L'entreprise de transports Le Divenah, fondée en 1957 à Pluvigner, voyait 80% de son activité basée sur le transport scolaire, essentiellement sur le triangle Auray-Vannes-Pluvigner. Elle employait 35 personnes basées sur les communes de Landaol, Brec'h et Pluvigner ; Cette entreprise était saine. Trop, sans doute pour certains. Tout celà appartient désormais au passé à la suite d'un vote majoritaire des nouveaux conseillers départementaux (19 voix pour, 4 contre) qui viennent de confier au groupement Keolis, filiale de la SNCF, cette activité avec pour conséquences la mise au chômage de 10 employés, le reste (les chauffeurs) étant transférables. Ces derniers devront dorénavant, pour la majorité, se rendre à Vannes pour prendre leur service.
Comment en est-on arrivé à ces absurdités ? C'est là tout le mystère de la commission des marchés, présidée par le conseiller de Quiberon Gérard Pierre, qui a donné la préférence à Keolis à la suite d'une négociation étalée sur 12 jours permettant à cette dernière société d'abaisser ses prix de 0,2% (4.500euro) par rapport à son concurrent. On peut légitimement se poser la question si l'élue, contrairement aux règles en ce genre d'affaire, n'a pas eu connaissance entretemps de l'offre de l'entreprise bretonne ?
Keolis est une filiale de la SNCF qui depuis quelques années fait le forcing pour élargir son réseau en Bretagne. Elle est déjà implantée sur Quiberon-Karnag et dans d'autres régions de la péninsule. Est-ce un hasard ? Ou n'est ce pas plutôt la résultante du déficit colossal de cette même SNCF qui vient d'atteindre près de 12 milliards pour l'année 2015. Sa dépréciation se monte à 2,5 milliards pour SNCF Mobilités (TGV et gares) et 9,5 milliards pour SNCF Réseau (voies ferrées). Ce déficit a entraîné le départ en février dernier de Jacques Rapoport président de SNCF Réseau faute d'avoir obtenu du gouvernement Hollande des assurances financières suffisantes pour non seulement la remise à niveau des lignes mais aussi terminer les nouvelles lignes TGV (Tours-Bordeaux, déjà prévue comme déficitaire) ou en projet (Lyon-Turin). Outre l'enveloppe annuelle de 2,5 milliards versés par l'Etat, la compagnie ferroviaire attend toujours la confirmation d'engagement de ce dernier sur 10 ans. On a là un bel exemple de la façon calamiteuse* dont ce même Etat, au travers de hauts fonctionnaires irresponsables**, gère des entreprises publiques. Dans ce contexte plus que tendu, la SNCF fait pourtant des bénéfices au travers de sa filiale KEOLIS, bénéfices réalisés essentiellement en dehors de l'hexagone. On comprend bien que pour la compagnie ferroviaire il n'y a pas de petits recettes et que toute entreprise dont le marché est stable est bonne à mettre dans son escarcelle. Et quoi de plus stable qu'un réseau de ramassage scolaire ?
Il est quand même étonnant, sinon scandaleux, de constater que la majorité de cette assemblée n'ait pas vu les conséquences de sa décision : la fermeture d'une entreprise familiale bretonne implantée de longue date et la mise au chômage de 10 personnes. Bien sûr ils ne manqueront pas de se réfugier derrière les règles des marchés publics : cet argument, on l'a lu en début de cet article, peut être contesté. Et c'est ce qu'a fait l'entreprise Le Divenah en posant un recours devant le tribunal administratif. Seulement, voilà, la réponse ne sera pas donnée avant 18 à 24 mois ! Quoi qu'il en soit ces élus ont introduit le loup dans la bergerie et vu l'envergure de KEOLIS rien n'empêchera dorénavant cette entreprise de renforcer un monopole qui lui permettra d'augmenter les tarifs quand bon lui semblera. En attendant, le contribuable mor-bihannais verra sa contribution annuelle(pour l'heure de 1000euro comme tout un chacun) s'alourdir pour combler les pertes de la SNCF tandis que l'Etat hypocrite s'opposera à une revalorisation des tarifs avec comme pudique prétexte «de vouloir protèger nos concitoyens».
Tiern e pep Amzer,
AFB-EKB
*Démonstration de la faillite française de l'Etat-gestionnaire : la perte de valeur des participations depuis un an se monte à 23,9 milliards passant de 84,1 milliards en mars 2015 à 60,2milliards en mars 2016 !
**On en trouvera une démonstration implacable dans l'ouvrage de Jean Peyrlevade « Histoire d'un sauvetage»-Editions Albin Michel
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