Rapport sur l’autonomie : où est passée l’Assemblée de Bretagne ?

Chronique publié le 28/09/23 10:18 dans Politique par Émile Granville pour ABP
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Quand on regarde de près le rapport d’étape du groupe de travail Autonomie remis au président de la Région Bretagne en septembre 2023, on s’aperçoit qu’il ne s’agit pas d’un projet d’autonomie. Ce document de 29 pages est constitué d’une longue introduction, de généralités, de griefs faits à l’Etat et de propositions ponctuelles de décentralisation.

Dans ce texte le projet d’autonomie est rejeté continuellement « à long terme ». P. 3, « La question de l’autonomie ne saurait s’inscrire dans un calendrier fini. Elle est posée et doit progresser dans une perspective dynamique d’ouverture vers l’avenir. ». P. 4, il y a le temps court, la question des mobilités, le temps court et moyen, les améliorations à la décentralisation, et le temps long : la Réunification et « des évolutions statutaires et institutionnelles pour une Bretagne autonome ».

Et ce n’est pas fini. P.5, « sans préjudice des réflexions de plus long terme portant sur l’autonomie institutionnelle. » P.7, « voire un statut spécifique pour la Bretagne ». Ce n’est donc qu’une éventualité ! P.25, « La Bretagne souhaite que soient analysées, dans une perspective de long terme, les possibilités de relance de la modification constitutionnelle mise en chantier en 2017 afin de permettre le déverrouillage des possibilités de mise en place de statuts spécifiques et d’adaptation législative locale, au regard des spécificités territoriales. »

P.5, concernant la modification de la Constitution, on apprend que le président de Région a écrit au président de la République : « pour vérifier s’il existe réellement une fenêtre d’opportunité pouvant aussi s’ouvrir pour la Bretagne. » Il faut donc voir si cela est possible ! P. 15, plus étonnant encore, le groupe de travail conforte la déconcentration et les départements : « Il va de soi que les blocs départemental et communal ont leurs spécificités et leurs "spécialisations naturelles" en termes de compétences, liées aux solidarités pour les premiers, à la proximité pour les seconds. » P. 27, le groupe de travail demande que soit : « restaurer le statut et rôle des préfets de Régions. ». De plus, il trouve même que la loi Notre de 2015 a plutôt conforté les blocs de compétences, notamment par la suppression de « la clause de compétence générale pour la Région », alors que justement cette clause de compétence générale constituait le premier pas pour un pouvoir régional généraliste.

Ce texte n’est en rien une demande de statut particulier prêt à l’emploi pour la Bretagne. Il s’agit d’attendre une évolution généralisée à toutes les Régions françaises. P, 26, on trouve la phrase qui résume bien cet état d’esprit, sans parler d’un style politico-administratif assez soporifique : « Dans le cadre de l’art 72 de la Constitution, dans une perspective de long terme, le groupe de travail propose l’étude de ce que pourrait être pour les collectivités volontaires, le déploiement d’un "statut particulier" pouvant se traduire par : des moyens spécifiques, des compétences spécifiques, des délégations particulières de pouvoir normatif, des possibilités de déroger aux règles générales d’organisation des pouvoir publics locaux pour inventer de nouvelles gouvernances et de nouvelles modalités de fonctionnement des institutions. » On peut attendre encore longtemps !

P. 27, nous avons en plus le droit à l’inévitable excuse : « La Bretagne (…) suggère que l’Etat invente une déconcentration différenciée. » « Une telle expérimentation est de nature infra réglementaire et ne ferait courir aucun risque de précédent menaçant l‘unicité de la République. » En effet, vu le pétard mouillé, était-il nécessaire de le préciser ! A noter qu’il aurait été plus correct et cohérent de parler au nom de la Région Bretagne et non pas au nom de la Bretagne.

Mais où est donc passé le projet d’Assemblée de Bretagne dont l’objectif est de rassembler la Région et les cinq départements bretons dans une même institution ? Ne serait-ce pas justement en termes de méthodologie la première étape pour l’obtention d’un statut particulier ? Jean-Jacques Urvoas, ancien garde des Sceaux, est mentionné dans le texte, mais absolument pas pour son travail sur le sujet (voir son livre, Pour l’Assemblée de Bretagne, Editions Dialogues, 2014). En ne formulant pas clairement un projet d’autonomie de la Bretagne, ce rapport ne fait pas avancer la Bretagne, et pire encore, en ne reprenant pas à son compte le projet d’Assemblée de Bretagne, le groupe de travail rajoute de la confusion en repoussant « à long terme » toute perspective d’autonomie. Espérons un sursaut et un peu plus d’ambition. Il n’est jamais trop tard !

Emile Granville


Vos commentaires :
Dimanche 12 mai 2024
Merci à Mr Cosquer pour ses explications claires sur l’évolution de la langue bretonne depuis un siècle.
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