Adieu Jeanine Baude

Papier publié le 30/12/21 16:24 dans Disparitions par Marie-Josée Christien pour Marie-Josée Christien
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Jeanine Baude

La triste nouvelle m’est parvenue par son fils Philippe, au nom de sa famille : la poète Jeanine Baude est décédée le 27 décembre. Grande marcheuse, auteure d’une trentaine de livres (poésie, récits, essais) principalement publiés par les éditions Rougerie, Seghers, Tertium éditions, Voix d’encre, Les Vanneaux, La Rumeur libre, lauréate du Prix Antonin-Artaud 1993, Jeanine Baude était une voix marquante de la poésie d’aujourd’hui.

Très active pour la poésie, elle présidait l’association des « Amis de Louis Guillaume » et le jury du « Prix du poème en prose ». Elle dirigeait également la collection «Pierres Ecrites» aux éditions Pétra. Née en 1946 dans les Alpilles, elle avait un lien très fort avec la Bretagne et surtout avec l’île d’Ouessant découverte en 1976. Elle y vivait une partie de l’année quand elle quittait Paris. Elle a participé au beau livre « Empreintes, mémoire d'île » (CEMO & CRAF éditeurs) du poète-archéologue quimpérois Jean-Paul Le Bihan et du peintre Henri Girard, consacré à Ouessant.

C’est par la prose narrative et méditative de ses déambulations urbaines de «New York is New York» publié par Tertium éditions, notre éditeur commun, que j’ai connu l’univers de Jeanine Baude. Je l’avais peu après retrouvée en poésie dans l’«Anthologie subjective» de Guy Allix sur son site. Invitées par les éditions de la Lune bleue qui venaient de publier nos livres, nous nous sommes rencontrées en 2014, au festival « Trouées poétiques » de Port-Louis. Nous avions gardé contact par la suite. Appréciant ses qualités humaines et sa discrétion, je lui ai consacré le dossier central du n°24 de la revue annuelle « Spered Gouez / l’esprit sauvage » en 2018. Dans l’entretien, elle évoquait son attrait pour Ouessant et sa rencontre avec Jean-Paul Le Bihan et l’archéologie. Entre-temps, je consacrai des articles à ses livres «Soudain» (Tipiza) et «Oui» (La Rumeur libre). Attentive à la voix des autres, elle ne manquait pas de m’adresser un petit mot à chacune des informations que je lui adressais.

Un dernier hommage lui sera rendu mercredi 5 janvier à 14 h 30 au crématorium du père-Lachaise, Paris 20ème.

Chaleureuses pensées et sincères condoléances à ses enfants Philippe et Emmanuelle, à sa famille, à ses proches et amis.

Marie-Josée Christien & la rédaction de la revue Spered Gouez / l’esprit sauvage

Les commentaires de cet article sont ouverts, afin que ses amis et ses lecteurs puissent apporter leurs témoignages, dire leur chagrin, offrir leurs condoléances à la famille Baude.

Bibliographie sur wikipédia

La Rumeur libre a publié ses Œuvres complètes en deux tomes

Jeanine Baude dans l'Anthologie subjective de Guy Allix

A propos d’Ouessant, elle cite dans l’entretien publié dans le n°24 de la revue «Spered Gouez / l'esprit sauvage» en 2018 : « Une fois le pied posé sur l’île est venu le temps du poème. Ici l’on ne raconte pas. On ressent. On est pris par la force de la lumière. Son aveu. Sa ferveur. La route miroitante court vers le village, désigne, au loin, le clocher aérien, trois étages de dentelles fondus dans le bleu. Par grappes les voyageurs s’étirent vers ce centre cherché, cousu aux landes, au rivage, à l’océan. Cela tangue encore par ce bruit qui entête, celui de la mer partout présent. On dérive. Sommes-nous venus jusqu’ici ? Ou bien est-ce l’île qui nous a appelés ? » Ouessant, l’île baguée de ses cinq phares. Éditions des Vanneaux. 2016.


Vos commentaires :
La Lune bleue
Jeudi 14 novembre 2024
Merci pour ce bel hommage. Jeanine Baude était une belle personne, une grande poète, une amie. Continuons de la lire et que ses mots si justes nous transcendent et nous gardent éveillés.

Mireille veyssiere
Jeudi 14 novembre 2024
Merci Marie Josée de cet hommage et de nous la faire vivre encore. Jeanine a conduit sa vie de bout en bout. Elle était pugnace avec son brin de folie qui lui donnait une grande liberté. Quand je lui avais demandé d'écrire sur un lieu, elle avait inventé son style avec Venise et un peu plus tard avec New York. C'était ses premiers textes en prose et ils étaient infiniment poétiques. J'ai beaucoup partagé avec elle et elle a beaucoup partagé aussi que ce soit à Ouessant ou à Paris. Elle était généreuse et une femme libre. Elle attendait aussi des autres un esprit large et inventif. C'est un des auteurs avec qui j'ai eu une réelle relation au-delà de celle d'editeur. Bella Jeanine tu es partie rejoindre les âmes lointaines que tu aimais tant. Tu nous manqueras mais tes textes restent. Merci à toi.

Guy Allix
Jeudi 14 novembre 2024
Merci pour ce bel hommage à Jeanine Marie-Jo,
Et j'avoue que je suis heureux que ma petite anthologie ait pu te faire connaître Jeanine, poète fraternelle. C'est du reste aussi une poète de chez Rougerie, une famille aussi. Hasard objectif sans doute, c'est toi-même qui m'a présenté Jeanine à Port-Louis en 2014 comme je te l'avais moi-même présentée dans mon «anthologie subjective». J'avais simplement écrit alors ces mots : «Voilà une poésie qui se laisse »déposer sur le sable« comme à l'abri des certitudes quand la neige vient »coudre l'horizon«. Ici le mot est précis, rien n'est à l'abandon. Et les îles qui durent ce que vivent les roses : l'éternité, nous portent vers un rêve tapi tout au fond de soi.» Je n'ai rien à changer dans cette présentation, sauf à dire que «l'éternité» ne dure pas trop puisqu'une poète rose une fois encore s'en est allée trop vite. C'est vrai que le prochain printemps des poètes est dédié à... l'éphémère et hélas nos amis et amies poètes s'emploient à dire cela non plus seulement avec des mots mais avec la mort elle-même : «regardez comme je suis éphémère». Jeanine, je voudrais que tu commettes encore et toujours ce «délit d'écriture» et que tu n''aie pas commis cet autre délit qui te délie de nous : ta mort. Mais ton corps est là toujours et ton esprit puisque tes mots sont là toujours qui sont écrits avec ton corps et avec ta marche ! Je ne te dis pas au revoir Jeanine mais «bonjour». Merci d'être là tout auprès de nous. Merci de nous avoir tant approchés avec tes mots.

Chantal Dupuy-Dunier
Jeudi 14 novembre 2024
Oui, Jeanine était une grande poétesse et une femme de coeur qui s'intéressait aux autres. Elle fait partie des quelquesfemmes ayant eu le Prix Artaud. C'était quelqu'un de très actif, ayant le sens de l'humour. Elle a même eu la force de pratiquer l'autodérision face au cancer qui l'a emportée.
C'est quand elle a publié «Cathédrale» dans la collection «Pierres écrites» des éditions Pétra que je l'ai fréquentée et que nous sommes devenues amies. Elle avait déjà des problèmes de santé pour lesquels elle devait consulter et faire des examens, mais elle ne savait pas encore à quel point c'était grave et ne se plaignait pas. Elle s'est battue pendant deux ans, comme la petite chèvre de Monsieur Seguin, avec un courage exemplaire.
Marcheuse, dis-tu, Marie-José ? Ah oui, Jeanine était une sacrée marcheuse. Pour l'anecdote, nous avons fait une équipée dans Paris, alors que la maladie était déjà en elle, au cours de laquelle je n'arrivais pas à la suivre.
Ouessant ? Ce qu'elle en dit est très beau. Elle avait projeté que je vienne y faire une lecture. Elle parlait de cette île avec amour.
Après Michel Baglin, Bernard Noël, la poésie a perdu un de ses enfants et moi, je perds encore une amie. Ces morts me laissent tristes à jamais.
Je pense à vous, ses enfants, et à tous ses autres amis.
Adieu Jeanine.

Isabelle Le Bal
Jeudi 14 novembre 2024
Jeanine Baude a reçu le Prix du Livre Insulaire 2018 du Salon du livre Insulaire de Ouessant, récompensant l'ensemble de son œuvre littéraire.
Isabelle Le Bal Présidente Association Cali. EUSA

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