Il est possible aujourd’hui de mettre en vente une gravure raciste et incitant à la haine à l’encontre des Bretons sans encourir le moindre reproche et sans même se donner la peine de faire le moindre avertissement préalable.
C’est ce que vient de faire l’agence parisienne Ader ce mois de septembre 2023 en mettant aux enchères la présente gravure. Nous venons tout juste de l’apprendre à Koun Breizh et nous ne pouvons pas manquer de réagir.
Le côté artistique de la gravure importe moins ici que le sens de l’œuvre et son message explicite : « Les Bretons mangent et couchent avec les cochons, faut il que les cochons soient sales ! »
Il y a plusieurs manières de réagir à une telle annonce.
On peut fort bien se dire que c’est daté, de peu d’importance, qu’il ne faut pas être parano, manquer d’humour ou de sens artistique.
Et puis il y a notre manière de réagir qui consiste à ne jamais laisser place au mépris.
Le mépris corrompt. Il s’insinue partout, jusqu’au creux des âmes. Le mépris infligé aux Bretons durant si longtemps est toujours là ! Il se retrouve dans cette politique linguistique dérisoire que l’on peine à affronter, avec une Éducation nationale qui se moque de nous, dans l’affaire odieuse du tilde, dans la secondarisation de notre patrimoine à Bouvron comme à Carnac.
Le mépris, il faut le combattre, coûte que coûte, le poursuivre sans relâche, sinon il s’insinue lentement tel un poison et prend possession de nous. Et l’on en vient à s’accoutumer à son « infériorité native ». C’est ce qu’il s’est produit pour des générations de Bretons confrontés à la haine de soi distillée par l’école de la république, au nom des plus belles valeurs.
Ce mépris est encore intériorisé aujourd’hui par beaucoup d’entre nous qui ne considèrent notre culture, notre patrimoine, nos langues comme étant purement « régionales », c’est-à-dire secondaire au regard de la grande culture universelle parisienne.
Tant d’entre nous considèrent encore que l’émancipation de notre peuple n’a pas lieu d’être, en ce que nous ne sommes qu’une « région ». Tant d’entre nous sont encore persuadés de l’infériorité de leur langue qu’ils ne veulent surtout pas la voir unifiée ni sauvegardée. A quoi bon sauver une langue de ploucs !
Ce qui marque les relations entre la République française et le peuple breton, c’est avant tout le mépris. Je me demande même si cette modeste gravure n’est pas la plus juste représentation de la république, pour nous Bretons.
La république a fondé son empire sur la destruction des peuples breton, basque, occitan, alsacien, etc. Même Michel Rocard a reconnu cette vérité comme révélée dans les papiers Wikileaks.
Nous ne sommes toujours pas libérés du mépris que l’on a intériorisé,
c’est la raison pour laquelle, Koun Breizh va édifier la « pierre de la mémoire bretonne », pour donner un visage à ce mépris et surtout à notre résilience.
Vous auriez un doute sur cette singularité du mépris breton ? Remplacez « bretons » par d’autres communautés de votre choix, étrangères par exemple et vous comprendrez que ce mépris, qui semble bénin lorsqu’il s’applique à nous, devient intolérable lorsqu’il s’applique aux autres communautés.
Koun Breizh envisage très sérieusement de déposer plainte pour incitation à la haine à raison de l’origine nationale ou ethnique.
Il faudra que la justice de la république nous réponde de la manière la plus claire. Le peuple breton qui existe suffisamment pour se faire cracher à la figure, existe-il pour mériter la protection juridique liée à la reconnaissance d’une origine nationale ou ethnique ?
Question embarrassante pour la république française qui s’est construite sur la mort de nos vieux peuples, périphériques pour elle.
La réponse qui nous sera donnée aura le mérite de mettre à jour les rapports de domination en vigueur et notre vraie place dans la république.
La vraie république protège les droits de tous les peuples et peut-être même plus ceux sur lesquels on a tant craché.
Pour Koun Breizh
Y. OLLIVIER
■