Quelle future gouvernance en France ?

Chronique publié le 8/07/24 11:29 dans Politique par Marcel Berrou pour Marcel Berrou
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Décoloniser la province, texte historique pour le Parti Socialiste Unifié (PSU), est plus que jamais d'actualité. Ce rapport, présenté par Michel Rocard en 1966 au nom du comité d'initiative aux délibérations sur la vie régionale en France prenait en compte aussi bien les dimensions politiques et économiques que des données institutionnelles, sociales, financières (Ce livre n'est plus disponible mais le rapport est disponible en PDF ci-dessous).

Beaucoup de personnes, en particulier du monde politique, du monde économique et du monde associatif s’interrogent sur la pertinence du mode de gouvernance à la Française.

Plusieurs éditorialistes exposent régulièrement leur point de vue : certains prônent globalement une continuité du centralisme à la Française, d’autres orientent leurs réflexions vers une rupture de notre mode de gouvernance en proposant une harmonisation et un mode de fonctionnement proche de celui de nos voisins Européens : Allemagne, Italie, Espagne ou Royaume Uni. Nos dirigeants peinent en France à engager ce type de réformes structurelles, quand bien même ils l’ont promis, souvenez-vous récemment « du pacte Girondin » proposé par Monsieur Macron lors des présidentielles de 2017. Le mode de gouvernance des pays précités permet pourtant de poser des garde-fous par le partage des compétences et moyens au niveau de leurs gouvernements autonomes et/ou régionaux. Par ailleurs les lois françaises, issues des deux chambres (Parlement et Sénat) et du gouvernement, sont le plus souvent inadaptées à la réalité intrinsèque de chaque territoire : il en résulte un immobilisme structurel des réformes par un nombre exorbitant d’amendements en vue de tenir compte de la diversité des régions. Enfin, selon le rapport de Boris Ravignon, remis le 29 mai 2024 au gouvernement, 7.5 milliards d’économies pourraient être réalisés chaque année en évitant tous les doublons et triplons décisionnels en France : le « fameux » millefeuille administratif.

Il est sans doute utile aussi de rappeler que la constitution allemande d’après-guerre faisait dire à Michel Debré « qu’avec une telle constitution en Allemagne, on pouvait être sûr que l’Allemagne ne serait jamais plus riche que la France… ». Rappelons aussi que le référendum de 1969 proposé par De Gaulle concernant la décentralisation effective des pouvoirs et des moyens n’avait pas obtenu la majorité des suffrages : beaucoup de ténors politiques de droite comme de gauche ayant appelé à voter contre. En Bretagne le « oui « au référendum avait obtenu la majorité. Malgré les appels de Michel Rocard en 1966, et d’autres depuis (dont Michel Onfray), à « la décolonisation des régions », rien que de très timides avancées ont été mises en œuvre au niveau de la décentralisation par les différents partis politiques qui se sont succédés depuis plus de 40ans. Aucune politique n’a permis une mise en place de véritables politiques régionales d’envergure adaptées aux réalités diverses sociétales et économiques. Aujourd’hui le RN a même dans son projet la suppression pure et simple des régions administratives Françaises.

Alors on doit se poser la question : étant donné le mode de gouvernance centralisé de la France doit-on s’orienter vers une continuité dans la « JulesFerryisation* », la « Vichyisation* » immédiate semblant écartée pour le moment, de la société française ? Il y a une autre voie qui serait la voie de la raison et de la sagesse, gage d’une stabilité durable : un gouvernement central garant de la solidarité pour toutes et tous épaulé par des gouvernements régionaux disposant d’une autonomie progressive en adéquation avec les réalités des populations y vivant. Le Référendum de 1969 proposé par De Gaulle est aujourd’hui plus que d’actualité et notre président de la République ferait bien de s’en inspirer afin de proposer directement aux Françaises et au Français une nouvelle voie de stabilité en collaboration avec les nouveaux dirigeants à venir.

*JulesFerryisation (En breton on a le droit d’inventer des mots tous les jours…alors pourquoi pas en français ?) CF. la politique de colonisation à tous les niveaux appliqués par Jules Ferry (3ème république) Pour Jules Ferry, « les races supérieures ont un droit vis-à-vis des races inférieures », un droit qui est un devoir, car « elles ont le devoir de civiliser les races inférieures » …Cela étant vrai aussi bien sur pour toutes les provinces de France (littéralement territoires conquis…). Nivellement des savoirs, arrêt de tout enseignement autre que celui dicté par l’état. Centralisme du pouvoir décidant de tout et verrouillage possible à tous les échelons de décisions.

*Vichyisation : même idée de nivellement général, par un centralisme totalitaire, et mise à pas cadencé de toutes et tous par un régime de dénonciation et de peur…


Vos commentaires :
gg
Vendredi 22 novembre 2024
Oui ce serait bien la voie de la raison, mais cela n'arrivera jamais en république française. En France même les libéraux mondialistes sont centralistes. Le RN qui se rapproche tranquillement du pouvoir veut en effet supprimer carrément les régions, alors on est bien loin de l'Italie, qui avec l'extrême droite aux commandes vote une régionalisation accrue et se rapproche toujours plus d'un systême fédéral... Non, en France il faudra attendre que l'état s'écroule sous son propre poids pour que les «régions» puissent enfin prendre le pouvoir qui leur revient.

Yann L
Vendredi 22 novembre 2024
M BERROU, vos idées sont intéressantes, mais il me semble que votre voix portera davantage lorsque vous serez parvenu à vous faire élire maire.

Philippe CLEMENT
Vendredi 22 novembre 2024
Ce sujet est fondamental pour apaiser les habitants de l'hexagone. Avec l'obligation de faire la réunification de la Bretagne. Sur ce thème, je me permets de proposer le livre qui vient de sortir : 50 ans d'action pour la Réunification - analyse marketing pour la Bretagne, dont je suis l'auteur avec une préface de Jean Ollivro. Il est distribué par Coop Breizh.

Alain É. VALLÉE
Vendredi 22 novembre 2024
Dans ce Rapport : «Décoloniser la Province» (PSU - 1966) :
On évoque : «Les conditions d'un développement autonome» (p.19). Mais il n'est pas question d'Autonomies et encore moins de fédéralisme, alors que c'est pourtant déjà le véritable enjeu.
On lit :: «L'appui profond de l'opinion dans son ensemble est en effet la condition du succès d'une politique de réanimation régionale. A nos yeux, c'est même à cette seule condition que la belle mécanique centralisatrice et stérilisantrice que représente l'Etat en France conserve une chance de s'adapter à un avenir où le changement sera toujours plus rapide.» (p.41)
En 1966, ne parler que de : «réanimation régionale», de «belle mécanique centralisatrice stérilisatrice», «d'adapter l'État (...) au changement toujours plus rapide», ne mettait sérieusement rien de fondamental des institutions jacobines en cause. Même pour le PSU, il n'était pas question d'Autonomies et encore moins de fédération. La boîte à idées du socialisme français qui deviendrait majoritaire en 1981, était déjà quasiment vide.
En 2024, au sortir d'une campagne électorale brève et intense, le thème de la décentralisation et des Autonomies n'a même pas été évoqué. Sauf rares et méritoires exceptions, ce n'était donc qu'une campagne électorale jacobine, de plus, devant aboutir à la composition d'une Majorité jacobine, de plus, soutenant un gouvernement jacobin, de plus.
AV

Alain É. VALLÉE
Vendredi 22 novembre 2024
En tant que boîte à idées du socialisme français, le PSU certes jacobin effectuait un assez bon diagnostic : «Décoloniser la France» (1966) mais il ne proposait pas les bonnes solutions.
« (…) l'avenir de la démocratie comme de l'équilibre économique en France est menacé par la dévitalisation relative de la province. » (p.40)
C’était, pour l’époque, une lucide et pertinente remarque d’une grande audace qui ne pouvait évidemment aller jusqu’à l’anticipation des causes du succès du RN en VII 2024 …!
L’objectif envisagé, dans un seul paragraphe, était et reste pertinent :
« Les expériences de décentralisation (…) ont échoué parce qu'elles ne concernaient pas les conditions qui régissent la décision. Le problème consiste donc à sortir celle-ci de Paris pour tout ce qui n'est pas d'importance nationale. » (p.40)
Voici qui était prometteur et innovant.
Mais la suite qui est jacobine, énonce le plus grand mépris de la Province :
« Pour parvenir à ce résultat, décentraliser la décision en France, il faut créer des institutions régionales et locales de taille utile, ce qui signifie :
- remembrer celles qui existent,
- les doter d'une masse budgétaire totale égale à peu près au double de ce qu'elle est actuellement par rapport au produit national, et
- les peupler d'hommes qui auront conduit et chercheront à terminer leurs carrières en province, qui auront donc trouvé dans quelques grandes villes autres que Paris l'alimentation intellectuelle nécessaire à la vie d'élites locales responsables. » (p.40)
(NB : Pour plus de clarté, les tirets sont de moi.)
Le PSU ose écrire : « remembrer » comme s'il s'agissait du bocage, « peupler d’hommes qui chercheront à terminer leurs carrières en province » un peu comme s'il s'agissait d'envoyer les vieux serviteurs du jacobinisme dans une diaspora, …
Aujourd’hui, presque soixante ans après ce rapport qui se voulait novateur, la décentralisation et les Autonomies n’ont toujours rien à attendre de ce type de logique frileuse, méprisante et euro-incompatible.
Désolant !
AV

Kerbarh
Vendredi 22 novembre 2024
L’obsession égalitariste qui existe aussi bien chez les marxistes jacobins que chez les nationalistes français envoie la Bretagne et la France dans le mur.
Ils sont tous aveugles et sourds.
Une grande crise couve comme en 1940, 1958 et 1968.
La faillite de l’état est proche.
La culture bretonne et même française s’appauvrissent.
Il n’y a plus de ressort, plus d’envie.
Tout le monde attend une intervention miraculeuse de l’état jacobin pour régler ses problèmes!
Heureusement que la France est dans l’Europe sinon on se dirigerai vers une situation à l’Argentine ou au Venezuela.
Et le DIEU « État » est en train de mourir…

Kerbarh
Vendredi 22 novembre 2024
Le jacobinisme et le marxisme ont le même effet que le glyphosate : tout est détruit , rien ne repousse !

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