Après les élections législatives en Turquie, l'AKP va devoir trouver le moyen de former rapidement une coalition gouvernementale. Les démocrates kurdes, turcs et leurs amis espèrent que cette coalition fera entrer la Turquie dans la modernité politique et contribuera à rompre la spirale infernale qui engloutit le Moyen-Orient dans la violence sectaire, en particulier en Syrie. Le meilleur peut sortir des 45 jours de tractation qui suivent les élections pour former cette coalition, mais aussi le pire car, si Erdoğan est pour l'instant coi, il peut gripper les négociations et attiser les tensions, tactique jusqu'au-boutiste dont il est malheureusement coutumier, il l'a amplement prouvé ce dernier mois.
Dans un communiqué, le HDP Europe dénonce les man½uvres d'Erdoğan :
«l'ensemble du processus électoral s'est déroulé dans les conditions non-équitables habituelles et la stratégie classique du parti au pouvoir d'utiliser tous les moyens dont il disposait pour avoir recours aux fraudes électorales était malheureusement d'application. Une série d'attentats violents ont été également à déplorer tout le long de la campagne électorale. Des centaines d'agressions physiques spontanées dont ont été victimes les citoyens pro-HDP? dans la rue, les universités et les cafés, des attentats à la bombe ciblant les locaux du HDP dans différents villes du pays à l'explosion d'une bombe lors d'un meeting la veille des élections et qui a fait 4 morts et des centaines de blessés, toutes les tactiques étaient de mise et ont prouvé encore une fois encore la détermination du gouvernement turc pour empêcher une avancée politique durable pour laquelle les Kurdes militent depuis si longtemps».
Une équipe des AKB est présente au Kurdistan et a réussi à se rendre, le dimanche 7 juin, dans plusieurs lieux de la province d'Erzurum, où elle a assisté à des fraudes et des violences de toutes sortes. Elle témoigne à son tour à quel point la fin de la campagne électorale et la journée même des élections ont pu être éprouvantes pour les démocrates.
le maire AKP de la ville a fait la tournée des bureaux de vote avec une kalashnikov dans sa voiture, en tentant de forcer les électeurs à voter AKP. Depuis plusieurs jours il accompagnait les militaires dans les villages, toujours armé, pour faire de même.
nos délégués ont été expulsés du bureau de vote, des policiers en civil (ce qui est interdit là-bas) les ont interceptés et ont photographié leurs papiers.
ils ont recueilli des témoignages de chantage et de pots-de-vin dans ce bureau de vote de la part de l'AKP.
une bagarre a éclaté ensuite entre le responsable du HDP et celui de l'AKP. Quand nos délégués sont allés au commissariat où ils s'expliquaient, ils ont été refoulé.
un jeune électeur du HDP a été battu pour avoir refusé de voter AKP. Nos délégués lui ont rendu visite à l'hôpital avec Dilin Bingöl, candidate du HDP originaire de Rennes.
Muratin Aydin, frère du second sur la liste HDP (Kamil Aydın), s'est fait agresser par un membre de l'AKP. Muratin Aydin est co-président du HDP de Horansan :
«des habitants du village m'ont demandé, à moi et mon ami, si nous travaillions pour le PKK. Ils nous ont ensuite sortis de l'école et 20 personnes sont arrivées et ont commencé à nous frapper. Ce sont les militaires quı nous ont séparés. Nous nous sommes seulement protégés et ils nous ont mis dans la voiture pour que nous partions. Nous n'avons pas voulu aller à l'hôpital tout de suite mais nous sommes allés à la police pour porter plainte. Mon ami et moi avons peur des représailles car notre famılle à tous les deux habite ici».
Yasemin Ibi, co-présidente du HDP, raconte les derniers jours de la campagne :
«depuis que nous avons commencé la campagne, nous avons remarqué que nous avions une grande représentation dans le peuple et que des personnes qui ne s'intéressaient pas habituellement au HDP le font aujourd'hui. C'est une nouveauté car c'est une ville où il y a de nombreux fascistes. Nous savions qu'il y aurait des attaques et des provocations mais nous pensions que ce serait pacifié, comme nous l'avait affirmé le préfet. Il y a deux jours nous avons été attaqués, des centaines de blessés, des voitures endommagées. Nous avons les photos et les vidéos des attaques. Le HDP a porté plainte contre la police, la préfecture et les personnes reconnues sur les preuves. Mais personne n'est en garde à vue. Après ces événements, le local de l'AKP a été attaqué. Le préfet est venu vers nous et a demandé comment il allait expliquer ceci. Il a clairement pris parti pour l'AKP pour nous. Il faut savoir que la tête de liste de l'AKP ici est le ministre de l'intérieur Efkan Ala. Nous avons eu des problèmes pour tenir notre meeting sur la place, alors que les autres partis avaient pu le faire. Mais nous avons résisté et nous l'avons fait. Les pressions continuent et les attaques aussi. Notre local a été attaqué avec des bombes lacrymogènes encore hier soir».
Des fraudes ont également été signalées et dénoncées : une personne identifiée par un procès-verbal de contestation, prise sur le fait à 10h30 dans un bureau de vote en voulant déposer 10 enveloppes dans l'urne pour l'AKP, un policier en civil prenant des photos des électeurs dans ce même bureau à 9h.
un homme a été lynché vers 12h par une vingtaine de personnes. Cet observateur pour le HDP dans un bureau de vote du village a signalé un vote illégal (quelques électeurs de l'AKP ont voulu voter sans se rendre dans l'isoloir). Après être intervenu verbalement auprès du président du bureau, des scrutateurs et des électeurs dans l'irrégularité, il a été molesté par des villageois et le fils du mukhtar (AKP), à la demande de ce dernier. Nos délégués à Erzurum l'ont visité à l'hôpital accompagnés de Dilin Bingöl, de la députée Seher Akçınar Bayar et du co-président du HDP, Zahir Uzun, pour s'assurer de l'obtention du rapport médical de la médecine légale et qu'il porte plainte, avec l'aide de l'avocat.
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