Après l'oubli sur un trottoir de pièces à conviction sous scellés, provenant de la perquisition au domicile de deux militants présumés de l'ETA interpellés le 28 octobre dernier, voilà que le lendemain même de la bourde des policiers du RAID, le Ministre de l'Intérieur Manuel Valls annonce qu' « il n'y aura pas de structure administrative basque dans la prochaine loi de décentralisation ». Ces propos maladroits interviennent quinze jours après que sa collègue Mme Lebranchu, Ministre de la Réforme de l'Etat et de la Décentralisation, se soit déclarée favorable à « la reconnaissance institutionnelle du Pays-Basque par la République ».
La sortie de Manuel Valls à ce moment-là n'est pas anodine. Elle sous entend que la revendication d'une collectivité basque est liée à l'ETA.
Régions et Peuples Solidaires dénonce l'amalgame fait par Valls qui profite des circonstances de l'arrestation pour tenter de tuer dans l'œuf le projet de collectivité territoriale présenté début octobre à Mme Lebranchu par une délégation du Conseil des élus du Pays Basque.
Le Pays Basque s'achemine progressivement mais avec détermination vers une sortie définitive de la violence. L'évolution encore récente reste fragile. Elle mérite une attention et une rigueur de tous les instants de l'Espagne mais aussi de la France car les plaies ouvertes par trente années de conflit armé ne sont pas encore refermées. La question basque ne peut pas, à l'instar du Ministère de l'Intérieur, être traitée avec autant de légèreté et d'amateurisme.
La revendication pour l'émergence d'une collectivité basque est portée de façon majoritaire par la société basque. Lors de la consultation populaire organisée par le Collectif Batera en mars 2010, plus de 78% des votants s'étaient prononcés en « faveur d'une Collectivité Spécifique au Pays Basque ».
Par ses propos, Valls bafoue, non seulement l'expression de la société civile basque, mais aussi la légitimité de ses représentants qui, au sein du Conseil des élus du Pays Basque, ont voté à plus de 80% pour le projet de collectivité territoriale. Sa déclaration à l'adresse de la société basque, publiée dans un journal espagnol, est un grave manque de respect, comme le souligne le président du Conseil de développement du Pays Basque, Jean-Baptiste Etcheto, aux «centaines de chefs d'entreprise, syndicalistes, enseignants, chercheurs, représentants de la culture et des chambres consulaires, dont la CCI» qui se sont prononcés favorablement pour la collectivité territoriale. Face aux déclarations de Manuel Valls, c'est l'ensemble des élus du Pays Basque qui s'indigne, toutes tendances confondues.
La revendication basque est démocratique et pacifiste. Elle s'inscrit au Sud comme au Nord dans le respect des cadres institutionnels. Il faut que la France tienne compte de cette aspiration et que dans la future loi de décentralisation, une place soit faite pour une reconnaissance officielle de la réalité basque au Nord des Pyrénées. Il en va du respect de la démocratie et de la consolidation du processus de paix.
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