En Serbie l'algue verte est un arbre

Communiqué de presse publié le 1/08/11 15:24 dans Environnement par Eflamm Korneg pour Eflamm Korneg
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Volontaire coupant l'ailante altissima

Qu'est ce qui peut bien croiser le destin d'un petit village du sud est de la Serbie à la Bretagne d'aujourd'hui et d'hier ?

Temska est une petite bourgade serbe située à la frontière bulgare dans un écrin naturel classé de toute beauté, la Stara Planina (les vieilles montagnes, ou [[Grand Balkan]]). Un emplacement de rêve au bord d'une rivière puissante,des forêts luxuriantes regorgeant de gibiers, de champignons au goût exquis. L'eau y est partout, des chutes d'eau par dizaines suintant du granite, un grand lac en altitude de l'autre côté des collines et un des plus beaux et des plus anciens monastères orthodoxes du pays. Les montagnes qui dominent le village recèlent des plantes uniques en Europe, orchidées sauvages par exemple mais aussi des papillons très rares, des chevaux sauvages, des insectes attirant la communauté scientifique de tous les Balkans.

[[Temska]] est une petite autarcie vivant comme un village breton d'autrefois. On y fait son vin (et quel vin !), son rakia - l'eau de vie des Balkans – on y cultive des jardins potagers généreux, on y fabrique du fromage de chèvre, de la viande, on y pêche du poisson d'eau douce.

Un jardin d'Eden ? Presque.

Presque car cette petite commune d'un millier d'habitants est menacée par plusieurs fléaux écologiques. On ne trouve pas d'algue verte à cet endroit bien sûr, la mer est à plusieurs centaines de kilomètres. Pourtant depuis quelques années est apparue une plante féroce et nocive, l'ailante ou [[ailanthus altissima]]. Cette plante devenant vite un véritable arbre quand on la laisse grandir. Elle est apparue dans les années 70. Elle prolifère à une allure ahurissante et colonise le moindre espace qui n'est pas lui-même recouvert par la végétation. Elle se développe par les racines et tisse une toile souterraine impitoyable, les graines des fruits aussi se disséminent par le vent sans relâche, à tel point que la présence de cet arbre est devenue un problème majeur pour les habitants. Des volontaires européens, parmi lesquels des Basques et des Bretons, se sont relayés depuis plusieurs années pour couper cet arbuste, armés de machettes et de haches dérisoires. D'une année sur l'autre l'arbre resurgit en drageonnant plusieurs fois. Appauvrissant le sol et l'acidifiant (un de ses noms en anglais est acid tree), il menace aussi la diversité végétale et corrompt jusqu'au lait des chèvres qui mangent les feuilles. On trouve communément cette plante en Bretagne, comme dans l'agglomération de Brest, mais elle ne constitue pas une menace car les conditions climatiques ne favorisent pas son développement.


Temska, village enclavé, souffre par ailleurs d'un désintérêt des pouvoirs publics et notamment du pouvoir central qui ignore cette partie pauvre du pays. La conséquence la plus navrante est l'absence de tri sélectif et pis encore l'absence de solutions pour se débarrasser des déchets. Pas un container, aucune possibilité d'acheminer les poubelles jusqu'à la ville de Pirot où se trouve la déchetterie à 15 kilomètres plus bas dans la vallée. Du coup les habitants ont 2 techniques pour se soustraire de leurs déchets : soit ils les brûlent soit ils les déversent dans la rivière. Dans un cas comme dans l'autre, ces solutions sont catastrophiques. Car ce petit village a des atouts exceptionnels, des possibilités de tourisme vert à développer dans le futur.

La lieue de grève de Plestin (22), baie d'une beauté remarquable, souffre de 30 ans d'algue verte. Des pollutions qui gâchent le potentiel de territoires entiers et qui ternissent durablement leur image. Comble du mépris, le gouvernement serbe a fait construire une station de ski en plein coeur du parc protégé. Les retombées pour les habitants ? On pompe gaillardement leur rivière pour fabriquer de la neige artificielle, des pans de montagnes entiers rasés pour construire pistes et hôtels.

A Temska, Dule Mihailovic, un charpentier engagé dans la vie civile, exhorte à réagir : le plus gros problème ici c'est l'écologie, il n'est pas trop tard même si nous récupérons maintenant les déchets de la station de ski. Près de son atelier de menuiserie coule la rivière et les voisins déversent leurs détritus, faute de véritable alternative. Il nous faut de l'argent, le gouvernement ne fera rien pour nous. Dule et d'autres appellent à la coopération européenne. Il suffirait de 4 ou 5 containers et un petit camion pour convoyer les poubelles à la ville. En attendant, la désertification rurale suit son cours, les jeunes partent à la ville et ne reviennent plus qu'aux beau jours. Processus inexorable ? Pas si sûr si le village arrive à convaincre de l'importance de son potentiel écologique et touristique.


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