Aide à la presse écrite discriminatoire pour la presse internet

Communiqué de presse publié le 15/12/08 6:43 dans Media et Internet par Gilles Delahaye pour Gilles Delahaye

Dans son dernier bulletin, le club de presse de Bretagne rapporte les coûts de la distribution de la presse en Europe : «Les coûts globaux de la distribution des quotidiens sont en France de 31 % et au Royaume Uni de 28 à 33,5 %, du prix de vente TTC. En Allemagne, Italie et Espagne, où le calcul se fait sur le prix de vente hors taxe, les coûts de distributions sont respectivement entre 33,3 % et 41,2 %, 26,5 % et 32,5 %, 25 % et 30 %.»

Ce qui n'est pas dit c'est que la France ainsi que le Portugal et l'Italie, continuent à subventionner le portage de la presse quotidienne alors que la Grande-Bretagne et l'Allemagne ont abandonné depuis longtemps toutes les aides à la presse sauf pour la TVA à 0% en GB.

La loi de finance 2008 a autorisé des aides de l'État de 284 millions d'euros pour la presse dont 109 millions pour l'AFP seulement (Agence France Presse). Voir la loi de finance en pièce jointe.

Les détails de ces financements sont dans le livre «La Presse quotidienne» de Jean-Marie Charon (1). Pour 2005 par exemple, il s'agit de 8,1 millions d'euros pour la réduction du tarif SNCF , de 8, 2 millions d'euros pour l'aide au portage , et suivant les années, des aides à la modernisation (38 millions en 2005) , au transport postal et des exonération de la taxe professionnelle.

Les chefs d'entreprises de la presse, dont la présence était massive aux états généraux de la presse qui s'achèvent à Paris en ce moment, ont bien sûr demandé une augmentation de l'aide à la presse. La crise économique mondiale, la situation des caisses de l'État, la concurrence déloyale avec les nouveaux médias, ne les gênent pas le moins du monde. Chacun tire sur la corde.

On pourrait penser que ce financement est illégal par rapport aux lois européennes sur la concurrence déloyale, mais non. L'Europe considère que la PQ (Presse Quotidienne) concerne des marchés nationaux. Le Frankfurter Zeitung n'est pas distribué en France, ni le Daily Mirror. Donc pas de concurrence déloyale. Elle oublie par contre qu'il y a dorénavant une presse internet qui, elle, ne reçoit aucune aide de l'état. Quant aux agences de presses du type AFP, elles sont bien sûr sur un marché international, donc concurrentiel avec AP ou Reuter, qui ne sont certainement pas d'accord avec le financement de leur concurrent français à raison de 109 million par an.

Et si la presse écrite était maintenue en vie artificiellement, comme le bassin minier lorrain en 1980 ? Sauver des emplois certes, mais à quel prix ? Il n'y a plus d'argent dans les caisses de l'État, mais il y en a toujours pour sauver les meubles médiatiques dont 5 chaînes de télévision plus une chaîne internationale. On pourrait dire la même chose pour l'industrie automobile. Pourquoi déverser des centaines de milliards en France et aux États-Unis pour sauver les fabricants de voitures à moteurs à explosion et ne pas aider les fabricants de voitures électriques ? Sauver les banques oui, car ce sont nos économies qui sont en jeu, l'épargne des citoyens. Maintenir des industries en vie artificiellement est une autre histoire, une duperie du citoyen lambda qui est le contribuable et qui, à la longue, payera beaucoup plus en appauvrissement de l'économie et baisse de son pouvoir d'achat dans un pays où le taux d'imposition et le déficit sont déjà les plus élevés au monde.


Sarkozy a déclaré « La démocratie ne peut fonctionner avec une presse qui serait, en permanence, au bord du précipice économique ». Il ajoutait : « Il existe un gigantesque problème de distribution. Il faut aider la presse écrite à faire du portage à domicile. Cela créera des emplois, cela permettra au lecteur d'avoir son journal plus tôt le matin. »

Et si on n'avait plus besoin de journal papier ? Et si l'internet et la télévision suffisaient ? M. Hutin (Ouest France) se l'est-il demandé quand il écrivait l'été dernier «Si les choses restaient en l'état, l'augmentation du prix des journaux serait inévitable, avec toutes les conséquences négatives que l'on peut en attendre pour les lecteurs, pour les entreprises de presse et donc pour la démocratie.»

Quelle prétention M. Hutin ! La survie de la démocratie résiderait entre autres dans la survie de votre quasi monopole de la PQR dans l'ouest de la France ? L'OEMB croit de son coté que la garantie de la démocratie au XXIe siècle n'est plus la presse papier mais l'internet.

(1) «La presse quotidienne» de Jean-Marie Charon, La Découverte, coll. Repères, nouv. éd. 2005.


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