41e Printemps, et pas une ride, à Châteauneuf-du-Faou !

Chronique publié le 17/04/17 10:50 dans Festivals par Fanny Chauffin pour Fanny Chauffin

La capitale des Montagnes noires n'a pas failli à sa réputation, avec 40 couples de chanteurs et de sonneurs tous plus virtuoses les uns que les autres, sans parler des danseurs, jeunes et moins jeunes, tous unis par la même passion de cet art populaire convivial et profondément actuel.

Pas une trace des élections à venir dans une semaine. Des tracts par dizaines partout, parlant des fêtes du Joli Mai : Cléguerec, Landerneau, Pays du Roi Morvan,... Les festivals inventifs se multiplient, les plateaux rivalisent de qualité et d'ingéniosité. La Bretagne et la politique ? Ici, ils s'en foutent. Ils produisent de la culture, ils la vivent au quotidien, ici Deneza parle gallois et amène un pote d'Afrique, là les enfants entament leurs premiers pas de danse avec les grands. Dans la salle des sports, les 220 chanteurs de la gavotte de «Jean-Claude et Louis-Jacques» répètent toute la suite avant de se retrouver dans la grande salle.

19 h 30 : dans la salle bondée, chaleur, proximité des corps, la ronde du milieu entonne le kan avec ceux qui «savent» la totalité de la suite. Encerclés par 200 danseurs qui «diskanent» car ils savent répondre aux trois chants, après avoir répété pendant quelques mois d'Angers à Brest, et la clameur...

Impressionnant !

Des dizaines de caméras et de téléphones portables figent l'événement, sur la scène. Et sur le plancher, plus de 500 danseurs se pressent, entraînés par cette gavotte inattendue, énorme, étonnante. Trois dames se sentent mal, un petit garçon trop serré est enlevé de la ronde, les autres en redemandent, applaudissent à tout rompre... «Ar chadenn 'mañ ket torret». Les deux chanteurs ont raison : la chaîne n'est pas cassée, le chant en breton, même s'il parle ici de Gwilhou le loup ou des expatriés bretons en Amérique au siècle dernier, a de beaux jours devant lui !

Dans la salle, en bas, Jean-Louis Le Vallégant attend les spectateurs curieux de découvrir son spectacle «Ptit Gus», spectacle d'un musicien devenu conteur, chuchoteur, comédien et chanteur. Séquence nostalgie ? Pas sûr. Il se regarde dans la glace, «fait son intéressant», interpelle le public qui en redemande. On va dans l'arrière boutique de la boucherie de ses parents, comme dans celle de Tilly dans «Charcuterie fine» où le fils devient un assassin.

Son énergie, Le Vallegant aurait pu l'utiliser autrement, en virant voyou, comme il avait commencé en dépeçant la peau d'un chien-loup. Mais c'est le Grand Gus et son parrain qui en ont décidé autrement : il deviendra sonneur, de bombarde et de saxo, enchanteur d'oreilles et de danseurs, en se moquant des messieurs bien lissés de la culture officielle ; la culture populaire vient là, s'invite, bien vivante, dans les dialogues, les allusions, P'tit Gus fait du bien à notre mémoire collective.

Les artistes bretons virent à la nostalgie (Annie Ebrel avec le temps des soupirs, Kergrist avec 78.9, Yann-Fañch avec la guerre de 14-18...), mais c'est si bon !


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