargée d'administrer les biens de l'abbaye éloignés de la maison-mère. Les biens administrés par Rohars se trouvaient à Bouée et Cordemais. Les offices religieux liés aux obligations du prieur, expliquaient, même quand le prieuré tomba en commende, le maintien de messes régulières à Rohars et donc la reconstruction de la chapelle en 1707 (bénie en juillet) lorsqu'elle fut soufflée par l'ouragan du 30 décembre 1705. Vendue à la Révolution avec les biens du prieuré, elle fut remise en état par la famille de Jean Legland, sans doute sa fille et ses fils, vers 1848 et une sacristie lui fut adjointe au sud. « Ce sont les fils qui d'ailleurs sont désignés comme propriétaire de la chapelle à cette époque. Encore que nous ne sachions pas réellement qui a payé l'ensemble des frais », précise Alain Monnié à ABP. Elle continua à faire l'objet d'un pèlerinage et d'un pardon tous les 26 juillet jusqu'en 1963. En 1967, une tempête détruisit sa toiture puis elle tomba lentement en ruine (voir le site) La cloche de la chapelle, fondue en 1667 par le prieur Jean Robert, se trouve dans le clocher de Bouée en compagnie d'une plus grande de 1807. Toutes deux sont photographiées ici (voir le site)


Le maire de Bouée, Claude Rousseaux (1), et le président de l'association des Amis de la chapelle Sainte Anne (2), Alain Monnié, ont invité pour l'inauguration de la chapelle Sainte-Anne de Rohars, sur la commune de Bouée, des personnalités – élus et représentants des mécènes qui ont permis la restauration :

– deux sénateurs de Loire-Atlantique : Monique Papon (de 2001 à 2011) et André Trillard ;

– la députée de Savenay-Saint-Nazaire Marie-Odile Bouillé ;

– le président de la communauté de communes Loire et Sillon [de Bretagne], Alain Chauveau, adjoint au maire de Savenay.

Pour les mécènes, étaient présents :

– le directeur général de la Fondation Patrimoine (3) François Neyraud ;

– la déléguée générale à la Fondation Total Catherine Ferrant ;

– le directeur de la Centrale de Cordemais Denis Florenty.

Personne du Conseil général puisqu’après deux ans (2007 à 2009) d’échanges qui traînaient il a finalement refusé une participation financière. Mais la discrétion fut de mise.


Après avoir assisté à la coupure du ruban tricolore à l'entrée de la chapelle par monsieur le maire, les invités et le public ont écouté les discours à l'intérieur, sur le fond sonore des bourrasques.

La chapelle, la mer et la culture

Très orientée vers la mer, par sa situation, par sa création... cette chapelle a les pieds dans l'eau de la Loire par grandes marées. Voir son histoire sur le site des Amis (2) et sur (voir le site) page de Bouée (après l'église),

Des cadeaux récents témoignent de la perception de son lien avec la mer :

– Une demi-coque offerte par le sculpteur sur bois vendéen Régis Moreau, dit “Picotto” est au mur – réplique d'un clipper de Baltimore ;

– un ex-voto de la SNSM (Société Nationale des Sauveteurs en Mer) est sur l'emplacement de l'autel. Ils ont retrouvé la statue de Sainte Anne qui a repris sa place, mise à l'abri comme d'autres objets chez des habitants de Rohars quand la ruine menaçait.

Passée de lieu cultuel à lieu culturel, laïc, la chapelle – dont la cloche restera dans le clocher de l'église de Bouée – va être le lieu de choix pour des expositions et différentes manifestations artistiques, ainsi que pour des conférences...

Elle ouvre le premier mai pour la « Journée des peintres dans la nature » et restera ouverte les dimanches après-midis jusqu'au 30 septembre. L'exposition présentée à l'inauguration, sur son histoire, y sera visible.

Il est souhaité que cette animation nouvelle en bord de Loire redonne un peu de vie au hameau de Rohars dont il ne doit pas rester plus de trois maisons en état, mais dont les ruines des autres sont spectaculaires de désolation suite à la perte d'actes de propriété et d'une situation assez embrouillée quant aux statuts des biens divisés par les héritages et les querelles de famille.

Cette chapelle participe aussi au maillage patrimonial très dense des environs de Savenay dont les principaux éléments du patrimoine encore délaissés commencent à être remis en valeur, telle la fuie du château de la Cour de Bouée (privée), le château de Lescuray à Prinquiau pour lequel la mairie a débloqué 50.000 € pour parer aux travaux urgents ou encore le couvent des Cordeliers à Savenay qui sera restauré (voir notre article).

André Trillard, interrogé par l'Agence Bretagne Presse, explique s'intéresser « de très près au patrimoine, avec les fonds que permet d'orienter le Sénat. J'ai participé avec ma collègue Monique Papon à la restauration de 5 ou 6 autres chapelles, notamment Saint-Julien de Planté, à Quilly et à l'installation d'un vitrail au fond de l'église abbatiale de Saint-Gildas des Bois. Restaurer le patrimoine permet à chacun de s'interroger sur son histoire et sur son identité ». Pressé par l'Agence Bretagne Presse de pousser son raisonnement jusqu'au bout et de répondre à la principale question d'identité qui s'offre aux habitants de Loire-Atlantique, à savoir de rejoindre ou non la Bretagne, il a cependant préféré éluder la question.

Le verre de l'amitié

Le verre de l'amitié a rassemblé ensuite presque tous les invités à la mairie où était projeté le diaporama de la restauration de la chapelle réalisé par l'association de ses amis.

Les boissons servies : cidre breton, eau de Plancoët et du rosé ; ainsi que des “réductions” délicieuses. Cette commune a vraiment bien fait les choses et le maire en a été chaudement félicité !

Le livret « Contre vents et marées »

Chacun reçut en cadeau le magnifique livret (de 85 pages) réalisé par l'historien de Bouée Bernard David avec Alain Monnié.

Riche documentation, nombreuses photos, bibliographie avec les sources des archives, manuscrites et imprimées. Et présentation élégante sur un discret fond de cartes anciennes par Éric Morin www.creavisuel.com.

« Contre vents et marées. Des origines à la restauration de la chapelle Sainte Anne ». Imprimerie Le Sillon à Savenay, avril 2012. ISBN 978-2-916949-35-2

Le point de vue des Bouésiens

L'Agence Bretagne Presse a rencontré Martine Ruiz, adjointe à la Culture à Bouée. Elle nous a confié « Je suis née à Bouée, je suis venue petite à la chapelle, je l'ai lentement vue tomber en ruines. Cette restauration est un rêve qui devient réalité. Non pas un rêve d'enfant, mais un rêve mûri plus tard, vers 20 ou 25 ans, et une très bonne réalisation pour Bouée ». Isabelle Fourage, trésorière de l'école Sainte Thérèse de Bouée, trouve la restauration de la chapelle « Très, très bien. D'ailleurs les enfants de l'école vont s'y rendre bientôt, en mai, pour une journée consacrée à la découverte de l'estuaire de la Loire ».

L'action de Bretagne Réunie

Des membres de l'association Bretagne Réunie demeurant à Bouée ont réalisé une affiche et pavoisé d'une dizaine de Gwenn ha Du la route qui menait de Bouée à la chapelle. « Pour bien faire remarquer qu'ici c'est la Bretagne » explique à Agence Bretagne Presse Hervé – chargé des voeux de réunification au CA de Bretagne Réunie.

« Nous avons la chance qu'un membre de Bretagne Réunie habite au bord de la Loire à Rohars même. Le pignon de sa maison était donc une place de roi pour notre affiche » poursuit Hervé. Affiche qui n'a pas manqué d'être vue par les invités à la cérémonie, puisqu'elle se trouvait juste au bord de l'unique route qui mène de Rohars à Bouée et en face du chemin venant de la chapelle. Un Gwen ha Du se trouvait aussi planté sur un mât au bout de l'enclos de la chapelle, et malgré la brise de mer assez forte qui s'acharnait ce jour-là sur Rohars, l'étendard breton était encore là quand la Loire est venue au pied de la chapelle, qui, sur son affleurement rocheux, la défie depuis près de 682 ans.


Notes

1 : Le discours de Claude Rousseaux est proche de sa préface du livre (voir PDF)

2 : (voir le site) des Amis de la chapelle racontant en texte et en images l'histoire de la chapelle et de sa restauration. Nombreuses photos. Il est conseillé de commencer par cliquer sur celles de 2005 : (voir le site) et de suivre les années

3 : (voir le site) de la Fondation Patrimoine


Maryvonne Cadiou et Louis Bouveron pour la partie historique.