Le militant de la langue bretonne Martial Ménard, auteur de dictionnaires de référence et de nombreuses chroniques sur la langue bretonne, est décédé le 8 septembre des suites d’une longue maladie. Il avait 65 ans. Ardent défenseur de la Bretagne, il a mené sa lutte jusqu'au bout de ses forces.
Président du dernier salon du livre de Carhaix, nous présentons à nouveau ici son intervention alors qu'il dénonce l'inaction du Conseil régional : «La politique linguistique menée par la Région n'a pas été efficace malgré les bonnes paroles qu'on entend parfois... L'État français continue un subtil et hypocrite travail de sape en faisant semblant de défendre les langues minoritaires avec, par exemple, la charte européenne qui a été signée mais pas ratifiée», avait déclaré l'invité d'honneur du salon.
Ancien activiste du FLB, il fut arrêté en 1978, condamné puis amnistié en 1981. Il consacre ensuite sa vie à la composition de dictionnaires publiés par sa maison d'édition An Here.
An Here a eu un succès foudroyant avec la publication de Les Mémoires d'un paysan bas-breton de Jean-Marie Déguignet, tirées en tout à 400.000 exemplaires. À ce jour, ce livre reste le deuxième tirage le plus important de l’édition bretonne après Le Cheval d’orgueil de Pierre-Jakez Hélias.
Il fut aussi à l'origine, avec Charlie Grall, du média (sur papier) Breizh Info (1996-2001) qui précéda l'ABP. Il a reçu le collier de l'Hermine en 2013 pour son oeuvre pour la Bretagne.
La cérémonie religieuse sera célébrée le lundi 12 septembre à 14 h 30 en l’église de Lanrelas dans les Côtes-d'Armor. Il repose à la chambre funéraire de Broons : (voir le site) pour la carte.
■Martial Ménard
L'hypocrisie est un élément majeur du «système» français :
«D’ailleurs, je suis si insolent dans ma manière de penser, j’ai quelquefois des expressions si téméraires, je hais si fort les pédans, j’ai tant d’horreur pour les hypocrites, je me mets si fort en colère contre les fanatiques, que je ne pourrais jamais tenir à Paris plus de deux mois.»
Voltaire – Correspondance
«Les masques à la longue collent à la peau. L’hypocrisie finit par être de bonne foi.»
Edmond et Jules de Goncourt – Idées et sensations
«…l’hypocrisie est un vice à la mode, et tous les vices à la mode passent pour vertus. Le personnage d’homme de bien est le meilleur de tous les personnages qu’on puisse jouer aujourd’hui, et la profession d’hypocrite a de merveilleux avantages. C’est un art de qui l’imposture est toujours respectée ; et quoiqu’on la découvre, on n’ose rien dire contre elle.»
Molière – Dom Juan, ou Le Festin de pierre (V, 2) (1665)
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« On ne répand pas une langue par la force : en imposant sa culture aux Slesvigois qu’elle s’est annexés par la violence, comme aux Polonais de Poznanie ou aux Lorrains de Metz, l’Allemagne se fait un tort moral dont elle ne mesure pas l’étendue. »
« L’Allemagne s’est annexé par la force des Polonais, des Danois et des Lorrains de langue française auxquels elle impose l’usage de la langue allemande, acte de violence qui va contre les principes démocratiques et contre lequel proteste le sentiment universel. »
« Tout impose au Français d’aujourd’hui l’usage du français commun. »
« …toute la machinerie de l’Etat moderne qui prend l’individu à sa naissance et le tient jusqu’à sa mort impose l’usage et la connaissance de la langue commune. »
« Le français commun est la langue de l’administration ; c’est la seule langue qui puisse s’employer avec les agents de l’Etat. »
« Le français est la langue de l’école. […] tous les enfants, à peu d’exceptions près, subissent maintenant l’action de l’école… »
« Le français est la langue de l’armée. »
« Unique langue de l’État, de la littérature et des grandes affaires, unique langue de tous les hommes cultivés et de tous les personnages influents, le français commun est la seule langue qui ait en France un prestige. C’est une tare que de ne pas le parler et l’écrire correctement. »
« Les parlers bretons, flamands ou provençaux, s’éliminent simplement. »
Antoine Meillet – Les langues dans l’Europe nouvelle (1918)