Festimanif à Nantes. Après la Manif la Festi : concerts et fest noz

Communiqué de presse publié le 24/09/08 14:11 dans Cultures par Maryvonne Cadiou pour Maryvonne Cadiou

La Bretagne ne démérita pas de sa culture bretonne en cette riche soirée du 20 septembre à Nantes. Ce furent Yannoch et Riwall qui présentèrent, avec leur humour et leur air de ne pas se prendre au sérieux, les artistes qui se sont succédé sur la scène à partir de 18 heures 15 ou 30. Plus précisément membres de Pik-Achu, (Point Barre), la troupe de théâtre lorientaise, ou encore Yann Herlé Gourves et Riwall Kermarrec. Ils font partie de l'équipe de Dizale, l'association de doublages de films et téléfilms en breton (voir le site) et jouent aussi dans Leurenn Breizh, la première “sitcom” en langue bretonne.

La “Festi” démarra avec le Bagad de Nantes, qui, lui non plus, ne manquait pas d'humour et revendiquait par T-shirts interposés. Anthony Jezequel le dirigeait avec une énergie à revendre. « C'est un de la bande de drôles » déclara Donatienne Jossic, (sonneuse de cornemuse débutante, porte-drapeau du bagad et sœur de Jean-Louis), « ceux à qui, nous les aînés, allons passer le flambeau. Notre penn soner est Jean-François Stephan, un super sonneur de cornemuse ; de plus il écrit des partitions et fait des arrangements de partitions à merveille. » ajouta-t-elle. (voir le site) du Bagad de Nantes.

Ensuite, ce fut le concert de Tri Yann, charmeurs, en formation réduite, avec Jean-Paul Corbineau, Jean Chocun, Gérard Goron, Jean-Luc Chevalier et Jean-Louis Jossic – qui commença par un discours (1) écouté très attentivement, souvent applaudi par le public très nombreux encore, qui était resté aussi pour la fête. (voir le site) de Tri Yann.

Puis, comme un superbe défi lancé à d'aucuns voulant l'extinction de la langue bretonne, ceux qui n'étaient pas annoncés au programme, ont créé la surprise, la méga-surprise. Du kan ha diskan (2), dans la plus pure tradition, deux garçons et une fille de « bientôt 14 ans » pour Envel, « 12 ans dans quelques semaines » pour son frère Riwall et leur amie Sterenn qui annonce, elle, « 12 ans », sûr. En fait ils sont quatre, avec Louri, qui n'a pas pu rester après la manif'. Ils ont envouté, fasciné le public qui les a applaudis à tout rompre. Leurs voix, le rythme avec les temps forts de la danse bien marqués, tout y était pour se croire aux festoù noz avec les anciens. « Stupéfiant ! La relève est assurée, pour le chant, pour la langue bretonne ! » glissa ABP à son voisin. « Ce sont mes petits-fils et une amie » répondit-on. En effet il y avait de la connivence entre eux. Le plus grand, qui sans doute n'en pouvait plus de bonheur, jetait de temps en temps un regard souriant à son grand-père, sur sa gauche près de la scène. Patrick Malrieu avait un bon sourire dans l'oeil, lui aussi en répondant cela, fier sûrement, mais modeste. Il n'était plus, à ce moment, le président de l'Institut culturel de Bretagne mais un simple grand-père comblé.

C'était en principe la partie concert de la festimanif, mais, comme à chaque fois que la musique est bonne, il n'est pas interdit de danser ! Certains ne s'en privèrent pas, tant le rythme de ces trois jeunes prodiges, plinn ou gavotte, plein de caractère, les y poussait. ABP a voulu en savoir plus : « Ils ont fait toute leur scolarité à Diwan et, au collège de Plesidy, dans les Côtes-d'Armor, ils prennent des cours de chant en breton avec Robert Le Bastard, très connu dans la région. Il est professeur de deux groupes de quatre élèves. Il donne aussi des cours de chant pour adultes à Guingamp ».

Déjà primés en Bretagne

« En 2005, ils ont gagné, avec Louri, le Festival plinn de Danaouet en Bourbriac » précise Romuald Chuiton, le père des garçons. Ils avaient donc 10, 9 ans, et 9 ans aussi pour Sterenn. On croit rêver ! En 2006, le groupe des quatre a remporté, au Kan ar Bobl (3), le « Kanit 'ta Bugale » ou prix Polig Monjarret pour les jeunes, sur 10 participants, et Sterenn et Louri ont aussi été distingués par un prix en 2008. « C'est la première fois que nous chantons devant tant de monde » confirme Envel, sans que ça lui monte à la tête semble-t-il...

Ne zisoñjit ket ar re-mañ : Envel Chuiton, Riwal Chuiton, Sterenn Diridollou ha Louri Derrien a zo ur yaouankiz a gont hag a gonto evit Breizh ! (4).

Yannoch et Riwall présentèrent Gilles Servat comme « un symbole », ce qui fit rire du monde ! Après une complainte, il interpréta la chanson de Georges Brassens Merde aux cons dont il avait réactualisé les paroles, pour la plus grande joire du public... Puis : « Puisque c'est comme ça, je vais chanter “La Blanche Hermine” ! ». Acclamations, le public n'en attendait pas moins et l'accompagna tout du long. (voir le site) de [[Gilles Servat]]. (voir le site) pour consulter son agenda. Beaucoup de dates en Bretagne mais aussi en Belgique, à Paris...

André Le Meut n'était pas, ce soir-là, le penn soner du bagad Locoal-Mendon, mais un chanteur à la voix profonde et chaude qui enchanta, particulièrement ceux qui ne lui connaissaient pas encore ce talent. Avec ses compères dont Paskal Lamour à la bombarde, Mourad Ait Abdelmalek aux percussions, il se mit au biniou kozh. (voir le site) de André Le Meut sur Tamm Kreiz.

Gwennyn Louarn, elle aussi captiva. De langue maternelle bretonne, elle compose ses chansons en breton. Fille de [[Malo Louarn]], le dessinateur, elle est donc la nièce de Lena (Ofis, Skol an Emsav...) et de son frère Tangi (Eblul). « J'ai toujours baigné dans un milieu bretonnant et culturellement militant ». Après avoir gagné le prix du public au concours de chants en langues celtiques à Inverness en Écosse (voir (voir notre article)), elle va représenter la Bretagne et les pays celtiques en Suède le 18 octobre, dans la ville universitaire de Luleå, près du cercle polaire, au festival des chansons en langues minoritaires. Nous en saurons plus dans quelque temps et un appel à voter par Internet sera lancé en temps utile sur ABP. (voir le site) qui donne les participants au concours Liet Lavlut de Suède. Et (voir le site) de Gwennyn.

[[Nolwenn Korbell]] rayonna de son talent, Gweltaz Adeux, Loeroù Ruz, et les autres furent formidables, malgré la prestation de chacun limitée à 10 minutes. La qualité et la diversité des styles de nos chanteurs et chanteuses étaient au rendez-vous une fois de plus. « Moi je rentre du boulot, je suis venu parce que j'ai vu de la lumière, on peut dire » s'amusa Guillaume, 24 ans « Je ne connaissais pas tout ça. C'est formidable ! C'est quand la prochaine fête bretonne à Nantes ? ». Réponse : « Allez donc dès mardi à l'Agence Culturelle Bretonne, juste en face, ils vous diront ». (voir le site) de Nolwenn Korbell sur MySpace. (voir le site) de Gweltaz Adeux sur MySpace. (voir le site) de Loeroù Ruz sur Tamm Kreiz.

Quand le concert finit-il ? Et quand commença le fest noz ? Les danseurs n'y prirent pas garde ; de toutes façons, les acharnés dansaient depuis le début... À 23 heures, coupures des micros. À 1 h 30, il y avait encore du monde... à ranger, dont Patrick Malrieu e-unan (voir dernière photo), les membres de Bretagne Réunie, de l'Agence Culturelle Bretonne 44...

Notes : (1) Le discours de Jean-Louis Jossic : voir ci-dessous le paragraphe qui en traite et donne le lien video pour la dernière partie de son discours.

(2) Kan ha diskan : chant et déchant, en breton. À danser, ce sont de longues chansons, à deux voix ou deux fois voix ou parfois plus. Avec reprise en tuilé de la fin des couplets. Les plus célèbres chanteuses de kan ha diskan sont les trois [[Sœurs Goadec]], Ar c'hoarezed Goadeg de Trebrivan près de Carhaix, en Poher, et les chanteurs, les trois Frères Morvan, Ar Vreudeur Morvan de Saint-Nicodème (Côtes-d'Armor), dont les 50 ans de scène ont été fêtés à Guingamp ce même samedi.

(3) Kan ar Bobl : chant du peuple, en breton, un concours de chants et musiques de Bretagne créé en avril 1973 par Polig Monjarret pour contribuer à la transmission de notre patrimoine et encourager la création en langue bretonne. Les candidats au Kan ar Bobl furent tellement nombreux que des éliminatoires ont été organisées dans tous les pays de Bretagne dès 1975 et même ensuite à Paris. (voir le site)

(4) “Ne les oubliez pas ceux-là : Envel Chuiton, Riwal Chuiton, Sterenn Diridollou et Louri Derrien sont des jeunes qui comptent et qui compteront pour la Bretagne !”

___________________________À propos du discours de Jean-Louis Jossic :

Jean-Louis Jossic, nouvel adjoint à la Culture à la mairie de Nantes, prit la parole avant le concert de Tri Yann. Il parla autant comme Breton qu'en tant que musicien ou en homme politique de Bretagne. Ayant appris peu avant qu'il s'exprimerait en public, il a juste eu le temps de faire un plan qui tenait sur un format A5. « Le reste m'est venu “des tripes” » a-t-il déclaré à ABP et cela se sentait bien, car il porte, comme tout Breton sensibilisé aux problèmes de son pays, ces sujets-là très profondément.

En homme de théâtre accompli, avec une diction parfaite, une voix forte et donc la compréhension totale pour tous, il eut un discours sans faille, passionnant ; il captiva la foule, avec des arguments dont certains ont peut-être été cent fois répétés, mais qu'il est bon de répéter sans cesse surtout devant tant de monde donc certainement beaucoup de personnes curieuses mais étrangères encore à la question.

Revenant sur l'avant projet de loi visant à réglementer les “pratiques amateurs”, il précisa que les cercles celtiques sont nombreux, qu'« il n'y a pas concurrence entre les amateurs et les professionnels dans le domaine de la culture bretonne, que tous les bagadoù, par exemple, sont formés d'amateurs, sauf un, celui de Lann Bihoué, de la Marine nationale et que, là non plus il n'y a pas concurrence, surtout du fait — et il fut provocateur et pas très tendre — que ce n'est pas le meilleur bagad de Bretagne ».

Il rappela aussi qu'avant d'être professionnels, les Tri Yann, par exemple, ont longtemps animé des fêtes de villages, des festoù noz, jusqu'à ce que leur qualité soit connue et reconnue, jusqu'à ce qu'ils soient mis en lumière et deviennent professionnels.

Sur la question de la réunification administrative de la Bretagne, revendication qui revenait — du fait du retrait récent de l'avant-projet de loi — en premier plan de l'objet de la manifestation, Jean-Louis Jossic rappela qu'un référendum pour la réunification est permis par la loi. Réunification souhaitée par plus de 66 % de la population de Loire-Atlantique. Mais le référendum n'aura pour le gouvernement français que valeur consultative. Il est donc très important qu'il y ait un maximum de votants...

Et il nota entre autres que le problème mis en avant par les détracteurs était toujours le choix de la capitale : Nantes ou Rennes ? Ce n'en est pas un. Il donna des exemples en Europe de développement conjoints de deux grandes villes : en Écosse, Édimbourg n'empêche pas de développer Glasgow ; au Portugal, Porto et Lisbonne ; en Irlande, Dublin et Cork...« ...alors pourquoi nous, en Bretagne, aurions-nous une difficulté à développer en même temps Nantes, Rennes, Vannes, Lorient, Quimper, Brest, Saint-Brieuc, et même Plozevet ! »

Dans le public : « Si on devait voter demain, je suis sûr qu'on aurait plus de 70 % de votants » glisse Bernard à son voisin. « Il est tellement convaincant ! On ne peut pas ne pas le suivre », ajoute-t-il.

La réunification, le référendum... Jossic à écouter sur ABP-TV : (voir le site)

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Maryvonne Cadiou à Nantes-de-Bretagne


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