Bon... David... Yoran m'a prévenu... puis Sandrine, ta femme... Ça faisait quelque temps que tu ne répondais plus au téléphone... (soupir)... Paul Rogan est donc orphelin... ! Je voulais te parler d'un projet... Qu'on aurait fait se rencontrer nos personnages dans un prochain bouquin, tout ça... Tu devais passer à la maison depuis... Tu devais retourner à Quiberon depuis... On devait faire des signatures ensemble depuis.... Tu devais commencer la suite de « Emgann-Vents d'Ouest » depuis... Depuis...
Depuis que tu étais malade, tout cela s'était arrêté.
Je te l'avais dit, David, tu avais créé un genre : le « polar indépendantiste breton ». Où l'on gagne à la fin. Où l'on putain de gagne à la fin. Parce qu'on gagnera à la fin David ! La réunification... l'indépendance... même si la lutte doit durer mille ans....doit durer des vies !....
Te l'avais écrit David. Tu avais du talent dans le stylo ! A en mettre à genoux Guillaume Vargas ! Mais la Faucheuse et l'Ankou ont décidé d'écourter les choses. Voilà... Il restera de toi trois romans. L'Irlande pour le premier... La Bretagne pour les deux autres. L'Irlande... C'est toi qui m'avais fait découvrir Liam Ó Flaherty.... Le titre de mon roman c'est grâce à toi, David... C'est également par toi que j'avais fait la connaissance de Sam Millar, l'ancien blanket man de l'IRA passé écrivain... Pour évacuer ses cellules entières de fantômes... Bon, je l'ai prévenu ce soir... on n'aura jamais l'occasion de se voir tous les trois.
Parlé des kilomètres du mouvement breton !... du monde du polar... de l'Irlande... des films de gangster... de tes projets de scénario... de ta vie... jamais de ta maladie... à chaque fois que j'essayais, même réponse... « c'est comme ça »... comme ça... C'est comme ça.... c'est comme ça que tu es parti pour Tír na nÓg à 43 ans...
Tír na nÓg, cette île, loin... à l'ouest... Là où vont ceux qui sont tombés pour les nations celtes... Sandrine m'a écrit que tu t'étais battu jusqu'au bout... J'en suis sûr, David ! Comme je suis sûr que tu as créé une école littéraire. Pour la Bretagne !... et Roparz Hemon l'avait dit, David, un combat ça se gagne aussi par la littérature !
■