Des demeures bretonnes, étirées, moussues, dont les ardoises ressuyées par la pluie scintillent sous le soleil printanier. (voir le site) Une amazone gracile et noble, saisie sur son cheval si bien dessiné qu'il semble sortir, sur l'instant, de la feuille. Un lièvre arrêté en plein bond. Une Bretonne sous sa coiffe, au regard triste et millénaire où se reflète la Bretagne. Une sainte Anne touchante de simplicité dans son costume breton. Il est difficile de ne pas être ému jusqu'au tréfonds de son âme par les œuvres d'Anne Floc'h qui invitent à aller plus loin dans la découverte de l'artiste nantaise, mariée et mère de trois filles, qui, pour le dessin a gardé son nom de jeune fille.
ABP : Bonjour, Anne Floc'h, vous écrivez que vous êtes issue d'une famille d'artistes, pouvez-vous nous en dire plus ?
Anne Floc'h : Oui, mon grand-père et ma grand-mère étaient artistes. Mon grand-père Yves Floc'h est né dans une ferme à Plouguerneau, en pays Pagan. En 1922, il devient en 1922 garçon du presbytère où l'abbé Yann-Vari Perrot est vicaire ; il remarque les dons d'Yves pour la peinture et lui paie ses premiers cours de dessin avec un professeur de Lesneven (voir le site) Par la suite, mon grand-père fait les Beaux-Arts et devient professeur de dessin. Après Saint-Dié, en 1941, il est nommé à Dinan. L'abbé Perrot a été un ami de la famille. C'est pourquoi j'ai fait un portrait de lui en me basant sur une photo de Ronan Caouissin qui le représente coiffé de sa barrette d'ecclésiastique et souriant (voir le site) ce qui tranche avec les portraits sévères que l'on présente de lui habituellement. Après son assassinat, sa mémoire a été récupérée par les nationalistes bretons qui ont parfois involontairement escamoté sa dimension de prêtre catholique, essentielle pourtant car, l'abbé Perrot, créateur du Bleun-Brug avait choisi comme devise «Feiz ha Breiz».
Ma grand-mère, Marguerite Floc'h est issue d'une famille d'artistes de Quimper, photographes et peintres (voir le site) Artiste elle-même, elle a choisi de se consacrer surtout à sa famille (voir le site) Cette vidéo date maintenant de quelques années, elle atteint son centenaire. Ils ont eu quatre enfants, dont mon père qui s'est installé à Lannion où je suis née.
ABP : Vous êtes donc de Lannion. Comment êtes-vous venue à Nantes et quelles études avez-vous faites ?
Anne Floc'h : J'ai fait des études de graphisme publicitaire à l'école Pivaut à Nantes. J'ai rencontré mon mari dans la Cité des Ducs où il travaillait déjà. Je suis donc revenue m'installer en Loire-Atlantique après mon mariage. Bretonne et fière de l'être, je ne pouvais m'installer ailleurs qu'en Bretagne ! J'ai laissé tomber la publicité, appris des techniques telles le pastel ou l'aquarelle, pour avoir plusieurs cordes à mon arc.
ABP : Quel genre d'œuvres faites-vous ?
Anne Floc'h : D'un côté, je fais des aquarelles et dessins très figuratifs pour représenter des demeures, des animaux, des portraits. D'un autre côté, je fais de l'illustration un peu plus naïve pour les enfants notamment, surtout sur des thèmes religieux pour des images pieuses, des représentations de saints patrons, des cartes de Noël. Je vends aussi des reproductions d'œuvres originales, par exemple du portrait de l'Abbé Perrot, numérotées et en format A3 (30 €). Mais aussi des dessins de chasse, chiens, chevreuils, sangliers... Ce que l'on me demande le plus ? Des demeures, des saints patrons, des portraits d'animaux. J'ai réalisé une sainte Anne pour la librairie du sanctuaire d'Auray, avec un visage plus doux que celui de la statue.
ABP : Au sujet des animaux, comment vous êtes-vous prise de passion pour la peinture animalière ?
Anne Floc'h : En 2008, mon mari et moi avons rejoint un équipage de vènerie, le Rallye Pays de Retz, avec qui nous suivions des chasses vers Bécon en Anjou, Derval et Juigné dans la Mée. L'ambiance très particulière de la vènerie m'a donné envie de faire de nouvelles aquarelles pour peindre la beauté des animaux et de cet art de chasser. Puis j'ai remporté le concours pour le logo du forum de Vènerie dans l'Ouest, (voir le site) qui m'a offert un stand à la fête de la chasse de Carrouges en Normandie. J'ai alors commencé à exposer mes premières aquarelles animalières. Et puis comme elles avaient du succès, j'ai continué.
ABP : Quel est votre point de vue sur la Bretagne ?
Anne Floc'h : Sans jamais gommer nos origines bretonnes, j'ai reçu une éducation surtout patriotique française, dont je m'éloigne peu à peu étant donné l'état de décrépitude morale de la France, notamment parce que les gens ne croient plus en rien. Ce qui me réjouirait vraiment, c'est que la Loire-Atlantique revienne à la Bretagne. De façon personnelle, j'ai choisi d'apprendre le breton pour mettre ma pierre dans l'édifice et que jamais notre langue ne se perde.
ABP : Merci de nous avoir consacré du temps pour cet entretien. Quels sont vos projets pour cette année ?
Anne Floc'h : Mon premier projet, pour lequel je dois consacrer ce début d'année, est l'illustration d'un livre pour enfants. D'autre part, j'aimerais exposer, notamment sur le thème de la Bretagne. Hormis quelques fêtes de chasse et des ventes privées, je n'ai quasiment pas exposé pour me consacrer à ma famille. Je vais donc privilégier la Bretagne, continuer mes peintures de demeures bretonnes et mes portraits de Bretonnes en coiffe, au fusain et au crayon. Je travaille actuellement à quelques illustrations inspirées notamment des [[Seiz Breur]]. D'un autre côté, je vais continuer mes aquarelles animalières pour une galerie qui est intéressée par mon travail.
Propos recueillis par Louis Bouveron