Ecole : il est grand temps d'ouvrir les yeux

Communiqué de presse publié le 30/03/13 21:38 dans Société par Fanny Chauffin pour Fanny Chauffin

Quand l'école ne se soucie plus de ses enfants, quand deux ans de scolarité en 1970 équivalent à trois ans en 2013

Coup de gueule d'une institutrice, Joelle Perrot, enseignante en maternelle.

«Ecole ! Il est grand temps d'ouvrir les yeux !!

- En 1894, les élèves des écoles primaires avaient 1338 heures de cours par an, réparties en 44 semaines de classe de 30 h (5 journées de 6 h) + 3 jours…

- En 1964, les élèves des écoles primaires avaient 1110 heures de cours par an, réparties en 37 semaines de classe de 30 h (5 journées de 6 h).

- En 1969, les élèves des écoles primaires avaient 999 heures de cours par an, réparties en 37 semaines de classe de 27 h (4 journées de 6 h + une matinée de 3 h ).

- En 1991, les élèves des écoles primaires avaient 972 heures de cours par an, réparties en 36 semaines de classe de 27 h (4 journées de 6 h + une matinée de 3 h ).

- En 2012, les élèves des écoles primaires avaient 864 heures de cours par an, réparties en 36 semaines de classe de 24 h (4 journées de 6 h).

Petit calcul :

Si aujourd'hui, nos élèves devaient suivre annuellement le même nombre d'heures de cours que les élèves du début du 20e siècle, il faudrait ajouter 20 semaines de 24 h de cours à leur année scolaire… C'est-à-dire que deux années de classe en 1900 valaient environ 3 années de classe aujourd'hui !

Ce qui fait que sur 5 années de primaire, les élèves de 1900 avaient accumulé autant d'heures de cours que ne le feraient nos élèves d'aujourd'hui durant environ 7 années et 2 trimestres de classe (selon les horaires actuels)…

Que l'on s'entende bien alors, avant d'entamer on ne sait quelle nouvelle réforme de l'enseignement en primaire ; soit on considère que les élèves des années 1900 étaient vraiment très nuls et qu'il fallait les abreuver de leçons afin de les voir acquérir les connaissances de base nécessaires à leur entrée dans la vie active ou dans le secondaire, soit on considère que les élèves actuels sont si éveillés qu'ils peuvent acquérir les compétences de base indispensables à leur entrée en secondaire en seulement 2 tiers du temps scolaire dont bénéficiaient les enfants du début du siècle…

En un peu plus d'un siècle on a perdu un tiers du temps consacré à la scolarisation des élèves du primaire, mais on a ajouté à leurs programmes des matières essentielles pour leur avenir (!!), telles que l'informatique, l'anglais, l'histoire de l'art, etc... C'est important tout ça, c'est sûr, mais pour autant cela n'a pas simplifié l'acquisition des bases de l'orthographe, de la grammaire et du calcul pour lesquelles on a largement rogné sur les heures d'enseignement et d'acquisition des savoirs…

Pour exemple :

En 1969, un élève de CP/CE1 avait 555 heures annuelles consacrées à l'apprentissage de la lecture, de l'orthographe, globalement à l'acquisition de la langue écrite et orale, mais en 2012, un élève devait faire ces acquisitions en 360 heures annuelles (entre temps la langue française ne s'est pour autant pas simplifiée et les difficultés linguistiques auxquelles sont aujourd'hui confrontés les enfants sont les mêmes qu'en 69).

Par ailleurs, dire de nos élèves de CM2 qu'ils sont moins bons en calcul ou en orthographe que ceux du début du siècle est profondément injuste puisqu'on leur a, entre-temps, défalqué un tiers du temps scolaire dévolu à ces acquisitions…

Pour être un tant soit peu équitable ne faudrait-il pas comparer des élèves à qui l'on aurait accordé les mêmes quotités horaires pour l'acquisition de compétences similaires ?

Et dans ce cas, comparer le niveau d'orthographe des écoliers de CM2 des années 50 à celui, non des élèves de CM2, mais des collégiens de 5e des années 2000 ?!

A noter également que si l'on tient compte des acquisitions qui sont aux programmes des classes primaires, les enseignants se doivent d'apporter quotidiennement une nouvelle notion dans chacune des matières de base telles que les maths et le français… Tant et si bien que les temps réservés aux exercices d'entraînement se trouvent réduits à... une peau de chagrin, pour ne pas dire à rien !

A moins que les devoirs du soir…

Oups ! La boulette ! Les devoirs du soir sont interdits !!!

C'est une bonne chose sans aucun doute, mais les élèves de 1900, déjà abreuvés de cours, en avaient, eux !

En fait donc, ce ne sont donc pas 474 heures annuelles de travail scolaire en moins que nous avons maintenant par rapport au début du 20e siècle, mais bien quelques 500 !!

Cela tous les ans pendant 5 ans, ça commence à faire frémir, non ???

Du coup, j'en reviens à mes interrogations : soit les élèves des années 1900 étaient durs de la comprenette, soit nos élèves actuels sont particulièrement doués… A moins que ce ne soient les adultes qui se chargent de l'éducation et de l'enseignement qui se foutent de nos gosses et se soucient moins de leur réussite que de se faire mousser en proposant des réformes complètement ineptes et inaptes ??

Pour tout dire, sachant ce qui se dit sur les performances des élèves d'aujourd'hui en maths et en français, je n'ai pas beaucoup de doutes quant à la réponse à apporter à mes questions…

Ce qui m'amène à en poser d'autres :

Quand donc allons-nous cesser de nous moquer de nos enfants ???

Quand donc allons-nous cesser de dénigrer leurs compétences et admettre que dans ce gâchis, notre système éducatif tient une grande part de responsabilité ???

Voilà ! C'est mon coup de gueule du jour…

Mais en tant qu'enseignante, vieille de plus de 30 ans d'expérience, j'aurais juste ceci à ajouter pour nos têtes bien pensantes du Ministèrede l'Education Nationale :

Aujourd'hui, le problème n'est pas tant d'ergoter sur le nombre d' heures d'enseignement que d'½uvrer à la mise en cohérence des acquisitions que l'on attend des élèves, d'une part, et du temps qui leur est accordé pour y parvenir, d'autre part…

Donnez nous le temps d'enseigner et donnez à nos élèves de primaire le temps de découvrir, d'apprendre, d'acquérir et d'assimiler et vous aurez mis en place la réforme éducative la plus intelligente qui soit.

Lire, écrire, compter sont les bases nécessaires à tout autre apprentissage,

quand donc allons-nous donner à nos enfants le temps de les maîtriser correctement ?

Non, les élèves d'aujourd'hui ne sont ni plus ni moins intelligents que ceux d'hier.

Non, les enseignants d'aujourd'hui ne sont pas moins attachés à la réussite de leurs élèves que ceux d'hier.

Oui, il est temps que les responsables des réformes de l'enseignement se mettent un peu à l'écoute des »gens de terrain« afin de ne pas décider sans savoir…

Tout élève bien formé par ses enseignants sait qu'il faut bien maîtriser les tenants et les aboutissants d'une proposition avant de l'exposer à sa classe, j'ose espérer (encore un peu !) que nos élus aussi !!

Joelle Perrot, enseignante en primaire

NB : Cet article n'est rien d'autre que le fruit de ma réflexion personnelle et n'engage donc personne d'autre que moi-même !!»


Vos commentaires :
Philippe Lamour
Vendredi 27 décembre 2024
Oui, évidemment. Mais, aujourd'hui les temps sont troublés entre les hommes et les femmes. Tout excès, en terme de temps de présence des enfants à l'école, pourrait être interprété comme une transformation des enfants en bien d'Etat. Pourtant ... Il convient de réfléchir à l'importance et au sens de la famille.

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