En 1999, le Conseil Constitutionnel a rejeté la ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires, estimant qu'elle était incompatible avec la Constitution française. Ce refus repose sur plusieurs arguments, dont certains sont aujourd'hui largement contestés par les chercheurs et les défenseurs du plurilinguisme.
L'unicité de la République
Le Conseil a considéré que la reconnaissance des langues régionales pourrait fragiliser l'indivisibilité de la République française en créant des droits collectifs pour des groupes de locuteurs.
Pourtant, d'autres pays européens comme l'Espagne ou la Suisse reconnaissent plusieurs langues officielles sans pour autant mettre en péril leur unité nationale.
La primauté du français
L'article 2 de la Constitution déclare que "la langue de la République est le français". Le Conseil en a conclu que toute reconnaissance officielle d'une autre langue dans la sphère publique était anticonstitutionnelle.
Pourtant, la Charte ne remet pas en cause le français comme langue principale, mais encourage seulement l'usage et la protection des langues minoritaires dans certains domaines (enseignement, culture, administration locale).
Une vision erronée du bilinguisme
Certains arguments sous-jacents laissaient entendre que l’apprentissage des langues régionales pourrait nuire à la maîtrise du français et constituer un obstacle à la réussite scolaire.
Or, les recherches en neurosciences ont démontré que le bilinguisme précoce favorise l’apprentissage des langues et améliore les capacités cognitives (mémoire, concentration, flexibilité mentale).
Le linguiste et journaliste Michel Feltin-Palas a récemment rappelé cette décision dans sa lettre "Sur le bout des Langues". Il souligne que le rejet de la Charte repose sur une vision archaïque du rôle des langues régionales en France et sur une idéologie centralisatrice qui ne correspond plus à la réalité actuelle.
Dans un contexte où de nombreuses langues régionales sont menacées d’extinction, cette décision du Conseil constitutionnel semble à contre-courant des efforts de protection et de revitalisation menés ailleurs en Europe. La question de la ratification de la Charte reste aujourd’hui un débat essentiel pour la diversité linguistique et culturelle en France.