Un livre sur Brest, ses cinémas, ses rues de Siam et Jean Jaurès, son architecture, son port, ses marchands ambulants, ses trams et ses parfums.
Un livre sur Brest, d'accord. Un livre sur ses cinémas, ses rues de Siam et Jean Jaurès, ses longues artères de bitume, son architecture qui hésite vaguement entre Broadway et le très débridé urbanisme soviétique, son port, ses marchands ambulants, ses trams et ses parfums…
Oui, mais moi, un jour, c'est peut-être un livre sur Louis Gildas que je signerai, tant il est vrai que ce garçon, sorte de mélange de Youenn Gwernig avec quelques centimètres de moins et de John Lennon à l'accent breton - on pourrait même dire "finistérien" pour faire plaisir à son copain Cozan, qui, tout à l'ouest, joue les capitaines hauturiers d'un drôle de navire de pierre - est un animal rare. Un animal d'une trempe aujourd'hui quasiment disparue, avec le cliquetis des trolley-bus, l'holocauste du cochon sur les contreforts des Monts d'Arrée et les chevaux dans les écuries de fermes corsetées d'ajoncs et de genêts. Car monsieur Gildas, qu'amicalement j'aime à nommer Gweltaz, comme s'il s'agissait d'un nom initiatique, ajoute à une connaissance intime des lieux où flottent ses souvenirs d'enfance, le talent de les raconter.
Les raconter ? Bien plus : les mettre en scène dans une chorégraphie sensible, habile, haute en couleurs et pour tout dire irréprochable. C'est que ce Gweltaz-là, mi démiurge, mi gutuatre*, possède au plus haut point l'art de faire revivre les gens et les bêtes, les coteaux et les rues, les ports urbains et les cours de fermes, à l'aise qu'il est dans les deux milieux, de par sa double ascendance.
Louis GILDAS